Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité, difficultés d’apprentissage, problème de concentration et de gestion des émotions et j’en passe.
Des étapes autrefois considérées comme un passage obligé dans le processus d’acquisition et du développement de l’enfant. Aujourd’hui elles sont synonymes de sources d’inquiétude par les parents qui ne vont pas sans être transmises aux enfants eux-mêmes.
Sans remettre en question les études menées sur les facteurs de difficultés scolaires ou de nier l’existence d’enfants nécessitants un soutien, il existe une volonté de cataloguer les élèves dans une catégorie et de stigmatiser ceux dont le profil ne correspondrait pas à celui préétabli par le système éducatif.
Pour aider ces enfants, la tendance des dernières années est à l’ergothérapie. Mais de quoi s’agit-il réellement?
L’ergothérapie à la rescousse
Les promesses de cette discipline sont séduisantes pour ces parents en quête de solutions pour leurs chérubins: «Les conduire à réaliser leur plein potentiel aussi bien scolaire, social qu’affectif.» Le rêve de tout parent quoi!
Parmi les difficultés identifiées dont le suivi est nécessaire on retrouve les DYS: Dysorthographie (trouble de l’écriture), dyscalculie (trouble du calcul), dysphasie (trouble primaire du langage), dyspraxie (trouble de l’organisation, de la coordination et de l’exécution de gestes moteurs, d’origine neurologique) et dyslexie (Trouble de la lecture), à ne pas confondre avec les difficultés mineures que pourraient éprouver d’autres enfants.
Mais qu’est-ce qu’un enfant en difficultés scolaires? Par troubles d’apprentissages, on entend les dysfonctionnements qui affectent l’acquisition, la rétention, la compréhension et le traitement de l’information verbale et non verbale.
L’ergothérapie parle de l’importance de ramener l’enfant à un «bon» état de stimulation sensorielle. Concrètement il existerait d’autres sens, outre les 5 sens, auxquels nous serions sensibles et qui pourraient nuire à notre fonctionnement.
Certaines personnes y seraient hyposensibles et d’autres hypersensibles (ex: hypersensibilité auditive, dans ce cas les bruits empêcheraient une personne de se concentrer). L’ergothérapeute a pour mission d’aider l’enfant à réguler une hyperstimulation ou encore une hypostimulation sensorielle, dans le but de mieux interagir en classe ou ailleurs.
Thierry, 7 ans
Thierry, 7 ans, en 2e année primaire bénéficie du suivi d’une ergothérapeute.
Sa maman, Mme Voyer, raconte: «Avant son entrée en maternelle, nous ne soupçonnions rien. C’est son enseignante qui a remarqué ses difficultés en motricité fine, pour découper, dessiner ou tracer des lettres. Je n’ai pas hésité à entamer des démarches auprès d’un ergothérapeute.
«Il a été vite démontré que Thierry est hyposensible, il se fait mal sans ressentir la douleur, il en a même besoin. Nous avons appris avec l’ergothérapeute à travailler sur ça, exercer des pressions physiques pour le calmer et le soulager comme rouler un ballon mou sur son corps lorsqu’ il est très énervé avant d’aller se coucher. Nous avons appris pas mal de techniques pour le calmer à la maison comme le Toutou lourd qui pèse cinq kilos qu’il pose sur son corps. Par moments, c’est lui qui demande à aller rendre visite à l’ergothérapeute.»
Mais qu’en est-il des changements à l’école?
«Nous avons eu la chance de tomber sur des professeurs qui ont des connaissances sur le sujet et même quand ce n’était pas le cas, le professeur acceptait de coopérer et d’appliquer certaines techniques pour aider Thierry à se maîtriser et a mieux interagir en classe. Même si ce n’est pas toujours évident pour un professeur de consacrer du temps à l’enfant en classe, mais Thierry a besoin de toutes ces routines.
«Ce que j’ai remarqué et que j’apprécie c’est le respect des autres enfants, certains outils utilisés avec Thierry sont même réclamés par les autres et deviennent populaires. Ça rend les choses plus amusantes. Même si le diagnostic de Thierry n’a pas encore été posé, ses symptômes sont similaires à ceux de l’hyperactivité.»
Quant à la question de la tolérance du corps enseignant de nos jours elle dit: «On demande trop aux enfants pour leur âge. Oui c’est exagéré, il m’arrive de recevoir des billets pour des petites histoires comme parler dans les corridors. Il est normal de garder le silence dans la bibliothèque, mais que ça parle un peu dans les corridors, ce n’est pas si grave, il y a beaucoup de rigidité.»
Pour finir, madame Voyer confie: «La vie de mon enfant s’est considérablement améliorée grâce à l’ergothérapie. Mais ce que je déplore ce sont les coûts de cet accompagnement qui me revient à 100$ par séance/semaine dont seulement 500 à 600$ sont remboursables par an. Nous avions essayé d’espacer les visites à deux fois par mois, mais les résultats n’étaient plus les mêmes, nous avons donc décidé de maintenir la fréquence.»
Thierry fait partie de ces enfants chez qui l’on a décelé de réelles difficultés que l’ergothérapie tente de soulager. Mais est-ce le cas de tous les enfants qui reçoivent des billets de leur professeur? Heureusement non.
Avis de la spécialiste
Sonya Coté est ergothérapeute depuis 1995 et elle a vu naître et grandir cette profession. Elle intervient aussi bien en cabinet que dans les milieux scolaires qui l’appellent pour former le personnel enseignant.
Sonia Coté explique les fondements de l’ergothérapie: «Certains détails qui semblent évidents pour tous ne le sont pas pour d’autres. Notre rôle est d’aider les gens à optimiser leurs capacités et à adapter l’environnement à leurs besoins.»
Elle explique qu’il faut consulter dès que les difficultés de l’enfant nuisent à son processus d’apprentissage. D’où les nombreux enfants qui lui sont référés après leur entrée à l’école. Même si d’après la spécialiste il existe des signes avant-coureurs tels que l’ambidextrie, apprendre à marcher en sautant l’étape des quatre pattes ou encore la tristesse chronique chez un petit, pour n’en citer que ceux-ci, qu’on a tendance à banaliser.
Sonya Coté relève: «On a beaucoup d’exigences comme société envers les enfants, mais ils doivent être selon leurs âges capables d’exécuter certaines tâches.» Elle explique que des difficultés, on en a tous à des degrés différents, tant que cela ne devient pas envahissant. Elle catégorise les enfants en 3 groupes, les très bons ou l’élite, ceux aux besoins particuliers (enfants suivis par des spécialistes), et les moyens, autant dire la majorité de la population.
En attendant, c’est sur les bourses des parents que les honoraires des ergothérapeutes pèsent. Mais Sonya Coté met sur la balance les études menées sur l’origine des troubles de santé mentale chez l’adulte qui seraient liés aux difficultés d’apprentissage dans le jeune âge. Elle ajoute que «les Québécois refusent de payer pour des services, ce qui serait compréhensible puisque les services de santé sont gratuits au Québec. Pourquoi l’ergothérapie ne le serait pas? Si cela peut aider des enfants à surmonter leurs difficultés d’apprentissage.
La professionnelle ajoute que certains parents sont dans le déni des problèmes dont souffrent leurs progénitures tandis que d’autres sont trop exigeants et placent la barre trop haut. Mais reste que les parents demeurent incontestablement les meilleurs juges et les professionnels de leurs enfants, sur qui repose bien souvent la responsabilité de conduire leurs petits au meilleur de leur potentiel.
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