Phénomène d’ampleur planétaire dans le monde des jeux vidéo, les sports électroniques attirent des foules se chiffrant en millions de personnes. Entrevue avec les responsables de Meltdown Montréal, succursale de la chaîne française de bars spécialisés dans le esport, quelques jours avant la grande ouverture.
À LIRE ÉGALEMENT : LvlOp, un restobar esports, ouvrira ses portes à Québec
Dans le petit local situé rue Saint-Denis, au cœur du Quartier latin, l’équipe a encore beaucoup de travail devant elle avant l’inauguration du premier Meltdown en Amérique du Nord. Le bar est fonctionnel, oui, mais il reste à installer les derniers écrans et les postes informatiques, monter certaines tables et donner un grand coup de balai avant l’ouverture des portes prévue le 30 juillet.
Malgré tout, on voit déjà clairement les touches apportées pour donner une ambiance «jeux vidéo» à l’endroit. La porte d’entrée est directement inspirée des portes bloquant les zones sécurisées dans Left 4 Dead, et les tables reposent sur les célèbres barils explosifs de couleur rouge que l’on retrouve dans quantité de jeux, dont Half-Life 2.
Révolution ludique?
L’idée est simple : sortir les amateurs d’esports de chez eux et les rassembler au Meltdown, un verre à la main, pour leur permettre de socialiser.
L’idée est simple : sortir les amateurs d’esports de chez eux et les rassembler au Meltdown, un verre à la main, pour leur permettre de socialiser. À l’image d’un bar sportif, donc, mais adapté à une transformation de l’univers des loisirs pour adultes enclenchée depuis plusieurs années. D’ailleurs, le Meltdown est situé tout juste à côté d’Arcade MTL, un autre établissement offrant une combinaison jeux vidéo et alcool, mais rétro, cette fois, avec des jeux des années 1980 et 1990. Et une porte plus à gauche, c’est plutôt le Randolph Pub Ludique qui propose dés, figurines et cartes à jouer.
«On est convaincus que les personnes bien équilibrées sont des personnes qui savent aussi jouer et se détendre», lance Roch Turgeon, à la tête du Meltdown Montréal. «Même avec l’Internet, on pense être connectés, mais ça ne remplacera probablement jamais le contact humain. Je pense que ça prend des endroits où partager ses joies, ses peines, ses ambitions avec de véritables personnes, pas uniquement en ligne.»
«Les gens d’Arcade MTL sont nos amis; on a des intérêts communs, c’est assez évident, et nous on vient compléter un peu leur offre. Idem avec le Randolph. Il faut voir ça comme un écosystème : chacun a sa fonction.»
«Il y a de plus en plus de lieux qui vont se retrouver comme ça», croit pour sa part Pierre Violleau, dépêché par la maison-mère, en France, pour voir au bon fonctionnement de la succursale montréalaise. «Alors qu’avant les jeux vidéo, c’était mal vu, cette conception change petit à petit. Arcade MTL y va avec le rétro, pour retrouver des souvenirs d’enfance. La franchise Meltdown, elle, est partie sur l’avenir du jeu vidéo, qui est la compétition. Des jeux qui sont récents, qui sont pour la plupart gratuits, et qui offrent parfois la possibilité d’en vivre.»
Outre la diffusion de compétitions de esports, de Counter-Strike : Global Offensive, DOTA 2 et autres League of Legends, le bar permettra aussi d’essayer une poignée de titres sur ordinateur, ainsi que de rencontrer des grands noms du milieu, précise Violleau.
Montréal, ville phare
Pourquoi s’installer à Montréal? «Parce que c’est la capitale officielle, sinon officieuse du jeu vidéo», clame Roch Turgeon, qui évoque la pléthore de studios de développement de jeux, petits et grands, ainsi que la vivacité de la scène esport dans la métropole québécoise. L’endroit serait tout trouvé, croit-il, pour prendre pied sur le Nouveau-Continent après un succès important en Europe. Montréal ne serait aussi qu’une étape avant la multiplication des succursales ailleurs au pays et aux États-Unis. Québec et Toronto font partie des villes qui devraient avoir leur Meltdown prochainement, mentionne-t-on en entrevue.
Craint-on que le Meltdown Montréal peine à attirer une clientèle féminine? Après tout, les joueuses ont beau former environ la moitié du bassin d’amateurs de jeux vidéo, la scène esport demeure quasi totalement masculine. L’an dernier, la championne mondiale de CS:GO, Stéphanie Harvey, parlait d’un taux de femmes de moins de 1% dans le milieu.
«C’est très difficile pour les femmes sur Internet», rappelle Jacob Young, un autre responsable du Meltdown. «Mais dans un bar, tu es face à face avec les autres personnes. Je pense donc que ce sera plus simple pour une femme d’entrer ici plutôt que de se connecter à une partie en ligne, où les commentaires désobligeants fusent souvent très rapidement.»
«Il est sûr que nous pensons que les hommes seront d’abord plus nombreux que les femmes, mais nous espérons que cela changera avec le temps.»
Pierre Violleau souligne pour sa part l’intention du Meltdown Montréal de collaborer avec des associations de joueuses, dont Girls on Games, «histoire de montrer que c’est pas parce que t’es une fille que t’es moins douée que les autres».