Face aux dangers, notre comportement s’adapte. C’est un nouveau lien, passionnant, entre le système immunitaire et le comportement social ou plus largement les fonctions cérébrales sociales qui vient d’être découvert par ces scientifiques de l’Université du Massachusetts. Une voie de signalisation commune qui suggère que notre comportement aurait pu évoluer en fonction des réponses de notre système immunitaire aux pathogènes…Ainsi, ces scientifiques décryptent, dans la revue Nature, comment les lymphocytes T, impliqués dans l’immunité cellulaire, jouent un rôle central dans le développement social. Des implications primordiales pour les maladies neurologiques telles que les troubles du spectre autistique et la schizophrénie.
Les scientifiques du Massachusetts démontrent, grâce à une nouvelle plate-forme d’analyse en biologie, que la signalisation du système immunitaire peut affecter directement, et même modifier le comportement social chez les souris et d’autres animaux. Ils identifient, en particulier, le rôle d’une cytokine importante sécrétée par les lymphocytes T, l’interféron gamma (IFN-γ), dans la promotion de fonctions cérébrales sociales. Des résultats qui selon l’auteur principal, le Dr Vladimir Litvak, contribuent à une meilleure compréhension du dysfonctionnement social dans les troubles neurologiques.
L’équipe constate sur différents organismes et modèles animaux que,
· la signalisation de cette cytokine IFN-γs’élève dans des contextes sociaux ;
· a contrario, bloquer l’expression d’IFN-γdans les cerveaux de souris déclenche un comportement hyperactif et social atypique ;
· restaurer l’IFN-γnormalise à nouveau l’activité cérébrale et le comportement social.
Quelle explication ? Ces résultats suggèrent que la voie de signalisation de l’IFN-γ pourrait être impliquée à la fois dans la réponse immunitaire anti-pathogène et dans le comportement social suggérant une co-évolution de ces deux fonctions : on pensait que le cerveau et le système immunitaire avaient été conçus de manière isolée l’un de l’autre, et toute activité immunitaire dans le cerveau était perçue comme le signe d’une pathologie. Cette étude suggère que ces 2 systèmes sont en relation étroite et que certaines caractéristiques de notre comportement ont pu évoluer en fonction de notre réponse immunitaire aux agents pathogènes, ou de notre "histoire immunitaire".
Le dysfonctionnement du système immunitaire peut être responsable de déficits sociaux dans de nombreux troubles neurologiques et psychiatriques, suggère aussi cette étude, en raison de ce » partage » d’une vie de signalisation commune. Mais identifier les implications précises pour l’autisme et d’autres troubles neurologiques nécessitera d’autres études. Cependant la plate-forme technique permettant ces recherches sur les liens complexes entre signalisation immunitaire et fonctions cérébrales existe désormais, et va permettre de mieux cerner les différents facteurs immunitaires impliqués dans les dysfonctionnements du cerveau.
Source: Nature 13 July 2016 doi:10.1038/nature18626 Unexpected role of interferon-γ in regulating neuronal connectivity and social behaviour
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