A l'heure de sa mort,Et après avoir récité le confiteor,Un meunier légua à ses enfants :-Son moulinPour Célestin,-Son âneÀ DianeEt son chatonÀ Anton.Ce dernier se dit : " Les deux ainésPourront gagner leur vie mais moi,Pauvre Anton, une foisLe chat mangé,Ma vie sera finie. "Alors, le chat lui réponditDu tac au tac :-" Mon maître, vous m'êtes agréable.Donnez-moi un cordon, un sacEt des bottes imperméables.Vous allez voir la scène !Je vais aller dans la garenneLà-bas, y a pleins d'lapins.Et je vais en attraper un. "Chat Botté met une carotteDans son piège. Deux minutes après,Un lapin gourmetPasse, entre dans le sacEt ...grignote.Le Chat-chasseurTire alors sur le lacsEt ligoteL'animal rongeur.Tout fier, Chat Botté débarqueAu château du monarque.Il lui fait grande révérenceEt dit : " Excellence,Voici un lapin exquisQue monsieur le marquisAnton, mon maître,M'a chargé de vous remettre. "-" Tu le saluerasEt le remercieras. "Le jour suivant, d'emblée,Chat Botté pose le sacEmpli de grains de bléAu milieu d'un champ. Et clac !Le mistigriPrend deux perdrix.Et va vite les apporter au roi.Sachant qu'à chaque fois,Il va recevoirUn bon pourboire,Le Chat, assez vénal,Décide de livrer au palais royalTous les gibiers qu'il aura attrapés.Il apprend un matinQue, le lendemain,Le roi et sa fille vont se promenerLe long de la rivière.Aussitôt, notre compère,Ce chat profiteur et manipulateurVa dire à Anton : -" Demain, allez nagerDans la rivière, et peut-êtreVotre fortune sera faite.Si oui, nous ferons la fête ! " Cet ordre parait inouïÀ Anton, mais il obéitEt sans rechignerAccepte d'aller se baigner.Le lendemain, Anton et le chatSont sur placeQuand passentEn grand arroiLa princesse et le roi.Alors, Chat Botté hurla :" Regardez, mon maître Anton se noie !Au secours ! " Le roi,Ayant reconnuLe Chat, ordonna à ses gens :-" Allez vite, c'est urgent !Sauvez le marquis du courant. "Alors, le Chat accourutAuprès du roi et lui dit:" Sire, des banditsViennent subrepticementDe voler les vêtementsDe mon maître ! "En fait,Le Chat Botté venaitDe les faire disparaîtreEt les avaient cachés dans un boqueteau.Le roi ordonna aussitôtD'aller quérir un bel habitPour monsieur le marquis.La fille du roi trouva Anton à son goût.Elle le trouva beau, doux,Et bien fait. En un mot : rare.De son côté,Anton lui jetaitDes regardsSi respectueux,Et si affectueuxQu'elle en devint immédiatement.Amoureuse. Le roi, lui aussi conquis,Pria le marquisDe venir discuterEn ses appartements.Plus tard, Chat botté considéraitUn paysan qui fauchait son vaste pré.Il lui dit : -" Je viens de voir le Roi.Il se dirige vers toi.S'il te demande à quiAppartient ta prairie,Réponds-lui :''Majesté, à monsieur le marquis''. "La tête couronnée logea le pré en effetEt posa au paysan la question.Le soir-même, le Roi félicitait Anton :"Vous avez là une magnifique propriété. "-"Sire, elle a l'avantage de me rapporterAbondammentTous les ans."Plus loin, Chat botté a côtoyéUne vaste étendue de blé.Il vint dire aux moissonneurs : -" Tout à l'heure,Vous allez voir le Roi, dites-luiQue ces champs et la moissonSont la propriété du marquis. "Le lendemain le Roi félicitait Anton.Le troisième jour, enfin,Vers dix heures du matin,Le Chat BottéEntraitDans un superbe château,Bordé d'une grande pièce d'eau,Propriété d'un magicienCélèbre et fort aisé.Les terres que le roi avait traverséesDépendaient de ce château.Chat Botté, aussitôt,Demanda à être reçuPar ce châtelain si cossu :-" On m'a dit, est-ce faux,Que vous savez sans bougerVous changerEn toutes sortes d'animaux,En lion, en éléphant... ?"L'air triomphant,Le magicien répondit: " C'est vrai.Regardez-moi de près ;En voici la justification,Ne suis-je pas devenu un lion ? "-" Avez-vous le pouvoir aussiDe vous transformer ainsiEn petits animaux : souris, rats... ?Personne ne le croira !C'est impossible ! "Le magicien reprit : " Impossible ?Voici : je me change en souris. "Chat Botté souritEt se jette en un temps recordSur la bestiole grise...puis la dévore !Sur ces entrefaites,Le roi arrive en têteDe son cortège,Tenant à son bras, la princesse.Le chat, en fin stratège,Les accueille : -" Que votre AltesseNous fasse la grâce d'entrerChez monsieur le marquis. "En leur honneur, fut serviUn délicieux banquet.Le roi sortit de table enchanté.Et comme il avait été aussi épatéPar toutes les propriétésEt les qualitésD'Anton, il lui proposaSans plus attendre,De devenir son gendre.Anton accepta.Le Chat devint un grand notable.Mais ne fut jamais plus capableDe courir après les sourisOu de manger des rats, même petits !