Basée à Londres, l'entreprise a discrètement passé les deux dernières années à concevoir, développer et mettre au point sa solution en partant d'une feuille blanche, avec une équipe de 50 personnes menée par des anciens de Google. Révélé depuis peu, le résultat ne peut donc qu'attirer l'attention. Il se présente comme un « système d'exploitation » bancaire particulièrement riche et robuste, et dont la flexibilité et la capacité d'évolution doivent lui permettre de supporter tous les défis futurs.
Sur le plan purement technique, d'abord, Vault OS est (évidemment) hébergé dans les « nuages » (informatiques), ce qui lui permet de garantir une montée en charge linéaire et transparente – notamment pour supporter une croissance rapide, de quelques clients à plusieurs millions – sans jamais avoir à se préoccuper des questions sur l'infrastructure – de son coût (d'investissement), de sa maintenance, de l'anticipation des besoins (pour répondre à des pics d'activité qui ont une faible probabilité de se produire)…
Je serai plus réservé sur les prétentions d'utilisation de blockchain et de contrats intelligents (« smart contracts »), qui paraissent surtout tenir d'une stratégie de communication. Il n'est cependant pas exclu que ces concepts apportent tout de même une valeur différenciante, si, par exemple, ils sont mis à profit pour améliorer la transparence et le partage de l'information ou en vue de faciliter la création de nouveaux produits bancaires grâce à un langage spécialisé (une idée qui fait par ailleurs l'objet d'une initiative indépendante, récemment expérimentée par State Street).
Dans un registre plus proche du métier, la plate-forme est prête à prendre en charge tous les produits traditionnels – compte courant ou d'épargne, carte de crédit, prêt hypothécaire… – et ceux que ses utilisateurs imagineront, dont l'éditeur promet que la mise en œuvre et le déploiement pourront se faire en quelques jours. Détail important, les exigences réglementaires sont intégrées nativement, à travers, entre autres, la production de rapports de gestion des risques ou de conformité aux seuils de capital bâlois.
En attendant l'invention de nouveaux produits, Vault OS comprend déjà un certain nombre de fonctions avancées. La catégorisation automatique des transactions – douée de capacités d'auto-apprentissage – permet à la banque non seulement de fournir au client final une vue différente de ses finances mais également de connaître son comportement, de manière à lui offrir une relation réellement personnalisée. Cette faculté sera encore renforcée par la possibilité d'agréger simplement des comptes existants.
Enfin, tous les services sont accessibles sous forme d'API (interfaces de programmation applicative), afin d'en faciliter l'exploitation aussi bien par les équipes (internes) chargées de réaliser les applications destinées aux conseillers ou aux clients que par les développeurs externes et autres partenaires auprès de qui elles peuvent être aisément mises à disposition, dans une logique d'innovation ouverte.
En synthèse, Vault OS représente ce que pourrait être, au moins dans son cœur, la banque Google qui fait l'objet de tellement de fantasmes. De ce point de vue, elle ne déçoit pas, ne serait-ce que par ses principes fondamentaux (cloud, API, extensibilité…), dont il ne reste qu'à voir la concrétisation. Le plus difficile pour Thought Machine sera toutefois de conquérir des clients, en dehors, peut-être, de la génération montante des néo-banques : les établissements qui n'ont pas encore osé moderniser leurs systèmes historiques n'auront sans doute pas le courage de s'engager dans une telle révolution !