Le ministre de l’Economie et des Finances, Emmanuel Macron I AFP
Emmanuel Macron, seulement 38 ans, électrise autant ses admirateurs que ses détracteurs. L’homme annoncerait sa démission mardi soir, lors du rassemblement de son mouvement En marche ! à la Mutualité. "On est à un moment de la vie gouvernementale qui est intense, brutal, confie le ministre de l’Économie. Prendre ses responsabilités, c’est défendre à plein les mesures qui sont prises et ne pas mettre de désordre additionnel. Mais je ne veux pas quitter le bateau à un moment où c’est difficile !"Peut-être, peut-être pas"Son poste, ajoute un collaborateur témoin de sa loyauté envers François Hollande, il sait à qui il le doit. Leur relation est solide". Quant aux "chicanes" avec ses voisins de Bercy, elles ne seraient que bassesses anecdotiques... L’essentiel, pour l’homme, c’est sa démarche et pour l’heure un test autant qu’un projet : "Peut-être que ça ne marchera pas. Peut-être que je suis un doux idéaliste." Cette volonté de construire un militantisme politique, François Hollande ne la voit pas comme une concurrence : "Il faut des civils pour faire des militaires, glisse le Président. Il peut être utile à la gauche du gouvernement". "Je suis toujours de gauche, précise d’ailleurs Emmanuel Macron. Je ne suis pas dans le ni-ni dans lequel on a voulu m’enfermer. Mais je pense qu’on peut être dans le dépassement des clivages pour rassembler". Parce que c’est de ces clivages que naît "l’épuisement démocratique".Le piège de la primaireTelles qu’elles s’organisent, les primaires, de droite et de gauche, ne rassurent pas l'actuel ministre : "Elles sont le résultat d’un système partitaire fatigué qui veut survivre. La primaire est une tauromachie politico-médiatique qui, soit tire vers l’extrême de son camp, soit conduit à des compromis qui amoindrissent la lisibilité de votre programme". Et donc, si vous gagnez, "vous gouvernez de manière radicalement différente du discours que vous avez tenu". L'homme ajoute : "Ma priorité, ce sont les lignes de forces qu’il y a dans le pays". Pour éviter d’avoir à trahir sa parole à chaque tour électoral, Emmanuel Macron veut vérifier qu’il existe une possibilité de "rassembler les progressistes de gauche et de droite" sur quelques "grands sujets qui structurent la société et ne sont pas ceux des partis" : l’Europe, le travail, la gestion des solidarités, les inégalités, la sécurité et les libertés, l’identité.Renouveler l’offreD’abord, M. Macron veut établir un diagnostic. Ce sera chose faite fin août, avec des universitaires, avant de débattre. "Les politiques sont comme des super Dr Diafoirus qui administrent des potions à quelqu’un à qui on n’explique pas ce qu’il a. Ça fait trente ans qu’on vous en donne, mais reprenez donc deux cachets, vous allez voir !" Pour lui, la loi Travail, c’est ça : une thérapie incomprise faute de diagnostic partagé. À partir de cet état des lieux, étendu à tous les domaines, à partir de la confrontation entre son offre politique et les maux du pays, il espère créer du consensus. "Je veux structurer le mouvement et articuler une vision et un plan de transformation". À supposer que ça fonctionne, la grande question, c’est de savoir quand Emmanuel Macron franchirait le Rubicon. "Il ne plantera pas de couteau dans le dos du Président", assure une collaboratrice.Deux préalablesIl n’est qu’une hypothèse soumise à deux préalables : François Hollande sera-t-il en mesure de se représenter avec quelque chance de succès ? L’élan auquel croit Emmanuel Macron sera-t-il assez puissant pour créer un mouvement irréversible ? "Avant de savoir si on va concourir, confie encore l’intéressé, il faut être très clair sur l’offre politique. L’électorat, vous le construisez dans le temps de ce débat démocratique. On va entrer dans la phase des travaux pratiques, structurer des ralliements, essayer d’agréger les mouvements citoyens…" Mardi soir, devant une partie de ses 55 000 adhérents et de ses 16 000 marcheurs, lancés dans un porte-à-porte national, il dira tout cela, esquissera sa méthode et son calendrier : "Il s’agit de donner du fond, du contenu, de l’élan, ni plus ni moins. J’expliquerai la démarche comment rénover les termes de l’engagement politique, comment on compte scander les prochaines étapes". Deux jours avant l’intervention présidentielle du 14-Juillet… JB-M