Non non, ne vous inquiétez pas pour moi. Vous avez bien lu ce que vous avez lu. Ce n'est pas parce qu'il fait beau que la chaleur m'est montée ŕ la tęte. Je n'ai pas fumé la moquette non plus (d'ailleurs, chez moi, y en a pas. Faut dire qu'ŕ Lomme, avec toute la poussičre qui rentre ŕ l'intérieur des logements dčs qu'on ouvre la fenętre, ce serait une vraie galčre !) Et je n'ai pas non plus la prétention d'enflammer la toile.
En fait, c'est une histoire de pape et de tabac. Le pape, c'est Pie VI, celui de 1789, et de 1791 aussi, lorsque la Constitution civile du clergé lui resta en travers de la gorge. Alors, ici, ce n'est pas son action en tant que pape qui m'intéresse, ni la recette de la fabrication de la fumée blanche qui l'avait désigné comme tel.
Quand on lit des Mémoires rédigés par des contemporains, on trouve parfois des petites perles sur la vie privée des gens, qui les font un peu redescendre de leur piédestal et qui nous montrent par exemple que les papes, bien que les représentants, principaux lieutenants, etc de Dieu sur terre, ont aussi leurs côtés humains.
En l'occurrence, celui qui a vendu la mčche, c'est Gouverneur Morris, un Américain ŕ Paris sous la Révolution. Il a laissé une trace écrite de son séjour en France ces années-lŕ, et on trouve ŕ la date du 16 novembre 1789, l'allusion suivante : "Le pape s'est querellé avec les fermiers généraux au sujet de la fourniture du tabac qu'il leur prenait précédemment ; il le prend maintenant en Allemagne ; on pourrait peut-ętre s'entendre pour fournir Sa Sainteté en Amérique..."
Ou comment de petites habitudes personnelles peuvent filtrer et ętre portées ŕ notre connaissance. Une connaissance qui s'enrichit également des informations révélées par ces textes. Quelques exemples ici :
- les fermiers généraux, administration privée chargée de percevoir les impôts en France et qui en gardait une partie dans sa poche. Impôts directs ou indirects comme dans le cas du tabac.
- pour le pape le tabac n'a pas d'odeur : il pourrait venir d'Allemagne ou d'Amérique protestante !
- et enfin, "sacrés" américains, business is business, ils ne perdent jamais le Nord. Si le pape a besoin d'aide et qu'on peut l'aider, d'oů vient le mal ? Surtout si ça rapporte de l'argent !