[Portrait d’innovateur] Patrycja Wizińska-Socha s'attaque à la grossesse par télémédecine

Publié le 06 juillet 2016 par Pnordey @latelier

La créatrice de Pregnabit, une solution télémédicale qui permet aux parents de suivre facilement l’état de santé du fœtus pendant la grossesse, a été désignée Innovateur de l’année 2016 lors de MIT TR35 de Pologne.

Un innovateur ?

Pour Patrycja Wizińska-Socha, comme souvent pour les innovateurs qui se lancent dans une aventure médicale, c’est une histoire très intime qui l’a lancé : « Il y a six ans, j’ai été le témoin de la tragique histoire de ma voisine enceinte, qui a perdu son bébé à quelques jours du terme. Ça a changé ma vie. Je me suis rendu compte que c’était un problème plus répandu que l’on croit, et qu’il était important de faire quelque chose. »

Patrycja, qui a fait des études en biotechnologie et un doctorat de médecine, avait déjà une fibre engagée : « J’ai choisi de faire un doctorat parce que je pensais que je pouvais participer à la lutte contre le cancer. » En 2010, elle commence à travailler sur ce qui deviendra Pregnabit. L’idée est simple : rendre la télémédecine plus accessible aux femmes enceintes, en particulier pendant le 3e trimestre de la grossesse.

Une innovation ?

L’innovation tient dans une petite sacoche violette : un boîtier électronique connecté à trois senseurs — un pour mesurer le pouls de la mère, un pour le rythme cardiaque du bébé et un pour les contractions utérines. L’équipement, remis par médecins et sage-femmes aux futurs parents, permet de faire soi-même, à la maison et en 30 minutes, l’examen cardiotocographique du fœtus. Les résultats sont envoyés directement à une équipe de médecins disponibles 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, afin d’apporter une réponse médicale dans les 15 minutes qui suivent le test, et un meilleur suivi en cas d’anomalie.

Six ans après avoir eu sa grande idée, Patrycja Wizińska-Socha est aujourd’hui forte d’une équipe d’une dizaine de personnes, aux profils et compétences très différents : « Cette solution est complexe, c’est donc très important d’avoir des gens aux talents différents, que ce soit en technique, électronique, médecine, commercial, etc. »

On sent que c’est également important à titre personnel, pour elle qui se définit comme une « obsessionnelle de l’apprentissage » : « au début je ne connaissais rien à certains sujets comme le marketing, et je veux apprendre toutes ces nouvelles choses. » Sur la scène du Warsaw Spire, au moment de recevoir la mention d’Innovatrice de l’année, elle remercie d’abord cette équipe qui lui apprend tant. « Aucun succès n’est possible sans une excellente équipe. Je pense que j’en ai une. Sans eux, je ne serais pas ici. Nous avons tous décidé de faire quelque chose qui a du sens. » Aujourd’hui, Patrycja Wizińska-Socha espère que sa distinction comme Innovatrice de l’année lui ouvrira d’autres portes, en particulier à l’étranger.

Pourquoi cela est impactant ?

Quand on lui demande quels sont les principaux défis qu’elle rencontre, elle cite en premier les mentalités : « Beaucoup de gens ne savent pas que les solutions télémédicales sont utiles et sûres. J’espère que mon prix contribuera à changer cet état d’esprit, y compris au sein des équipes médicales. La télémédecine est une solution que les professionnels de santé peuvent utiliser pour améliorer les soins qu’ils apportent aux patients. Nous voulons travailler avec eux, nous n’avons pas l’intention de les remplacer ! » Sous ses airs discrets, on sent poindre la détermination et l’ambition : « Notre mission est d’amener toutes les grossesses à un terme heureux. Je crois sincèrement que nous pouvons le faire. Nous voulons améliorer les soins médicaux pour les femmes enceintes partout dans le monde, y compris là où ces soins ne sont pas encore disponibles. » Pregnabit, qui sera commercialisé au cours de cette année, s’apprête à conquérir le monde.

Et la suite ?

Elle aimerait aussi que la visibilité ainsi acquise pousse le gouvernement polonais à changer le cadre législatif, encore trop contraignant pour son innovation. Et puis, comme beaucoup de startupers, Patrycja est à la recherche d’investisseurs et de collaborateurs, et elle compte bien sur la communauté des Innovateurs de moins de 35 ans pour l’aider à rencontrer les bonnes personnes pour distribuer sa solution partout dans le monde.

Par Philothée Gaymard.