Salut Kebba, commençons simplement. Peux-tu te présenter et nous parler de ton parcours ?
Salut, pour commencer merci pour l’entrevue.
Me présenter… Bah je viens de Paris, je suis sorti des Gobelins (en graphisme) il y a bientôt 11 ans maintenant. DA free-lance depuis 7 ans, je me suis lancé dans l’illustration plus sérieusement il y a de cela 1 an.
Comment en es-tu venu à l’illustration ?
J’imagine un peu comme la plupart des gribouilleurs, je tâte le crayon depuis que je suis minot. Je remplissais les marges de mes cahiers en primaire, les nappes en papier au resto, n’importe quelle feuille volante prenait son coup de crayon. C’était une passion, pour le coup je n’ai jamais voulu en faire un taf, ça ne devait pas être un impératif. J’ai donc fait du graphisme.
L’illustration c’était du dilettantisme. Avec le temps c’était devenu un exutoire, l’humeur motivait le dessin. Et puis sur les conseils de potes j’ai fini par mettre des dessins en ligne pour qu’ils cessent de pourrir dans un fichier au fin fond de mon ordi. De là, il y eu quelques contacts puis quelques commandes.
Tu es donc graphiste de métier et illustrateur, comment partages-tu ton temps entre les commandes et ton désir de création ?
Je t’avouerais que le désir de création est inhérent à la commande. L’illustration est une activité professionnelle récente, du coup chaque commande est un kiffe quelque soit le sujet. L’illustration s’imbrique dans mon emploi du temps au même titre qu’une mission de DA. Jusqu’à maintenant je n’ai pas eu de choix à faire. Je me rends compte quand même que l’illustration prend de plus en plus de place.
J’arrive par ailleurs à dégager du temps pour faire des projets perso, libre de toutes thématiques ou impératifs de temps.
Tu as un style très particulier, comment le décrirais-tu ?
Bah je saurais pas trop te dire. C’est un gros fourre-tout de thème et de style quand tu vois mon site.
Mais en ce moment c’est vrai qu’il y a un style qui se distingue un peu. Techniquement ça pourrait se rapprocher du pointillisme, majoritairement en bichromie en travaillant forme ou contreforme. Je ne suis pas quelqu’un de sombre mais mon univers, ces temps-ci, l’est un peu. J’aime le clair-obscur, le Caravagisme, une lumière crue, directe isolant le sujet voire ne laissant apparaître qu’une petite partie. Il y a parfois une touche de surRéalisme.
Comment en es-tu venu à ce type d’exercice, de pratique ?
En 2012, j’ai fait une expo avec un pote, on a adoré. Ca a été un vrai challenge, nos travaux n’ont rien à voir mais on a été moteurs l’un pour l’autre, j’en ai un bon souvenir. Il fallait, à l’occasion de l’exposition, que j’harmonise l’exécution de mes illustrations, je pense que c’est à ce moment que j’ai affiné mon style, que j’ai essayé de donner une identité à mes dessins.
J’imagine qu’il y a un tas d’illustrateurs qui t’inspirent, ou plus simplement que tu admires. Peux-tu nous donner quelques noms ?
Mon gars sûr, Bleu Miel, avec qui on échange beaucoup. Pour les classiques, il y a les Caravagesques, Delatour, Manfredi, Van Honthorst, Puis les Gustave Doré, Dürer… Pour les contemporains il y a Randy Ortiz que j’apprécie beaucoup, Sam Wolfe Connelly, Moebus, Nicolas Delort, Tom Haugomat, les CRCR, Violaine et Jérémy, Aryz et ses formats gigantesques. Il y a aussi le collage comme Matthieu Bourrel ou cette ouf de Lola Dupré, une tueuse. Les couleurs de la photographe Mária Švarbová. Et plein plein d’autres, j’ai des goûts plutôt larges.
Dans les séries d’illustrations que l’on peut retrouver sur ton portfolio, il y a beaucoup de travaux en noir et blanc, ou avec uniquement 2 tons de couleurs. Pourquoi cette volonté de rester dans la sobriété ?
J’ai toujours défoncé le noir avant toutes les autres couleurs dans mes boîtes de crayons. J’aime la couleur mais c’est pas ce que je gère le mieux alors pour l’instant je m’y risque pas trop. C’est vrai que question couleur je suis plutôt minimaliste, je n’y trouve pas d’explications particulières… Si ce n’est le goût.
Tu as réalisé notre nouvelle couv’ Union Street, on est pour le coup sur quelque chose de beaucoup plus coloré ? Pourquoi ce choix ?
C’était le moment de sortir de ma zone de confort tout en me faisant plaisir et tenter quelque chose de nouveau, Union Street a été mon cobaye. Je voulais pas traduire l’esprit urbain en bichromie, ça ne devait pas être visuellement sombre. Non, ça devait être chaleureux, un peu comme un « do the right thing », d’où la couleur.
Le truc avec cette jungle, c’est que j’ai apprécié la mise en couleur, du coup, peut-être que grâce à vous il y en aura plus dans mes illustrations à venir.
Comment t’es venu l’idée de cette jungle ? de ce personnage ?
Votre baseline, c’est « la rue dans tes dents, la rue autrement ». Je l’ai pris au premier degré, il y a ce côté brut et sauvage. La rue c’est la définition même de l’entropie, c’est une jungle. Et l’homme y est menaçant avec sa batte bien à sa place au milieu d’autres prédateurs.
Enfin, il me semble que tu fais partie d’un collectif au nom des plus sympathiques. Peux-tu nous en dire plus ?
Haha… Ha ouais t’es bien renseigné, en effet, collectif c’est bien ça, ça nous donne de la contenance. On est 6/7 gars, des trentenaires qui s’étaient regroupés pour s’imposer des rdv dessins, et se motiver les uns les autres.
On a appelé ce ramassis de génies, Kapovskii. On se fait des sessions aux petits oignons. Ça dessine des bites et des loches en buvant de la bière, en refaisant le monde… Un petit coin de paradis, en somme. Et parfois, on pond des choses bien cool, on est très différents les uns des autres, du coup ce qui naît de notre collab’ est… intéressant. Le dessin n’appartient à personne, chacun peut partir de l’illustration d’un autre.
Ce qui se passe dans une Kapov reste (heureusement) dans une Kapov.
Sauf pour les commandes… Bien évidemment !
Pourquoi ce nom ?
On cherchait un nom, on n’avait pas d’idée, un pote portait la veille un t-shirt avec Kelly Kapovskii dessus… done!
Je voudrais rajouter (ça c’est mon côté mielleux) que je ne serais pas là à présenter mes gribouillis si ces potes ou ma sœur ne m’avaient pas dit d’en faire quelque chose. Alors merci à ces emmerdeurs !
Merci à toi d’avoir refait notre facade !
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