Logo de l'organisation
Depuis 2010, un certain nombre d'organismes issus des peuples originaires, rejoints par différentes organisations révolutionnaires, proposent l'Autre Bicentenaire, celui qui dénonce la constitution à partir de la Révolution du Mai d'un "Etat génocidaire et répressif" qui a pris la succession d'une colonisation que les habitants précolombiens ont toujours rejetée et combattue, comme en témoignent plusieurs des contes animaliers que j'ai publiés aux Editions du Jasmin, il y a un an (voir mon article du 21 mai 2015).Cette semaine, cette confédération contestataire appelle à une manifestation dans les rues de Buenos Aires sur le thème : "Nous n'avons rien à fêter. Résistance indigène depuis 524 ans". Les manifestants appelleront à rendre justice pour le meurtre le 12 octobre 2009 (1) d'un militant diaguita de la province de Tucumán, Javier Chocobar, pour lequel les enquêtes n'ont toujours rien donné.
Aujourd'hui l'organisation manifeste à Tucumán, à 18h30, puis les 6 et 7 juillet, elle viendra tenir à Buenos Aires le deuxième Parlement des Peuples et Nations originaires.
Parmi les quatre grands quotidiens nationaux argentins, seul Página/12 en parle dans son édition de ce matin.
En 1816, plusieurs importants acteurs de la Révolution de Mai et de la guerre d'indépendance, au premier rang desquels il faut nommer les deux pères de la Patrie, les généraux José de San Martín (1778-1850) et Manuel Belgrano (1770-1820), militaient pour la création d'une monarchie parlementaire en Argentine, avec à sa tête un roi choisi parmi les descendants de l'Inca, Tupac Amaru. Cette idée avait été reçue avec enthousiasme par les populations amérindiennes, notamment dans le nord-ouest où se trouve Tucumán, mais le parti qui dominant alors Buenos Aires, le courant socialement le plus conservateur, animé par Bernardino Rivadavia, leader du futur parti unitaire (1780-1845), convainquit une majorité de députés constituants de ne pas écouter ces sornettes qui risquaient de déconsidérer le pays aux yeux des Européens, en mettant à sa tête un va-nu-pied à la peau trop colorée (2). Cette solution aurait peut-être permis de réconcilier le processus historique de toute l'Amérique du Sud. Elle avait été émise pour la première fois par Francisco de Miranda (1750-1816), le Précurseur de l'indépendance du continent, formé par les Lumières en Europe et singulièrement en France, dont nous commémorons ce mois-ci les deux cents ans de la mort, dans un donjon d'une forteresse gaditane, comme rebelle au roi d'Espagne.
Pour aller plus loin : lire l'article de Página/12 d'aujourd'hui lire l'article de Página/12 le 25 mai 2010 consulter le blog de El otro bicentenario, à travers lequel vous pouvez accéder au canal vidéo que l'organisation a monté sur Vimeo.
(1) Il se trouve que le 12 octobre n'est pas n'importe quel jour : c'est l'anniversaire de la découverte du Nouveau Monde par Christophe Colomb et un jour qui célèbre l'unité de tout le monde hispanophone férié sur toute la planète pour l'Espagne et ses anciennes colonies. (2) Ce qui revenait à agiter un véritable fantasme comme on l'a vu faire tout récemment en Grande-Bretagne par les partisans du Brexit au sujet de l'Union Européenne. En fait, les descendants de l'Inca avaient tous le rang de nobles titrés de Castille dans l'ensemble de l'empire espagnol et les hommes recevaient la meilleure éducation, la plupart servant comme officiers supérieurs dans l'armée royale. Cela avait été le cas de Tupac Amaru II, marquis de Oropesa (1738-1781), avant qu'il ne déclenche la dernière grande révolte armée à Tucumán en 1780 qui devait le conduire à une exécution épouvantable dans sa ville natale de Cusco, aujourd'hui au Pérou.