Zita – Щара
Du 12 juin au 2 octobre 2016, le Schaulager présente l’installation
« Zita – Щара » réalisée en étroite collaboration par Katharina Fritsch et Alexej Koschkarow.
Pièce de chambre de Katharina Fritsch et Alexej Koschkarow.
Les 2 artistes se sont rencontrés aux Beaux Arts de Dusseldorf.
Cette Pièce de chambre mise en scène dans trois petits espaces est constituée par des sculptures et des réalisations murales spécialement créées pour l’installation au Schaulager.
Katharina Fritsch et Alexej Koschkarow
Indépendantes et sans autre dessein que d’être elles-mêmes, les œuvres forment les unes avec les autres un tableau évocateur, plein de références culturelles et historiques
L’extension à travers trois pièces, de cette pièce de chambre, puise dans la pratique théâtrale. Les œuvres individuelles des 2 artistes interagissent entre elles et sont le fruit d’échanges intenses entre eux.
Aménagée comme une maison fermée, à l’exception d’une entrée étroite
sur la façade, elle se trouve au rez-de-chaussée du Schaulager.
Le visiteur est saisi d’emblée par le jaune vif et lumineux
des « Puppen » 2016 de Katharina Fritsch qui voisinent avec
le » Kalter Ofen » de Alexej Koschkarow.
Katharina Fritsch – Puppen 2016
C’est un groupe de trois figures féminines, 2 femmes,
l’une tenant un balai, ceint d’un tablier rouge,
l’autre tenant un torchon blanc, devant elles une petite fille
semblant jouer avec un ballon vert. Ce qui frappe c’est l’absence de visage.
C’est une scène intime de paysannes d’Europe de l’Est,
déconcertante par son côté artificielle.
Les proportions et les volumes ronds sont inspirés des figurines de crèche
fabriquées avec du papier maïs.
Katharina Fritsch, par une méthode complexe,
et selon sa précision habituelle, les a agrandies
pour les ramener avec leurs attributs, à évoquer
les sphères traditionnelles, campagnardes et domestiques.
Alexej Koschkarow, Kaler ofen 2016
De l’autre côté dans l’axe oblique, la sculpture en céramique d’Alexej Koschkarow, fait penser à nos kachelofen alsaciens. En y regardant de plus près, comme une illusion d’optique, le Kalten Ofen 2016, évoque à la fois un poêle à bois et une grenade dégoupillée. Par la porte ouverte du poêle , on aperçoit sous les bûches calcinées le scintillement d’un feu qui ne produit aucune chaleur, de même que les éclats de la grenade, pris dans une céramique glacée blanche, ne peuvent plus se disperser.
La gerbe de flamme est aussi stoppée dans son ascension. Le danger imminent semble écarté, la menace de guerre banalisée et finit par envahir l’univers domestique.
Dans la salle de gauche une porte mène dans le plus petit des cabinets, où est disposé au milieu, la sculpture de Katharina Fritsch « Sarg » – cercueil 2016 –
Telle une réalisation constructiviste, identifiée comme un objet ayant une fonction déterminée, elle est faite de formes, d’aplats, et de couleurs géométriques. Est-ce une araignée sur 8 pattes ou un joyau miroitant de ses faces bien polies ?
Bleu profond pour le coffre et orange vif pour le support, un fort contraste de couleurs,
sa surface mate ne présente aucun réfléchissement comme toutes les oeuvres de l’artiste.
Présentée sans cérémonie, avec dépouillement dans cette scène intimiste, le deuil, la veillée funèbre, semble être apaisement et consolation.
« Toutes mes oeuvres relèvent d’une ambiance » Katharina Fritsch
Katharina Fritsch, Sarg 2016
Dans la salle de droite de l’autre côté, changement de scène,
Alexej Koschkarow a conçu ici un épisode sombre.
Une maquette, sorte de Janus à double faces,
das Was keinen Namen hat
(ce qui n’a pas de nom) se compose d’éléments que tout dissocie.
Un puissant bunker avec meurtrières forme le bâtiment central,
dont l’ouverture suggère le gosier d’un cobra dressé.
Des conduits en spirale et 2 escaliers imbriqués, en font le corps.
Tout en haut des guerrières nues, athlétiques, aux traits masculins, caquées,
viennent couronner l’ensemble. Armées de bâtons et de boules, flanquées de chiens d’attaque, ses « pin-up » malgré tout hommasses, sont diamétralement opposées aux figurines en maïs de Katharina Fritsch, loin de l’image domestique et maternelle.
La face arrière du bunker est conçue comme la façade abstraite d’une maison aux éléments architecturaux disparates, arc de triomphe, escaliers, fortifications qui s’assemblent en un montage qui a sa charge symbolique.
Dans le Schtetl 2012, fabriqué à partir d’innombrables
morceaux de bois, qui formaient le plancher de son atelier
dans le quartier juif de Brooklyn, deux cercles de maisons
bordent une place centrale. Cela évoque le traditionnel
shtetl d’Europe de l’Est, habitation campagnarde,
établie depuis des siècles.
Ces communautés villageoises ont brusquement disparu
avec les atrocités de la deuxième guerre mondiale.
Longtemps représenté comme un mode de vie – idéalisé –
figuraient déjà en art et en littérature –
ici avec la hache surplombant le centre du village
donne une forme prégnantes à ses ambivalences.
Alexej Koschkarow parvient même à établir un lien
avec l’émigration juive en Amérique.
Les quatre pattes aux allures instables donnent à
l’ensemble l’aspect d’une silhouette penchée et boiteuse,
ou d’un insecte aux longues pattes.
Koschkarow (Shtetl), 2012
Les sculptures sont flanquées des 2 côtés par des frottages
« Smearing » au graphite sur toiles. Il l’obtient par une technique d’abrasion par laquelle il transfère sur toile, à l’échelle d’origine des éléments architecturaux, pans de façade ou murs.
Transposées en 2 dimensions, elles laissent transparaitre des formes floues, nuageuses et obscures. Le motif d’Aigle de Bellevue 2014 provient de sculpture en pierre new-yorkaise.
« j’ai consciemment évité que les smaerings soient trop exacts, les contours pourraient être beaucoup plus précis. Mais ils doivent paraître évanescents, comme dans un souffle » A Koschkarow
L’aigle illustre la puissance, depuis l’antiquité, il a toujours servi à symboliser la suprématie en tant qu’animal héraldique, on le retrouve aussi bien dans le Reich allemand que dans des variantes plus contemporaines.
La duplication dans les deux toiles penchées l’une vers l’autre suggère notamment les deux aigles dans les armoiries de l’Autriche Hongrie
mariée à l’empereur Charles 1er, forma le dernier couple impérial
d’Autriche-Hongrie. Après la défaite le couple
fut contraint à l’exil. Zita (1892-1989) ayant revendiqué le trône,
ne fut autorisée à retourner en Autriche
qu’ à un âge très avancé. a sa mort on lui fit un enterrement
presque impérial.
Le fleuve Щара (Chtchara), coule à l’ouest de la Biélorussie.
Cette zone a donné lieu à de nombreux combats
aux cours des deux guerres mondiales.
pas de confusion avec Zita, voilà l’explication du titre de l’exposition.
Un très beau catalogue est publié, édité par la Fondation Lorenz Schaulager
Heidi Naef, Senior Curator
Isabel Friedli, Kuratorin
Schaulager,
Ruchfeldstrasse 19, 4142 Münchenstein
T +41 61 335 32 32, F +41 61 335 32 30,
[email protected]
Ouverture
tram 11 arrêt Schaulager soit Grenze St Louis ou SBB (gare Bâle)
jeudi, 13 – 19 Uhr
vendredi à dimanche 11 – 17 Uhr
courtes visites guidées en allemand anglais français (30 mn)