Rick Margitza Trio
Paris. Le Sunside.
Vendredi 24 juin 2016. 21h.
Rick Margitza: saxophone ténor
François Moutin: contrebasse
Clarence Penn: batterie
Ca attaque tout de suite avec le batteur aux baguettes. Gros son du sax ténor. Impossible de ne pas penser aux pianoless trios de Sonny Rollins, un des Maîtres de Rick Margitza, mais ça tient la comparaison. Assise impeccable de la rythmique, volutes subtiles du ténor. Personne ne présente les musiciens ce soir. Avec des musiciens de ce calibre, les spectateurs ne sont pas là par hasard. C'est loin d'être plein d'ailleurs. Les absents ont vraiment tort. Sans piano pour remplir l'espace, la contrebasse doit prendre beaucoup plus de place. Avec François Moutin, elle est bien tenue. Ca joue avec densité. C'était " Speak low ".
Une composition dont le titre m'échappe. Ca roule sous les baguettes. La contrebasse impulse et le saxophone gémit. Une sorte de déambulation nocturne. Pas besoin de monter le volume sonore pour obtenir puissance et silence.
Une ballade avec le batteur aux balais. Tout en finesse. Quelle jolie valse. Bonne ondulation. C'est de la mécanique céleste. Le jeu se muscle comme disait Aimé Jacquet. Premier vrai solo de batterie. Ca roule et claque. " Le batteur est un barman de sons " ( Jean Cocteau). Un final crescendo.
Rick Margitza annonce les morceaux sans micro. Nous n'entendons rien et devons deviner les titres. Pas grave, la musique parle d'elle même. Silence total dans la salle. La rumeur de la terrasse nous parvient. C'est la vie de club. Solo de ténor en intro. Quelle entrée magistrale! Contrebasse puis batteur aux maillets le rejoignent. Sottilissimo. Des saxophonistes ténor, il en sort par fournées des conservatoires mais il n'existe qu'un seul Rick Margitza.
PAUSE
Le batteur tapote ses tambours. Pulsation continue de la contrebasse. Jeu en douceur du ténor. D"un coup ça monte en puissance. Beau thème. Douce plainte. Ce sont trois leaders qui échangent en permanence.
Le batteur enchaîne sur un thème fétiche de Rick Margitza, descendant de Tziganes magyars, " For the gypsies ". Contrebassiste et batteur installent une belle pulsation de ce thème que j'aime beaucoup. Une splendide chevauchée dans la puszta. Comme Stan Getz, Rick Margitza joue du violon au saxophone ténor.
" Cry me a river " ( " Pleurer des rivières " en version française). Une torch song comme disent les Américains (une chanson d'amour brûlé dont " Ne me quitte pas " de Jacques Brel serait l'archétype pour les francophones). Batteur aux balais, contrebasse tranquille, sax ténor qui ronronne. Ca marche. Une femme se love sur l'épaule de son homme. Dans la chanson, ça se passe beaucoup moins bien (" You can cry me a river, cry me a river. I cried a river over You "). Quel massage tympanique! Un solo inspiré du ténor.
" E. Jones ", une composition de Rick Margitza dédiée au batteur Elvin Jones. Jeun énergique et brillant du batteur. Obligé pour Elvin Jones. Pour écouter Elvin Jones en trio sans piano, écoutez l'album " East Broadway run down " de Sonny Rollins (1966). Un chef d'oeuvre. Ce soir, le trio envoie du bois, saperlipopette! Joli dialogue bassiste-batteur aux baguettes. Retour au thème avec le sax.
Comme Rick Margitza ne parlait pas dans le micro, je n'ai pas compris si la partie se jouait en 2 ou 3 sets. Mon ami Monsieur L et moi étant rassasiés de beauté à la fin du deuxième set, nous sommes partis heureux de ce concert d'un trio créé pour l'occasion. Il fallait la saisir cette occasion ce que nous fîmes ce soir là au Sunside.