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Exposition « Tropique du Cancer » Ulrich Lebeuf | Galerie Joseph Antonin Arles

Publié le 30 juin 2016 par Philippe Cadu

Du 4 au 30 juillet - Vernissage jeudi 7 juillet à partir de 18h.

http://galeriejosephantoninarles.blogspot.fr/ Exposition « Tropique du Cancer » Ulrich Lebeuf | Galerie Joseph Antonin ArlesDans le cadre des rencontres OFF 2016 et à l'occasion de la parution de la série photographique Tropique du Cancer d'Ulrich Lebeuf aux éditions Charlotte sometimes, la galerie joseph antonin présente le travail personnel du photographe issu de l'agence MYOP et parallèlement directeur artistique du festival de photographie du MAP à Toulouse. Cette exposition propose une réflexion sur le lien entre photographie et poésie, littérature et romantisme, cartographie du désir et esthétique de l'accident.

La série " tropique du cancer " présente un point de vue intense et singulier autour de l'intime et de son écriture, en abordant le champ érotique sous l'angle de la disparition et du deuil d'une relation amoureuse. " Il faut détruire ce que l'on aime " disait Oscar Wilde... La série photographique d'Ulrich Lebeuf rend présent ce climat troublant entre arts plastique et littérature, cette veine romantique proche des écrivains dandys décrivant des expériences fiévreuses, incandescentes, ou des musiciens poètes comme Serge Gainsbourg dont on connaît les hommages, les emprunts solaires aussi bien à Apollinaire qu'à Rimbaud...

Pour reprendre la trame de l'histoire : après une rupture, le photographe Ulrich Lebeuf a entamé, travaillé, creusé la surface des films polaroïds où il avait photographié, enregistré,

Exposition « Tropique du Cancer » Ulrich Lebeuf | Galerie Joseph Antonin Arles
capturé la présence de sa petite amie de l'époque. Cette volonté d'accidenter volontairement la surface du polaroïd avec des matières acides fait écho à la nature même du polaroïd qui est d'inscrire l'image sur un support unique à partir d'une réaction chimique, mais aussi un dialogue avec la photographie dans son ensemble qui joue sur le " positif " et le " négatif ", l'empreinte et le moulage de la lumière à partir justement du caractère fugitif de la vie, de sa part visible et invisible... L'accident est aussi ce qui nous ramène à la modernité et au romantisme, au geste " maudit ", à l'inconscient de la relation du peintre avec les modèles : " on ne peut pas comprendre l'accident. Si on pouvait le comprendre, on comprendrait aussi la façon dont on va agir. Or, cette façon avec laquelle on va agir c'est l'imprévu : on ne peut jamais la comprendre, c'est l'imagination technique " (entretien F. Bacon avec M. Duras) ; dans un autre entretien
Exposition « Tropique du Cancer » Ulrich Lebeuf | Galerie Joseph Antonin Arles
-celui avec D. Sylvester-, le peintre décrit également les " violences " qu'il inflige aux visages de ses modèles lorsqu'il rature la matière peinture, efface la couleur, gommant les traits individuels, en précisant qu'elles ne peuvent être faites qu'en l'absence physique justement de ceux-ci, pour ne pas heurter le vivant.

Cette dimension de cruauté et d'expérimentation, nous renvoie dans la série Tropique du Cancer à une interprétation du champ intime (profane/sacré), une revisitation de l'émoi amoureux (fétiche/altération de l'objet aimé), mais également une mise en valeur du hasard et du plus petit écart contenu dans l'intervalle de la variation, la géométrie du désir.

La série visuelle du photographe, empreinte de nonchalance et de fièvre Nabokovienne si l'on songe à des romans comme Lolita, Ada ou l'ardeur, si l'on se remémore cette fixation toute particulière, étrange, cette mélancolie d'insatisfaction qui lie le chasseur de papillon à la fragilité de la beauté de l'insecte, au moment terrible de la captation -qui équivaut sur le plan du réel à sa perte- nous fait entrer de plein pied dans cette mécanique de l'émoi qui fait tout le sel de la difficulté et aussi de l'intérêt de la création, qu'elle soit du domaine plastique ou littéraire : cette tension qui va du repos du sujet (endormi dans l'image) à son instabilité profonde (convoquant désormais un tiers-spectateur), la dichotomie au cœur de l'œuvre entre " voyeurisme " et " intime " (le don, la perte, les limites entre soi et dehors), la dialectique entre art et objectivation (objet de désir, quête d'illusion), la polarité de l'amour (tendresse et haine, magnétisme et jalousie)...

Ces paramètres aussi bien techniques que sensibles, renvoyant tout autant au " dictionnaire " des formes, des styles et démarches que la photographie emprunte aujourd'hui qu'à celui des questions de l'art en général, ont été pour nous le fil rouge à suivre de cette incursion en territoire du " tropique du cancer ", à la fois parallèle de latitude, lieu nommément d'une géographie suspendue, flottante, mais surtout clin d'œil à l'imagination, au fantasme, à la littérature, à tout ce qui simultanément fait " rêver " et " voir " (apercevoir le soleil au zénith)...

Clémentine Feuillet :: Galerie Joseph Antonin

Galerie Joseph Antonin, 40 rue Émile Barrère 13200 Arles Tél : 06 76 99 69 44

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