Ce matin-là, comme tous les autres, je n’ai pas vraiment fait attention. La veille au soir, les narcotiques anonymes avaient un meeting dans nos locaux. Au pire, j’aurais trouvé quelques grains de café sur les tables et de chaises un peu partout.
Je me dirige machinalement vers l’interrupteur quand je note que la toile est différente. Pas vraiment surprenant. Il arrive régulièrement que les breakers en bougent quelques une pour se libérer un mur. Parfois, les toiles peuvent juste tomber… Une quarantaine de danseurs qui sautent partout, ça fait du remue-ménage.
Je poursuis mon chemin et là encore les toiles sont différentes. Je finis par ouvrir correctement mes yeux pour noter que c’est toute la galerie qui a changé. Et en mieux, il faut bien l’avouer. Je prends quelques minutes pour redécouvrir mon lieu de travail et la logique de l’inconnu. Après observations des nouvelles toiles, quelques soupçons commencent à émerger quant à l’identité de l’inconnu. Plusieurs cadres en bois d’animaux sont apparus (où étaient-ils simplement dans un locker?).
Pas le temps de finir d’écrire ce billet que l’inconnu en question passe le pas de la porte. Ma déduction était juste, Arpi, artiste international et accessoirement fils spirituel de Raymond Viger, notre directeur, entre tout fringant. Dans sa réorganisation de la galerie, il a veillé à ce que les œuvres peintes sur les murs ne soient pas obstruées par des toiles. Et petit geste attentionné, il a offert une place à la grande toile dédiée à Danielle Simard, codirectrice, dont nous ne savions trop où la mettre tant elle prenait de la place.