James Noël propose une anthologie de poésie haïtienne contemporaine, « un brassage de tempéraments passionnants qui rassemble quatre générations ouvertes et poreuses aux grands flux de l’histoire, de l’amour, du pays, du jeu, de la colère, du monde, du sexe, de l’exil, de la mer, de la joie »… C'est notre rendez-vous mensuel, accompagné de documents extraits du n°3 de la revue Intranqu'illités (Maître d'oeuvre : James Noël - Direction artistique : Pascale Monnin, Barbara Cardone)
Ma nudité
On me dit qu’on la voit parfois assise
Au pied d’un arbre fredonnant un air étrange
On me dit qu’on la voit parfois assise
Au pied d’un arbre portant une grande fissure
D’où coule un marécage de serpents et de cris
Elle ne reconnaît plus les maisons et les villes
Ne se souvient ni de noms ni d’adresses
Elle coule
Elle s’en va sans retour vers cette porte toujours ouverte
Cette porte qui, elle aussi, ne fait que couler
Elle coule
Elle s’en va sans retour vers ces fleurs cueillies pour toi
Ces fleurs poussées sur ma langue
Ma nudité
Mes yeux
On me dit qu’on les voit éternellement
Sur la route qui mène à ton amour
Kerline Devise (in Terre des femmes, 150 ans de poésie féminine en Haïti - éd. Bruno Doucey)
Photo de Maïté Carames - Ophélies