Fallait pas.
T'as fait reculer ta cause de 100 ans.
Viva la revolucion?
Tu t'es pris pour Zapata?
Raté. Je n'ai rien entendu de ton intervention au micro plus tôt dans la fin de journée de jeudi lors de la vigile en l'honneur des morts inutiles d'Orlando. Tout le monde y était pour commémorer la mémoire des gens tués au Pulse en Floride, très majoritairement des homosexuels ou des transgenres. Tout le gratin de la communauté LGBT s'était pointé, jeudi à Montréal. Tout le monde y a glissé un mot. Toi aussi. Au nom du Pink Bloc. Peut-être était tu alors pertinent. Mais après...Oh Esteban, après...
Happé par l'émotion du moment, une émotion galvanisée par une foule, sotte de huer des ministres qui s'étaient déplacés en soutien à tout ce beau monde, emporté par le flot de haine qui traversait les gens. Une haine franchement mal calibrée, tu as voulu t'approprier le moment à toi tout seul. Tu as branché tous les projecteurs, les quelques 50 projecteurs qui avaient tous un nom, des noms présentés après ta connerie sur le premier ministre, mais que tout le monde entendait et découvrait, tout en repensant à ce moment surréaliste que tu as offert.
Tu ne voulais pas qu'une certaine droite s'approprie le moment. En un seul geste mal calculé, tu as donné raison à tout ceux qui disent que l'homosexualité, la communauté LGBT, est d'abord et avant tout guidé par une très grand immaturité émotive.
Tu as fait reculer ton mouvement.
Y a des coups de têtes qu'il vaudrait mieux rembobiner dans le film de la vie.
Tu te dis fier de faire chier le ministère et le patriarcat. Regarde bien les deux maintenant te ficher. Pour toujours. Ils t'auront à l'oeil. Tout le temps. Ce seront eux qui te feront chier.
C'était quoi le message? Exorciser une agression par une autre, plus molle?
Avoir eu un stylo à la main, tu aurais crevé l'artère du cou du premier ministre? On est en droit de se le demander. C'est pour ça que tu seras fiché. Incapable de gérer ses émotions, de freiner ses impulsions comme ça. C'est un drapeau rouge sociétaire.
Quand Esteban était escorté par des gardes du corps et des gens d'autorité, les pieds sous les bras de l'un, la clé de bras autour du cou, la taille transportée à bras, on l'a aussi entendu lancer un appel dont le bon sens a commandé la surdité. Il a crié "solidarité!"
Personne, mais alors personne ne comprend à ce jour, ce à quoi tu fais référence, Esteban.
Solidarité à quoi Esteban?
Au déséquilibre?
Au désordre?
Trouvez maintenant un ministre qui voudra se pointer aux activités de la communauté.
Rien n'était équilibré dans ce que tu as fait.
Ce que tu as fait avec ton corps demande un fameux courage. Ce que tu as fait au corps de Couillard, aussi bête soit-il, était plutôt lâche.
Déplacé.
Futile.
Militer c'est important. Il y a le bon militantisme et le mauvais. Tu as été très très mauvais. Affreux. Tu as été un contre-exemple.
Tu veux qu'on respecte ton corps. fallait respecter celui des autres.
Ce n'est pas un petit bout de papier que tu as lancé sur le Premier Minus.
C'est un pavé que tu as jeté dans la mare.
Et c'est le reste de ta vie publique que tu as foutu en l'air d'une certaine manière.
Jamais je n'ai pensé à toi autrement qu'en te considérant comme un gars durant la rédaction de toute cette chronique et ce, le plus naturellement du monde. Sans effort. Parce que sans te connaître, je t'avais d'emblée accepté ainsi.
Ça c'était pas possible au temps de Zapata. Ne nous y ramène pas.
Fallait pas.