L’ Extrema Outdoor Belgium : ou l’alternative parfaite à l’annulation du 20e I Love Techno ? Le Limo te répond: « JA ».
Cadre enchanteur, programmation au top, déjà reconnu par ses pairs comme meilleur festival européen dans la catégorie « Nouveaux Festival », l’XO a le profil type d’un festival à inscrire dans la « To do list » de chaque amoureux de Techno.
PARENTHÈSE
Avec l’XO16, le Limo ne se dépucelle pas de l’ambiance particulière du (faux) « plat-pays » (ce surnom est une hérésie, le pays de Dikkenek n’est pas plat pour un belga, merci Jacques Brel!). Le célèbre Dour Festival étant déjà dans le panel de nos live reports, et ce depuis maintenant 3 ans.
Et on ne s’inquiète pas quant au fait que d’autres suivront. Car si la Belgique ne dispose pas encore d’autant de festivals que de bières d’abbayes, elle est pour autant bien pourvue. Leur nombre ne cesse en effet de croître : pour vous donner une idée, en 2012, on en dénombrait plus de 600 ! Ce total comprend d’une part les énormes cylindrées telles que Werchter, Tomorrowland ou encore le Pukkelpop, et d’autre part les petits festivals à l’initiative privée ou associative, sans oublier les festivals organisés par les administrations publiques. On pourrait en citer d’autres, comme les Francofolies de Spa, le Bel’Zik Festival à Herve ou bien le Verdur Rock à Namur mais ce ne serait qu’une goutte d’eau dans l’immense océan de festivités dont dispose ce petit pays. Depuis le début des années 2000 et la chute de l’industrie du disque, le côté « live » est devenu terriblement important pour les artistes, leurs producteurs mais aussi pour le public, qui déserte de plus en plus les boites de nuits, aux profits des chapiteaux. Et la Belgique semble l’avoir bien compris !
DAY 1
Après 1 bonne heure de route de Bruxelles, se dessine à l’horizon le cadre idyllique du Recreational Park de Kelchterhoef, son écrin de verdure et son lac posé en pleine campagne flamande. Les premières impressions sont plus que bonnes, on a un sentiment de weekend à la « fresh » loin du tumulte de la ville… ou des gros festivals: c’est aéré, boisé, pas bordélique. Pour autant, même si beaucoup de choses le laissent à penser, on est clairement pas dans un « CenterPark ». Les basses lointaines d’UGUR YURT décapsulent déjà les canettes des campeurs qui déchargent leur berlines allemandes (éh ouais ! On est bien en « flamandie »!). La 2ème bonne impression est la fluidité du cortège de l’entrée du site aux portes du festival (attention deuxième préjugé en approche): la rigueur des Flandres en somme ! Camping à taille humaine, à 2 minutes 36, montre en main des scènes et de la plage… Dis comme ça, le weekend avait tout l’air d’être bien chill les pieds dans l’eau, sauf que les températures ont littéralement chutées dés notre arrivée sur les lieux.
Pas découragés pour un sous (il ne vaut mieux pas en Belgique… Ok, j’arrête c’était le dernier), nous nous réchauffons au bord de la scène du club Hasseltois, The FORTY FIVE, pour le premier remontant du soir: Matador. L’irlandais à joué dans le classique m_nus comme il le qualifie si bien « bouncy, with wispy hi-hat ringlets and a buried-in-the-mix, undecipherable vocal running through it. »
2e étape de la soirée, la scène CAFEINA et KÖLSCH (prononcez Kkeuulch’), du label Kompakt, Ministry of Sound et Ultra Records pour ne citer qu’eux. Mi-irlandais, mi-allemand et résidant au Danemark, l’auteur du fameux EP 1977 et des titres « Goldfish » et du mythique « Calabria » sous le blaze » Rune RK », était programmé sur le coup de 22 heures… Et ce n’est pas fini : puis qu’il était aussi l’invité surprise de l’After Party au Camping.
A peine son premier set terminé, la piste de danse du camping ressemblait déjà à une rame de métro bruxelloise à l’heure des retours du boulot. On se glisse avec peine à travers la foule, évitant plusieurs groupe de filles surexcitées par les selfies qu’elles viennent de prendre. Finalement, on acquiert, de haute lutte, nos 20 centimètres carré d’espace les oreilles collées au sound system. Au vu des cris et des téléphones qui se lèvent, on comprend que Rune Reilly Kölsch est arrivé sur scène. Son entrée en la matière était pleine de finesse. Le son monte, petit à petit, et les gens se mettent à bouger. Boum boum boum boum. Il sait faire patienter son audience et maîtrise parfaitement sa techno mélodique. Petit à petit, nous reconnaissons certains passages de « 1983 », l’album qu’il a réalisé en 2015, et comprenons pourquoi Rune est convaincu que la force de sa musique réside dans l’alternance entre mélodie et vibration, soulignées par de fins clins d’oeil au hip-hop. Las, les voix se mettent à couvrir la musique, et l’on se rend compte que les deux tiers du public nous empêchent de profiter du moment. Et Bam, renversement de situation, Kölsch balance « Loreley » , tout le monde se remet dans le mouvement et Mister K. profite de la joie du public pour lâcher son casque et faire son show.
La soirée continue, les sons se succèdent, on entend « Goldfish » – nouvelle salve de « Ouaiiiis » – et Kölsch termine son set avec brio et maitrise. Nous ne sommes pas déçus par ce que nous avons entendu, on a vraiment trouvé de l’émotion dans ses sons, et compris pourquoi il a construit la plupart des tracks de « 1977 » (sinon l’entièreté de son album studio) sur des rappels de son enfance et sa jeunesse. En somme un set qui fut très, voire trop, maîtrisé.
Bilan de cette courte première soirée : on ne regrette déjà pas d’être venu, et on a surtout hâte de voir la suite.
DAY 2
Pour cette deuxième journée de festival, 12 artistes sont sur notre « to do list » à commencer par la scène des célébrissimes After Parties du CIRCOLOCO avec ADRIATIQUE, SETH TROXLER et ART DEPARTMENT. Tous trois adeptes du club eivisencs DC-10, hôte des premières soirées Circoloco.
C’est donc après un set d’Adriatique, un peu mollasson, que nous débarquons en fanfare pour le début du set de Seth Troxler qui nous passe déjà un bijoux sonore: « Gliding » de Compass. Comme a son habitude il nous joue la techno qu’on aime, un mélange de bonnes tracks qui forment un patchwork qui plaît à tout le monde.
Avant de partir sur la RedBull Elektropedia stage, on a failli oublié de mentionner le sublime système son de speakers tout en bois, monté sur cette scène par les néerlandais de Real Horns. #DutchQualitat
Direction donc la scène de la célèbre marque de boisson autrichienne, qui assure encore une fois sa présence et sa visibilité sur le marché des festivals et de la musique en général. 7 artistes y sont planifiés, dont 4 nous intéressent tout particulièrement. A commencer par le duo belges RAW DISTRICT né en 2013 de l’aliance de Vernon Bara et Massimo DaCosta, que l’on a souvent vu et écouté sous les labels Homecoming Music, Defected, Hot Creation, OM Records ou encore Robsoul, en apparence une house très funky. Mais comme leur nom l’indique le set était plus organique plus dans le « deeper and darker side of house music » dans le style pur de Crosstown Rebels ou Souvenir Music.
Valeur sure du festival, le patron italien du label Life and Death, DJ TENNIS, nous a offert un des temps forts de ce weekend de la « soulful dance vibes blend with fragments of a post-punk attitude« . Au sommet en tant qu’artiste mais aussi en tant que label manager, Manfredi Romano, de son vrai nom, délivre un set ficelé, efficace, vibrant, jonglant avec les continents comme il jongle avec la musique à l’image de ce qu’il peut faire avec son label – #POUCEVERT.
La soirée commence doucement avec la musique mystérieuse et onirique de Tale Of Us. Loin de la techno qui tabasse, il y a une intelligence indicible et beaucoup de dextérité dans le son de ce duo berlinois. House et techno fusionnent sur fond de mélodies sombres et hypnotiques. Les Berlinois Karm et Matteo, ont réussi à plaire au monde entier. Alliant différents styles à la perfection, de la pop au rock en passant par la house, ils réussissent à toucher un large public n’écoutant habituellement pas particulièrement de la musique électronique. Donc l’excitation ce soir-là est palpable. En témoigne, la foule, attroupée devant la scène. Nous aurions pu nous attendre à leur set plus ou moins habituel (comme celui de la Boiler Room des Nuits Sonores circa 2014) avec des remix de Caribou « Can’t Do Without You», du Ten Walls de « Gotham » ou «Walking With Elephants » ou bien Mano Le Tough et son « Primative People », ou encore faire un clin d’oeil à leurs congénères du label Life And Death comme Recondite, Mind Against… Mais il n’en est rien. Pendant près de 2h les italo-allemands, sur le même beat incessant, dissémine toutes les particularités de leurs morceaux sur leur set (le rythme de caisse claire, la rythmique rap-hip hop, les envolées lyriques….). La touche Life And Death s’y ressent énormément.
Pas le temps de se remettre du sublime set de Tale of Us, ni même d’aller prendre une bière, voilà MACEO PLEX qui arrive derrière les platines pour 2h de set intense, le visuel « Dream don’t sleep » inscrit derrière lui porte bien son nom : on a envie de continuer à rêver, et à raver toute la nuit ! L’intensité de son set tech-house atteint son paroxysme lorsqu’il passe une de ses sorties phares de 2015: Solar Detroit, le maestro n’hésite pas à jouer avec son public et fait le show, la foule est conquise ! Puis, à un moment donné, son set prend des allures de plus en plus techno, notamment grâce à Snorkel, une des tracks issues de son principal pseudo Maestria.
L’XO a au moins un point commun avec le Marvelous ou le Dimension, c’est d’avoir une scène que l’on pourrait nommer « pied dans l’eau stage » aka FEESTGEDRUIS, qui n’est aucunement la traduction en néerlandais mais le nom l’un des nombreux labels, promoteurs, organisateurs d’événements en Belgique. C’est donc sans surprise que nous retrouvons (encore) l’un des protégés du labels: BE SVENDSEN. Le danois, que l’on a pu voir également sur la VAAG, historique club anversois fortement lié à FEESTGEDRUIS.
C’est donc sur la plage que nous avons pu attendre patiemment le développement de CARL CRAIG, il faut le souligner l’introduction du « Detroit man » fut des plus longues: grosses intro, petit développement et toute petite conclusion. La dissertation académique, c’est pas ton truc Carl. Toi t’es plus « out of the box », virtuose du maniement des synthétiseurs modulaires et dans sa faculté à rompre les barrières musicales. Il a joué un set particulièrement efficace et fédérateur, avec une sélection de tracks variés.
Le soleil se couche laissant place aux premières étoiles qui annoncent l’arrivée de la sibérienne NINA KRAVIZ – enchaînement de gala avec Carl. Celle qui se prédestinait à être dentiste, fait « zooker » son petit monde avec un set techno piqué de pointe d’acide et d’une gestuelle qui lui est bien connu, osant même la petite chorée.
En terme de lourdeur, on a était servi all day long ! Pendant les quatre dernières heures, on a eu droit à du Foorplan, du Clouds, du Plastikman et quelques pépites Innervisions et moultes grosses balles dont les basses réveilleraient un mort. Parfait pour enchaîner avec l’after party du camping !
DAY 3
Si tu suis le Limonadier depuis quelques temps, tu as certainement pu remarquer l’influence très marquée de la « Black Music » dans le contenu éditorial et événementiel du webzine. Ici, on aime les sons qui groovent, qui bouclent les pépites disco et funk de l’age d’or de nos parents. Ce 3e jour était donc le moment ou jamais pour sortir nos plus beaux pas de danse façon « Soul Train ».
Tout commence par un stop à la DEFECTED Stage, qui s’est avéré être longue profession de foi plutôt qu’une petite prière. Des basses profondes, bien rondes, des percussions chaudes, des boucles mélodieuses et des VOIX ! Le groove est sentimental, on sentirait presque l’âme de Chicago, du studio 54 sur la piste de danse. You Know What I mean?
PURPLE DISCO MACHINE, SONNY FODERA, RIVA STARR vont tour à tour nous entraîner dans le pur style « Sound of Belgium« , un tribute à la Rocca, à l’H²o, au Café d’Anvers… Le Duo de Dresden, PDM a fait groover la scène en toute quiétude, avec une once d’insolence. Il faut dire que les allemands profitaient d’une piste surchauffée même si celle-ci connaît un remplissage qui va crescendo à l’approche du milieu d’après midi, propice à l’éveil des campeurs les plus fêtards.
Le très expérimenté Sonny Fodera nous offre un set des plus enlevés. Il propose une house garage léchée qui fait honneur à une foule mêlant étudiants connaisseurs habitués des soirées belges, et trentenaires décomplexés, pour qui DJ Sneak résonne comme une madeleine de Proust.
C’est donc Riva Starr aka Stefano Miele qui vient ensuite poser ses platines. Son arrivée presque trop tranquille augure un set qui va progressivement faire remuer nos jambes. Adressant peu de regards sur une scène désormais bien remplie, il dégoupille plusieurs pépites qui démontrent dès les premières minutes que sa réputation est loin d’être une légende. Durant près de onze heures, c’est tout un pan de l’électro américaine, italienne, allemande qui est évoquée. Samples disco filtrés, beats jackin’ house, vocaux soul : c’est la house à son paroxysme qui s’exprime. S’ils ont joué de nombreux titres d’époque, les mecs ont proposé également des tracks plus récents, notamment issus de leur production respective, paru l’an passé comme le remix du titre de London Grammar « If you Wait » par Riva Starr. Ni trop efficace, ni trop deep, la house du label Defected est positive, originelle et sans fioriture, aguicheuse sans être vulgaire, old-school et actuelle à la fois.
Bien décidé à rester dans le mood, c’est sur la petite scène cosy « AproSpritz » que nous avons été rassasiés ! Il y avait un doux air d’open air des familles, B2B entre deux djs du coin à l’ombre d’un oranger, le soleil en pleine réflexion sur le lac en arrière plan, un petit remix de Ciara « 1 & 2 » steps par là un autre de Noir & Haze « Around » par ici, il n’en fallait pas plus pour en oublier EATS EVERYTHING à LA ROCCA/ANTS. Damn… Disons qu’un festival est propice aux actes manqués !
Nous sommes alors qu’en fin d’après midi mais un gros planning nous attend encore avec JEFF MILLS que l’on ne présente évidement plus, lui qui a fait de la « Techno » une science, un sujet de débat dans les amphithéâtres des grandes écoles et universités d’Europe. L’Humain fusionne avec la Machine et les tourbillons numériques du pionnier technoïde.
Le label HOT CREATIONS était lui aussi en représentation avec PATRICK TOPPING et JAMIE JONES entre autres… Le set de l’ancien de Hot Nature fut très efficace, composé de ses morceaux phares il a su emporter la foule comme il sait le faire, grâce à ses très bons remixes (celui de Maceo Plex par exemple) ou ses prods (What They Say). Allier sensualité à ligne de basse digne d’une soirée à Frankfort, c’est fort (sans jeu de mots). Nos corps sont entraînés dans une spirale dont nous ne nous n’extirperons qu’à la fin du festival. Tout est dit. Et pourtant c’est de la house ! Mais c’est celle de Berlin tu vois, celle qui appelle ton corps à entamer des pas de danse pour toi encore inconnus. Pas de mix, pas de morceaux différentiables les uns des autres. Juste des boucles, des reprises, quelques pitch, et des basses, beaucoup de basses. Une leçon de warm-up.
Sur la RedBull GUTI en live, PAN-POT et LOCO DICE nous attendent pour un final haletant! LE Live dont tout le monde parle ; celui du dj argentin GUTI, virtuose jazzy et ex-star du rock en Argentine, aujourd’hui fer de lance majeur du label DESOLAT. Clairement un ovni de la planète électronique. Ses pérégrinations dès le plus jeune âge entre Venezuela, Costa Rica, France et Russie l’ont doté d’un X-factor électronique métissé. Sa musique est aussi très inspirée de la folk argentine qu’il adore. Et ça fait du bien comme une bouffée d’air frais dans un festival au line up très bon mais parfois monotone.
C’est alors que Loco Dice entre en scène, et que nos esprits s’échappent de nos corps. Ou l’inverse, on ne se rappelle plus. Le mec a monté la Gain de 20 dB c’est obligé. On se retrouve en face de la pureté incarnée, la musique électronique qui jongle parfaitement entre douceur et violence. Une house de Detroit à la sauce allemande début 00’s, et sans même s’en rendre compte. On vole littéralement au sein de la foule qui ne forme qu’une seule entité. Tout est propre, comme dans un rêve. Les boucles parfaitement maîtrisées, les tracks s’enchaînent à la perfection, et les montées… Les montées ! Leur fréquence rythme son live, on n’a de cesse de monter en excitation à une fréquence périodique de 4 minutes. Le plus cool, c’est que le patron en face de nous s’appelle Yassine Ben Achour et qu’il a appris la techno d’un oncle tunisien ! #10/10 #PouceVert #TripleA
C’est ainsi que nous avons clôturer cette première pour le Limo au festival Extrema Outdoor Belgium (on précise car l’XO BE a un grand frère néerlandais et un petit frêre anversois). Après un sympathique feu d’artifice qui annonce la fin simultanés des sets de Loco Dice, Jeff Mills, Nick Curly, Sylvester, Jamis Jones, Nic Fanciulli, nous nous sommes dirigés plein de son dans la tête et d’images à raconter, vers le camping pour la dernière After Party. Ce fut donc un très bon weekend dans un superbe endroit, avec une organisation de qualité, et un line-up de folie.
Au passage, BigUp à l’association des anciens du village, qui nous a fait kiffer avec leurs bickies pas cher.
Preuve qu’un festival de Jeun’s n’est pas une pelle pour creuser le fossé des générations.
XO nous a en effet vendu du rave.
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Lu.H
Ambassadeurdu Limo au Grand NordReporter détaché et spécialiste des festivals Belges
Amoureux du tire-bouchon depuis plus 5 ans.
"Je vais et je viens" entre la Techno d'Outre "rein" et la Black Musique du "Grand Ouest".
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