Partager la publication "[Critique série] ORANGE IS THE NEW BLACK – Saison 3"
Titre original : Orange is The New Black
Note:
Créateur : Jenji Kohan
Réalisateurs : Andrew McCarthy, Constantine Makris, Michael Trim, Nicole Holofcener, Anthony Hemingway, Julie Anne Robinson, Mark A. Burley, Jesse Peretz, Phil Abraham, Uta Briesewitz.
Distribution : Taylor Schilling, Laura Prepon, Kate Mulgrew, Uzo Aduba, Samira Wiley, Annie Golden, Ruby Rose, Taryn Manning, Lea DeLaria, Dascha Polanco, Kimiko Glenn, Lori Petty, Laverne Cox, Selenis Leyva, Emma Myles, Beth Fowler, Adrienne C. Moore, Danielle Brooks, Nick Sandow, Michael J. Harney, Jackie Cruz, Yael Stone, Elizabeth Rodriguez, Matt McGorry, Emily Althaus, Jessica Pimentel, Matt Peters…
Genre : Comédie, Drame, Adaptation
Diffusion en France : Netflix
Nombre d’épisodes : 13
Le Pitch :
L’évasion de Rosa et la disparition de Vee ont laissé des traces dans les esprits. Alex Vause est de retour au pénitencier et dans la vie de Piper. Caputo, qui est monté en grade après le départ précipité de Figueroa, a engagé une conseillère supplémentaire, ce qui déplaît à Healy. Après la violence et les tensions entre communautés, les détenues de la prison de Litchfield aspirent à un certain calme. Malheureusement, en coulisses, c’est une autre histoire. Litchfield est menacée de fermeture, et Caputo devra faire tout pour la sauver, quitte à vendre son âme au diable…
La Critique :
Dans une série, la difficulté est présente à chaque nouvelle saison. Il faut faire toujours plus fort, aller plus loin, maintenir un rythme plus soutenu afin d’accrocher le spectateur. Et par conséquent, le cap de la troisième saison est toujours délicat. La deuxième saison avait placé la barre très haut. Beaucoup plus sombre, plus dramatique, tendue. La logique aurait voulu que la saison 3 suive cette logique, surtout étant donné l’intensité du final. De plus, la saison 2 avait un personnage vraiment méchant, violent, qui n’a hésité à aucun instant à marquer physiquement les autres détenues. Pourtant, dans la saison 3, au lieu d’aller tambour battant, on a une rupture totale de rythme ; la série prend plus son temps. Par conséquent, on met plus de temps à rentrer dans la série. C’est là le principal point noir de cette troisième saison (avec le flashback pas crédible du tout de la détenue Mei Chang).
Passé cet écueil, on retrouve ce qui caractérise le plus de Orange Is The New Black, comme la valorisation de tous les personnages. Si le duo Piper/Alex, séparé dans la saison précédente, est à nouveau au premier plan, la série montre néanmoins depuis le début qu’il n’y a pas de personnage de second plan. Il y a des rotations au niveau de l’importance des personnages et ceux moins visibles auparavant ont droit à leur part de lumière. En premier lieu, Norma la détenue silencieuse qui se retrouve objet d’un culte dont sa bienveillance est la doctrine (on découvrira dans son flashback qu’elle faisait auparavant partie d’une secte). Brook Soso est beaucoup moins enjouée et sa tendance à trop parler se mute en dépression sévère. À l’inverse, d’autres comme Nicky Nichols sont plus en retrait. Les différents flashbacks permettent un regard neuf sur certains personnages qui semblaient antipathiques, comme Leanne qu’on aurait eu du mal à imaginer avoir grandi au sein d’une communauté amish. Fait nouveau, ceux qui sont de l’autre côté des barreaux ont droit aussi à leur flashback, en l’occurrence Healy dont on voit l’origine de sa haine des femmes, et Caputo.
L’autre point fort habituel de la série de Kohan, c’est que cette dimension humaine permet de traiter de diverses problématiques sociales importantes. En premier lieu, la reprise en main d’institutions publiques par une holding privée (avec les logiques de réduction drastique des coûts qui en découlent, au profit des actionnaires) et les conséquences graves sur le plan humain (gardiens non formés, nourriture industrielle low cost….). L’actrice-chanteuse Lea DeLaria et l’actrice transgenre Laverne Cox fusionnent leur combat dans ceux de leurs personnages. La première dans ses flashbacks, enlève l’armure de la forte en gueule et dénonce les difficultés pour les lesbiennes butchs (surnom donné aux homosexuelles très masculines) d’être acceptées et comprises. Sa phrase « I refuse to be invisible » est depuis devenue comme un mantra pour Lea DeLaria dans la vie et dans son combat. De son côté, Laverne Cox, grâce au show, a pu faire accentuer l’écho de son combat contre la transphobie (dont son personnage, Sophia, connaitra le caractère insidieux).
Le casting est, comme à l’habitude, parfait. Le personnage de Piper se mue peu à peu en « parrain » implacable (elle monte un trafic de culottes de détenues à destination d’internautes pervers) et son interprète est convaincante dans ce registre. Uzo Aduba est à nouveau parfaite, son personnage s’étoffe encore et elle canalise cette fois sa folie dans l’écriture de récits pornographiques qui connaissent un succès certain (sorte de 50 nuances de Grey complètement barré). C’est une actrice qui mérite de percer, tout comme Samira Wiley qui se montre elle aussi très convaincante. La vétéran Kate Mulgrew (alias Red) impose encore une fois son charisme et son talent. Certains personnages qui n’ont peu de répliques gagnent peu à peu en visibilité, et seront au premier plan lors de la prochaine saison, comme le montre la bande-annonce. C’est le cas de la discrète et effacée Maria Ruiz, incarnée par la douée Jessica Pimentel (qui montre dans la vraie vie une facette radicalement à l’opposé puisqu’en plus d’être actrice, elle est chanteuse d’Alekhine’s Gun, (très bon) groupe de death metal). De l’autre côté des barreaux, Nick Sandow et Michael J. Harney, alias Caputo et Healey sont comme toujours excellents. Le show invite Mary Steenburgen (Retour vers le futur III, Philadelphia) pour jouer la mère de Pornstache, Lori Petty (Point Break, Tank Girl) et la canonissime (difficile de trouver un autre adjectif) actrice/DJ/VJ/mannequin Ruby Rose pour un rôle clef . Nul doute que cette dernière, dont les photos affolent la Toile, se destine à un avenir radieux (et on le lui souhaite car en plus, elle est pétrie de talent).
La saison 3 des aventures des détenues de Litchfield a perdu en rythme, mais se montre toujours pertinente et cohérente. Sur cette saison, le fil rouge est la maternité, très bien amené dans le premier épisode (tourné autour de la Fête des Mères) et auquel la série fera régulièrement référence en montrant le mauvais rapport aux parents et leurs conséquences sur la destinée des détenues. Porté par des acteurs qui font briller le casting tout entier, sur une profonde humanité et toujours aussi réaliste, Orange is the New Black possède d’énormes qualités qui lui confèrent un grand capital sympathie. Le faux rythme qu’on lui reproche est trompeur. Les nombreux nuages noirs qui s’amoncellent à la fin annoncent plutôt que c’est le calme avant la tempête.
@ Nicolas Cambon