Sint-Amands, lieu de naissance d'Emile Verhaeren (21 mai 1855) , célèbre, d'une exposition thématique, centrée sur la dimension européenne du critique d'art, poète, dramaturge,... le centenaire de son tragique décès , en Normandie, le 27 novembre 1916.
Inaugurée le 22 mai, royalement visitée, ce 7 juin, par LM le Roi Philippe et la Reine Mathilde, l'exposition a investi la salle principale du musée Emile Verhaeren, selon une scénographie mûrement réfléchie; la seconde salle, intime, reste consacrée à l'exposition permanente des écrits de l'illustre natif de Sint-Amands.
Elle est soutenue d'un catalogue remarquable, dont la lecture serait utilement préalable à la visite de l'exposition (sinon, je vous suggère vivement d'opter pour une visite guidée). Co-rédigée par David Gullentops, auteur d'un Verhaeren inédit (VUB presses, 2015), Rik Hemmerijckx, docteur en histoire, conservateur du musée Emile Verhaeren, Vic Nachtergaele, professeur émérite (KUL) et Paul Servaes, ancien conservateur du musée, la brochure, riche de 80 pages, met en évidence les étapes de la reconnaissance du poète au niveau européen.
Tôt enrôlé comme chef de file de la poésie symboliste - dont il s'affranchira - Verhaeren doit à sa rencontre avec Alfred Valette, le directeur de la prestigieuse maison d'édition Le Mercure de France sa véritable consécration sur le sol français. Côté Autriche-Allemagne, il doit à notre cher Stefan Zweig, dévoué traducteur, biographe et agent littéraire, sa pénétration du monde germanique. Mais en mettant à ce point l'accent sur la dimension germanique de son oeuvre, Zweig nuit inconsciemment à la portée européenne de notre compatriote...
Du côté du Royaume-Uni, c'est le poème Les Cordiers (in recueil Les Villages illusoires) qui retient l'attention du poète Osman Edwards , lequel produit un article sur Verhaeren dès avril 1895 et héberge le couple, à Londres, au début de la guerre, suite logique d'une longue histoire d'estime et d'amitié. A noter que c'est surtout l'entrée en guerre qui consacre la vraie notoriété d'Emile Verhaeren en ce pays allié.
Les Pays-Bas célèbrent plus tard la poésie de leur voisin - il faut attendre 1907 ; l'insuffisance de traductions en néerlandais explique, en partie, la lenteur de sa pénétration dans le pays.
Tandis que la Russie, tant tsariste que révolutionnaire verra dans les écrits de notre compatriote, une conscience sociale, socialiste, rebelle.. qui lui vaut les suffrage enthousiastes des intellectuels, tel le poète symboliste Valéri Brioussov, des étudiants de l'Université de Saint-Petersbourg, et des opprimés de tous bords. Un engouement qui perdure au-delà de son trépas, dont il reste complexe de mesurer les exacts effets.
Et l'Emile Verhaeren d'avant guerre de multiplier rencontres, manifestes, conférences, de répandre sur une Europe qu'il veut unie, vive, vitaliste .. sa "culture de l'enthousiasme," de la foi en une union sacrée de l'art et de la culture.
Verhaeren, Een dichter voor Europa – Un poète pour l’Europe, Catalogue (bilingue) de l’exposition du Musée Emile Verhaeren (Sint-Amands) collectif rédigé par David Gullentops, Rik Hemmerijckx, Vic Nachtergaele et Paul Servaes, Emile Verhaerenmuseum, mai 2016, 80 pp