Décidément ,nos problèmes financiers nationaux nous poursuivent et en deviennent des problèmes politiques !
Mes lecteurs auront-ils été alertés ce matin par l’écoute de la radio ( RTL en l’occurrence) ?
Il a été dit que : « l'ASN juge "inacceptable" le calendrier de démantèlement d'EDF. Le gendarme français du nucléaire s'oppose au projet d'EDF d'obtenir le report du démantèlement des six plus vieux réacteurs, qui serait alors achevé au... XXIIème siècle.
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Il se trouve que j’ai eu le même problème de démantèlement de mes installations lorsqu’ en 1980 la construction d’une 2 ème usine de diffusion gazeuse d’enrichissement , sous le nom de COREDIF , a été annulée et que j’ai quitté SACLAY pour le siège CEA /PARIS et pour m’occuper des problèmes de démarrage d’EURODIF ( voir note en bas de page )
Il se trouve aussi que j’ai inspecté les réacteurs nucléaires à l'uranium naturel graphite gaz (UNGG) dont il est précisément question , dans la période 1985-1990
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QUELQUESEXPLICATIONS NECESSAIRES pour mieux comprendre les problèmes de démantèlement ….
Lorsqu’une installation nucléaire , quel que soit son niveau , recherche , développement ou usine industrielle est créé , il en existe des plans et documents de définition de divers éléments de sa construction , de son process et de l’historique de son exploitation …..
Si les machines ou appareils de l’installation ont une durée de vie délimitée par les programmes et les qualités requises ad hoc au départ ,alors , plus encore les agents et techniciens qui les exploitent sont l’objet eux de ce qu’il est convenu d’appeler « une fonte naturelle » (= ils mutent , quittent ,partent en retraite , meurent….)
ET QUEL QUE SOIT SON NIVEAU , les trois étapes du démantèlement d'une installation sont classées comme suit :
- niveau 1 : mise à l'arrêt définitif (MAD) comprenant le déchargement du materiau nucléaire ( il s’agissait pour nous non seulement du radioactif mais de dérivés très toxiques ,les fluorures d’uranium ) donc nécessitait une connaissance particulièrement adaptée ;
-niveau 2 : démantèlement partiel incluant le démontage des éléments voire la destruction des appareillages ,ceci incluant la décontamination et le confinement pertinent nécessaire ;
- niveau 3 : la remise en état des locaux avec retour en niveau normal d’activité….
Il est clair qu’ il est préférable de faire démonter une petite installation prototype par ceux qui l ont conçu , monté et fait fonctionner . Si certains d’entre vous s’imaginent qu’ une telle installation est aussi facile à refaire fonctionner …. comme les vieux trains à vapeur qu on fait remarcher en été en ARDECHE , ils se fourrent le doigt dans l’œil !
Il est évident que les étapes de démantelement d un site de centrale est de beaucoup plus complexe et plus long ……
Le corollaire de tout ce que je viens de vous dire , c’est que tous les anciens « exploitants » de ces vieilles UNGG des années 50 à 60 sont en retraite ou au cimetière
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QUID DE LA LOI ?
En France, les opérations de démantèlement sont réalisées sous couvert d’un décret dit de MAD DEM (Mise à l’Arrêt Définitif et Démantèlement) et seule l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) peut autoriser le démantèlement d’une installation, après qu’elle ait instruit les dossiers y afférant avec l’appui de son support technique l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN). Elle en assure également le suivi réglementaire.
Toutefois ce sont les exploitants qui restent pleinement responsables règlementairement, techniquement et financièrement tant des opérations de démantèlement que de la gestion des déchets qui en résultent
Dans ce but , ils provisionnent les montants correspondant à ces obligations et constituent des actifs dédiés pour en sécuriser le financement ….Ces actifs ne sont pas nécessairement des capitaux inactifs .Donc n’imaginez pas EDF empilant quelque part des lingots d’or sur les rayons d’une chambre forte !!!
A suivre
Note en bas de page :” “In 1975, another consortium called Coredif with the same multinational membership as Eurodif but a different distribution of shares (Eurodif 51%, France 29% and Iran 20%) was organized to assess future nuclear demand and build a second Eurodif-type plant if the study results justified it.”