La famille au cœur des tirades Introduit par un duo sympathique de journalistes, les spectateurs ont eu droit à un panel de trois familles avec des spécificités très différentes. Pour vous faire une idée, l'entrée en matière proposée s'appuie sur une famille modèle (les Vikingson), classe moyenne, composée du couple mixte avec des enfants espiègles et aimants. L'histoire d'un homme et une femme attentionnée. La famille rêvée. Puis les Rigolobachi (comprenez les chauves drôles) représentation de la famille bourgeoise franco-antillaise gainée dont les adolescents souffrent de l’absence de parents égocentriques, obnubilés par le jeu de représentation dans la société, négligeant profondément la communication avec leur progéniture. Dans cette famille, l'opulence côtoie le mal-être existentiel. Enfin, les Pesa na Yo, caricature d’une famille typée africaine qu’on se représenterait bien du côté d’Aubervilliers ou de Grigny. Alcoolisme, femme hurlante, violences conjugales et arnaques à la CAF.
De l’art de la caricatureTout l’intérêt de cette pièce est dans le grossissement du trait, dans la caricature forcée remarquablement menée. On ne sait jamais quand ils vont cesser de tirer le bouchon et pour cette troupe comprenant des comédiens principalement d’origine africaine, la gageure fut intéressante. La caricature a ceci d’être parfois tellement affligeante qu’elle en devient paradoxalement engageante. Parce qu’au final, le rire permet de dire haut, le temps d’une blague, des réalités pénibles auxquelles de nombreuses familles sont confrontées en France. L'humour s'inscrit aussi par des les vannes improvisées sur la situation politique française ou en direction de certaines figures politiques françaises.
Ma famille… A la sauce françaiseTout bon africain un poil connecté à sa bonne vieille terre des origines a vu un épisode de la célèbre série ivoirienne Ma famille, sorte de sketch ou théâtre populaire télévisé, qui a fait le bonheur de nombreuses familles avec son acteur fétiche Michel Gohou. La référence dans le titre de cette pièce de théâtre à cette série n’est pas anodine et d’ailleurs la dernière séquence dans la famille « typée africaine » s’inscrit dans le théâtre populaire de ces dernières années en Côte d’Ivoire ou au Congo. Une sorte de chaos absolu d'où sort toujours une vérité bien sentie. Ici, toute l’intelligence de la mise en scène a été de proposer deux premières familles typées « française » par leur mode de fonctionnement et expressions avant de partir sur une approche plus « Olé Olé » avec la famille dite "africaine" pour faire simple.
Théâtre du Gymnase Marie Bell, 38 Boulevard Bonne Nouvelle, Paris
Le jeu des acteursIl y a quelque chose de très interpellant à voir ces comédiens exceller pour une première sur les planches d’un grand théâtre parisien. J’ai en effet l’habitude de voir des pièces jouées par des troupes beaucoup plus expérimentées ayant réalisé moult tournées en province ou dans l’espace francophone qui, généralement, dans le meilleur des cas, à Paris jouent au Tarmac, sinon dans des salles beaucoup plus modestes. Des comédiens décomplexés en interaction avec un public acquis qui a tout de même chanté la Marseillaise avec ferveur quand il a été sollicité. Certains comédiens se sont démarqués. Si on peut noter quelques erreurs techniques, dans certaines situations, une mauvaise exploitation de l’espace scénique, des mouvements parasites ou pour quelques acteurs des problèmes de dictions, ces points restent mineurs par rapport à la satisfaction, les rires aux larmes que cette pièce a provoqués sur votre modeste serviteur.
Avec ma belle, j'ai pris un bon risque et nous avons passé un très bon moment au Théâtre du Gymnase de Paris avec un questionnement qui me semble pertinent sur le sens de ce qu’est aujourd’hui une famille en France et le cadre proposé aux enfants pour se développer. Un débat de société.
Merci aux comédiens et à Rockia Andeme pour la mise en scène et la coordination de ce projet artistique
On attend la suite.
Ma famille au 21ème siècle, Troupe Art et Vie