Londres. En 1947. Le silence après le vacarme des bombes. La morosité, comme des cendres qui sembleraient ne plus vouloir cesser de tomber.
Des couples, des femmes, des hommes tentent de reprendre pied dans la ville en ruine, mais leur vie même paraît n’être plus qu’un tas de gravats. Kay a autrefois aimé Julia, puis l’a laissée lorsqu’elle a rencontré Helen qui la quittera pour Julia. Vivien n’arrive pas à mettre fin à sa relation avec un homme marié pour lequel l’amour s’est refroidi. Duncan, brisé par le suicide de son meilleur ami, emprisonné durant quatre ans en lien avec cette tragédie, gaspille sa jeunesse en vivant reclus avec un de ses anciens gardiens de prison. Ici et là, des indices des drames personnels de chacun des personnages. Et des petits gestes, un peu d’espoir, comme des bris d’herbe entre les pierres écroulées.
Puis nous reculons en 1944. Les bombes pleuvent. Les relations intimes chambranlent. Les passions sont exacerbées par la pluie de feu qui secoue la ville.
Enfin, un autre bond en arrière. 1941. Dans la fureur du Blitz, ces bombardements massifs menés par l’Allemagne pour démoraliser les Anglais. Nous voici ramenés à la genèse des drames et des rencontres qui ont bouleversé les protagonistes. La fin est en fait un commencement.
Ronde de nuit est un long parcours à reculons de 563 pages. Dont le rythme s’accélère au fur et à mesure qu’on remonte le temps. Le tout raconté avec une profusion de détails fascinante qui donne l’impression d’y être.
Ce roman de Sarah Waters m’a plu par la qualité de l’écriture, précise, descriptive (ce qui n’exclut pas quelques tics littéraires agaçants, quelques mots surutilisés), par la finesse et la complexité des personnages, par l’atmosphère très évocatrice de la guerre et de l’après-guerre. Il laisse cependant le lecteur sur son appétit quant au devenir des personnages. Tout reste ouvert, sans conclusion claire, sans pistes de la direction que prendra leur vie. Que cette impression déprimante qu’ils font le dos rond sous une pluie de cendre.
Sarah Waters, Ronde de nuit, 10/18, 2006, 563 pages
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