Avec son relaunch Rebirth, DC Comics a pour ambition de ramener dans ses titres des valeurs qui étaient un peu passées à la trappe dans ses New 52. Geoff Johns parle d’espoir et d’optimisme, et en lisant DC Universe: Rebirth #1, on note aussi que l’éditeur renoue avec ses couples les plus célèbres. C’est très bien.
Par contre, ce n’est pas le seul relaunch en cours : leurs séries adaptées des productions Hanna-Barbera commencent aussi en ce moment, et Marvel étale énormément chacun des siens, de façon à avoir des nouveautés tout le temps. Et qui dit relaunch dit « chapitres #1 », or de nouvelles séries apparaissent régulièrement chez tous les éditeurs.
Bref, je ne sais pas vous, mais de mon côté les achats de la semaine incluent de plus en plus de #1. D’un côté c’est agréable de découvrir de nouvelles histoires, de nouvelles équipes créatives etc. D’un autre, certains lieux communs finissent par sauter aux yeux et deviennent quasiment insupportables. Je pense surtout à ma bête noire : l’exposition.
L’exposition désigne l’ensemble des données dont le lecteur a besoin pour comprendre l’action : contexte, personnages, enjeux etc. A ce niveau-là, les séries de super-héros partent avec un gros handicap : comme elles existent dans un univers déjà établi, il faut souvent rappeler tout un tas d’informations aux lecteurs qui prendraient le train en marche. C’est le but après tout : fournir des points d’entrée clairs aux petits nouveaux, et faire revenir par la même occasion les anciens qui avaient abandonné en cours de route.
Mais cette exposition est souvent faite de façon très paresseuse. Cette semaine, Aquaman: Rebirth #1 remporte la palme (haha… pardon) de l’ennui avec 20 pages dans ce style :
Aucun effort pour nous dire ce qu’il y a à savoir sur Aquaman de façon naturelle, agréable ou originale : une narration à la troisième personne se contente de nous énumérer mollement ses caractéristiques.
Le prélude à l’introduction, ou le refus d’une page récapitulative
C’est d’autant plus décevant que DC nous sert actuellement une double dose de #1 pour leurs personnages les plus célèbres. Après un DC Universe: Rebirth #1 sous forme de déclaration d’intentions qui teasait de nombreux développements futurs (64 pages), Aquaman: Rebirth #1 nous donne toutes les infos de base mais sans proposer grand-chose de nouveau. Il faudra certainement attendre le chapitre Aquaman #1 pour enfin rentrer dans le vif du sujet… après 84 pages de comics. Pour info, avec autant de pages on fait une mini-série en 4 chapitres. Ou presque 2 albums de BD franco-belge classique.
D’autres chapitres Rebirth sont heureusement plus réussis, mais on retrouve ce défaut un peu partout. The Flash: Rebirth #1 a par exemple tellement d’éléments à nous rappeler qu’il ne reste quasiment plus de place pour un peu d’identité ou de nouveauté. Le comble pour un début de série, censé nous convaincre d’acheter la suite ! Et comme toutes ces histoires d’origines sortent de façon rapprochée, on croule sous les redites.
Une solution simple et pratique serait de recourir à une page récapitulative en début de chapitre. Sorte de « dans les épisodes précédents… » version comics, elle nous renseigne sur l’essentiel et laisse beaucoup plus de place aux auteurs pour, ben, raconter l’histoire. Sauf que DC s’y refuse, pour une raison aberrante :
@James_Blundell @RealRyanWhorton Marvel uses them. Therefore DC won’t.
— Brenden Fletcher (@brendenfletcher) 21 mai 2016
(Chez DC, Brenden Fletcher scénarisait la série Black Canary, en plus de co-écrire Batgirl et Gotham Academy.)
Les super-héros les plus célèbres ont sans doute une aura suffisante pour que les lecteurs ne s’arrêtent pas à quelques chapitres un peu légers, mais cette tendance est assez effarante.
En repassant toutes ses séries principales à 2,99 $ au lieu de 3,99 $ – quitte à sortir deux chapitres par mois au lieu d’un seul – DC va clairement à contre-courant de son rival principal, qui propose de plus en plus de chapitres plus épais pour 4,99 $ voire davantage, ce qui fait grogner pas mal de fans et de revendeurs. Proposer leur DC Universe: Rebirth #1 à 2,99 $ pour 64 pages était également une idée excellente, car elle permettait de se faire une idée claire des grandes lignes du relaunch sans y dépenser son budget de la semaine.
De manière générale, le début de Rebirth est prometteur : les premier chapitres du relaunch sont tous repartis chez l’imprimeur, ce qui est un signe d’enthousiasme certain de la part du lectorat. Mais ce serait dommage que celui-ci s’évapore rapidement parce que l’éditeur multiplie les « préludes », les « transitions » et autres « introductions » à 2,99 $ avant de se décider à enfin nous raconter de nouvelles histoires.