Marre des perturbations dues aux grèves de la SNCF, des poubelles à l'odeur pestilentielle dans Paris, de la météo capricieuse, des vociférations comme des promesses sans fondement des politiques ?
Evadez-vous dans les îles Marquises : un archipel de 12 confettis perdus au milieu du Pacifique, à 1500 km au nord de Tahiti, où un peuple particulièrement élégant a réussi à survivre malgré les progrès de la civilisation moderne, en sauvegardant une grande partie de son art et de sa société …
Vous trouverez un havre de paix, de fraîcheur et de calme sans aller bien loin : l’exposition du musée du quai Branly n’a pas l’air de drainer beaucoup de monde alors qu’elle est superbe et très bien expliquée.
Aux îles Marquises, le corps est au centre de toutes les attentions, et plus spécialement, le visage et le regard. On pare ce corps afin d’embellir, protéger, montrer le rang et le prestige de l’homme. La peau, les os, les cheveux et jusqu’à la barbe blanche des vieillards sont mis à profit pour réaliser des ornements qui proclament la lignée : des aide-mémoire, sous la forme de chapelets immenses faits de bourre de coco tressée permettent de citer les origines familiales. .. Qui ne se souvient des premières pages de la Bible … où, plus prosaïquement, les vignettes de « Vol 714 pour Sydney » d’Hergé.
"Mata est le mot qui désigne le visage et les yeux dans la langue des îles Marquises. Le visage - et en particulier les grands yeux très accentués - sont les motifs les plus importants dans toutes les formes d'art local marquisien, qu'il s'agisse de sculpture ou de tatouage.
L'oeil a une signification symbolique particulière puisqu'il est associé directement aux ancêtres. Réciter sa généalogie, qui a établi la place ou le rang de chacun au sein de la société se dit mata tetau, ou conter les yeux ou les visages. Il existe plusieurs traductions possibles de hoata : éclairé, brillant, clair, pur, miroir..."
Tiki représente le premier homme, un ancêtre divinisé : on retrouve sa représentation sculptée dans la pierre, dans des statues anthropomorphes de toutes tailles.
Ornements de tête en plumes caudales de coqs, parures de graines rouges – la couleur sacrée – faites de coquillages, de dents de requins ou de minuscules dents de dauphins, éventails mêlant les techniques les plus élaborées, tiki de petite taille réalisés dans des os humains, servant d’amulettes …
Les objets qui m’ont le plus étonnée sont ces massues u’u servant pour la guerre et exprimant le rang, dans une société hiérarchisée mais où une femme peut aussi exercer beaucoup de pouvoir.
Admirons l’homogénéité des motifs et des formes, la constance des traditions, retrouvées aujourd’hui après que la colonisation et l’intrusion des religions chrétiennes aient tenté de les faire disparaître au nom d’une morale universelle (et occidentale) – interdiction des tatouages – ou, plus dramatiquement en décimant la population (passée de 80 000 environ à 5000) par l’apport de maladies inconnues et de l’alcool.
Quand on voit les splendides paysages de ces îles volcaniques, on comprend l’enthousiasme d’artistes qui vinrent y terminer leur vie comme Paul Gauguin, émerveillé par « l’or de leur corps » et, plus près de nous, Jacques Brel.
Matahoata, exposition au musée du Quai Branly jusqu’au 24 juillet, de 11 à 19 h., sauf le lundi.