Après les excellents Moon et Source Code, Duncan Jones s’attaque à un projet de taille avec l’adaptation cinématographique de la célèbre série de jeux vidéo Warcraft. Et si l’on sent régulièrement la pression du studio planer sur le long-métrage, et l’empêcher de véritablement s’imposer, le réalisateur parvient néanmoins à proposer un spectacle loin d’être désagréable.
Malgré quelques défauts évidents – parmi lesquels le manque d’épaisseur des personnages, l’absence de réelle tension dramatique, l’intrigue trop resserrée ou le jeu d’acteur franchement inégal – Warcraft constitue en effet une entrée en matière intéressante dans un univers fantasy qui n’a certainement pas encore dévoilé toute sa richesse. Des créatures aux Orcs, en passant par les environnements et les effets spéciaux, la direction artistique se révèle excessivement soignée et propose un style visuel qui ne ressemble à aucun autre. De quoi dérouter certains spectateurs devenus tout à coup allergiques à l’utilisation de fonds verts, mais qui devrait en revanche ravir ceux qui apprécient de se plonger dans un monde nouveau. Alors certes, l’écriture laisse cruellement à désirer, de même que les 2 heures de durée semblent clairement trop courtes pour poser solidement les bases de l’histoire, mais il n’empêche que le produit final est tout de même appréciable à bien des égards. En outre, il laisse présager un beau potentiel, qui pourrait faire des étincelles si la production laisse au réalisateur le soin de vraiment l’exploiter.
Du potentiel, ce premier essai en a assurément mais on ne peut toutefois pas s’empêcher de ressentir un certain manque de liberté du cinéaste, sans doute obligé de composer avec le studio en revoyant ses ambitions à la baisse. Il en découle du coup un long-métrage attachant mais fragile. Attachant car la dimension technique (mise en scène, photographie, effets spéciaux…) offre un spectacle visuel attrayant, mais fragile car le scénario manque nettement de profondeur et n’échappe pas à l’aspect formaté qui touche aujourd’hui beaucoup de blockbusters. Côté casting, malgré la bonne volonté des acteurs, force est de constater qu’aucun n’arrive véritablement à sortir du lot. Pas aidés par un script relativement pauvre, ceux-ci ne parviennent qu’à de très rares occasions à susciter un peu d’empathie. Citons tout de même Travis Fimmel, plutôt investi dans la peau de Lothar, Ben Foster, charismatique en Medivh, et Paula Patton, seul rôle féminin ayant un tant soit peu d’intérêt. Avec une écriture plus dense de leur personnage, ils auraient certainement pu s’imposer. Côté réalisation, on saluera en revanche la fluidité des batailles et le sentiment d’immersion qu’elles procurent.Pour toutes ces raisons, Warcraft – Le Commencement se révèle donc être un film franchement inégal. Largement handicapé par un manque d’épaisseur de ses personnages et une intrigue beaucoup trop resserrée, il parvient néanmoins à sauver l’essentiel par son approche visuelle, déroutante mais intéressante, ainsi que par l’intensité de ses affrontements.