L’Utopia devient L’American Cosmograph : back to the future !
L’histoire tournerait elle en boucle ? Dans la longue saga des salles de cinéma toulousaines, l’actuel Utopia, dont les murs appartiennent à l’Archevêché de Toulouse, a connu des destins divers. Ancien théatre paroissial, puis salle de patinage, il devient une salle de cinéma en 1907, sous le nom d’ « American Cosmograph ». Salle unique de 600 places, rebaptisée « Rio » après la dernière guerre, le cinéma de Madame Lafabrier, malgré sa partition en trois salles plus petites, connut un long déclin de fréquentation. En décembre 1993, proche du dépôt de bilan, le Rio fut sauvé par l’équipe d’Utopia, venue d’Avignon, qui le débaptisa et en fit à Toulouse un lieu dédié au cinéma d’auteur et à l’Art et Essai le plus exigeant mais, dans la ville de Nougaro, il fut rapidement l’endroit où l’on pouvait, aussi, voir des films « alternatifs », engagés, personnalisant un cinéma témoin des luttes sociales et environnementales.
Ceci dit, vingt ans après, les propriétaires de l’Utopia, Anne Marie Faucon et Michel Malacarnet, ont souhaité céder leurs salles au personnel y travaillant, et non pas vendre à tel ou tel groupement de salles, à tel ou tel circuit, national ou régional. Aussi Annie Mahot et Jeremy Breta, salariés d’Utopia , ont relevé le gant, bénéficiant de dispositifs d’aide à l’installation de jeunes exploitants de cinémas, et du soutien du Crédit Coopératif, banque peu réputée pour créer des sociétés « off-shore », spécialisées dans l’évasion fiscale, au Panama...
Mais pour montrer qu’il y a changement de génération, il fallait un geste fort, et ce fut dans le changement de nom... La véritable audace, parfois, c’est de regarder en arrière, et Annie et Jeremy ont choisi de revenir au nom originel du cinéma, l’ « American Cosmograph », un nom très « vintage », comme se plaît à le souligner Annie... Un certain nombre d’ « investissements légers » devront, parallèlement, être réalisés, mais sans toucher aucunement aux « fondamentaux » des salles du circuit Utopia: défense d’un cinéma différent, refus de la « religion du box-office », volonté de s’ouvrir à des cinématographies peu diffusées dans les salles, travail d’animation effectué avec le tissu associatif et le milieu scolaire de l’agglomération.
Bref, le changement dans la continuité : la gazette devient le fanzine, le pop-corn et le cinéma 3D sont toujours bannis, les billets de cinéma sont toujours délicieusement rétro, mais l’information et l’animation des salles vont passer aussi par les réseaux sociaux, pour que le jeune public se sente comme chez lui dans ce lieu chargé d’histoire.
Le 15 juin, démarrage officiel de la nouvelle équipe, « pot de démarrage » à 18h. Back to the future !
christian.seveillac@orange.fr