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De jeunes Irakiens déplacés dans un camp à Amriyat al-Fallouja le 29 mai 2016 I ©AFP Jean Marc MOJON
Profitant de l'offensive des forces gouvernementales irakiennes pour reprendre Fallouja située à 50 kilomètres à l'ouest de Bagdad, Nasra Najm, sa fille et ses petits enfants ont échappé aux jihadistes qui contrôlent leur ville depuis janvier 2014. Après avoir marché toute une nuit pour éviter d'être pris par les militants de l'EI, qui retiennent les civils à Fallouja, Nasra et sa famille sont arrivées dans le camp d'Amriyat al-Fallouja et se sont installées sous une toile de tente. Du plastique à bulle sert de tapis sur le sol… la chaleur est déjà étouffante. Mais Nasra et les siens ont le sourire aux lèvres en voyant un plat de riz. "Nous rêvions de ça! Je n'étais même plus sûre que le riz existait. On ne pouvait pas en croire nos yeux en voyant ce plat", s'exclame la femme âgée, le visage orné de tatouages traditionnels.Depuis le lancement de l'offensive des forces irakiennes pour reprendre Fallouja, 3.000 personnes environs ont pu sortir des banlieues de la ville "épuisées, effrayées et affamées", selon le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC) qui a mis en place le camp. Leurs récits témoignent du terrible quotidien des quelque 50.000 habitants coincés dans cette ville depuis des mois, sous l'emprise de fer des jihadistes. Maher Sahib, un homme d'âge moyen qui a lui aussi réussi à fuir résume la situation d'une phrase : "regardez, avant je pesais 103 kilos, aujourd'hui j'en fais 71". Tous les déplacés racontent avoir dû se priver de riz, un des aliments de base en Irak avec le pain. "C'était une malédiction là-bas. Nous devions moudre les noyaux des dattes pour faire de la farine qui était terriblement acide", témoigne Madiha Khudair qui a quitté avec ses deux filles un village près de Fallouja. "Nous avons mis notre destin entre les mains de Dieu, nous avons pris nos affaires et nous sommes parties. En fait, nous avons couru. A un moment donné, nous avons vu un camion de gens de l'EI et nous avons rampé pour qu'ils ne nous voient pas".Tenter le tout pour le toutRasmiya Abbas, toute vêtue de noir et qui berce dans ses bras son petit-fils de cinq ans, raconte que les combattants de Daesh rationnaient la nourriture pour la population, gardant la meilleure partie pour eux. "Récemment un sac de sucre coûtait 36 euros! Le riz, ils nous en donnaient parfois 250 grammes, à peine assez pour faire un repas pour les enfants". "Nous n'avions que du pain noir, à l'orge. Si vous l'aviez vu, vous n'auriez jamais voulu en manger. Les gens de Daesh gardaient le riz, le bon pain et toutes les bonnes choses pour eux". Les 252 familles logées dans le camp sont toutes arrivées au cours du week-end dernier. Dans les tentes couleur sable, la plupart des enfants dorment pour récupérer de leur angoissant périple. Ceux qui sont réveillés remplissent des bouteilles d'eau à un camion-citerne ou attendent dans une file d’attente avec leurs mères devant une ambulance qui distribue des médicaments de base. Alors que les forces d'élite irakiennes sont entrées dans la ville, rencontrant une résistance de l'EI, l'afflux de civils déplacés pourrait encore s'intensifier. "Nous préparons davantage d'aide pour les familles qui pourront fuir la zone de combat", explique Becky Bakr, coordinatrice médias pour le NRC. Même si le chemin pour atteindre le camp est semé de dangers en raison des combats, Ahmad Sabih, père de famille quadragénaire, a préféré tenter l'aventure : "j'ai décidé de tenter le tout pour le tout. Soit je sauvais mes enfants soit je mourrais avec eux". FG