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Rira bien qui rira le dernier, de Jean-Marie Reber

Publié le 27 mai 2016 par Francisrichard @francisrichard
Rira bien qui rira le dernier, de Jean-Marie Reber

Voici une nouvelle enquête de l'inspecteur Fernand Dubois. La troisième. Elle se passe comme les précédentes dans une petite ville du centre de l'Europe trop modeste pour être jamais citée, mais tout à fait reconnaissable par ses habitants... Le lecteur y retrouve - ou y fait la connaissance - de sa petite famille, c'est-à-dire de sa femme, Giselle, et de ses enfants, Francine et Grégoire, des jumeaux, les jujus.

Gontran de Montmollin est retrouvé mort, dans son Manoir des Lilas, à sa table de travail, devant son ordinateur allumé, au matin du mardi 11 août 2015, par Gabrielle Tondeau, infirmière engagée en 1992 pour soigner sa première femme atteinte d'un cancer et devenue, après la mort de celle-ci, à la fois sa secrétaire et sa gouvernante, mais pas sa maîtresse. Il a juste achevé d'écrire un énième livre "audacieux", signé de son pseudo, Aimé Saint-Supplice:

Il se leva brusquement. L'heure n'était plus à la rêverie. Il lui fallait terminer ce bouquin, trouver une phrase finale qui sonne bien et un titre accrocheur. Il avait toujours de la peine avec les titres. Il fit quelques pas, s'étira et se rassit devant son écran, le sourire aux lèvres. Il avait trouvé. Son roman se terminerait par un proverbe: "Rira bien qui rira le dernier". Ce serait également le titre de l'ouvrage qu'il jugeait prometteur.

La mort de Gontran, un arrêt du coeur, étant considérée comme naturelle - il souffrait d'une insuffisance cardiaque et il avait soixante-dix-sept ans -, bien qu'il fût protestant non croyant, ses obsèques, présidées par un copain d'école, pasteur à la retraite, ont lieu deux jours plus tard, le jeudi 13 août, à la collégiale de la petite ville, avant que son corps ne soit incinéré.

Le défunt avait fait de brillantes études de droit, maîtrisait l'allemand et l'anglais. Il avait eu une carrière non moins brillante d'avocat puis de notaire à la fin des années soixante. Il avait fait prospérer une maison d'édition locale, La Pluie et le Beau Temps, qui avait publié ses six ou sept romans à clés, tout aussi locales, où il jetait un regard "sans concession" sur notre société et son mal de vivre...

Le jour de son retour de vacances, une semaine plus tard, l'inspecteur Dubois doit mener l'enquête sur la mort de Gontran, alors que le corps du notable est parti en fumée et qu'il n'est plus possible d'en faire l'autopsie. Le ministère public a en effet reçu une lettre de dénonciation anonyme, qui ne laisse pas d'autre choix que d'enquêter pour que l'absence d'investigation ne soit pas interprétée comme une manoeuvre de sa part pour étouffer la vérité:

Vous ne pensez tout de même pas que le vieux Gontran est mort de sa belle mort naturelle? On l'a aidé, je le sais. Vengeance ou intérêt? A vous de trouver! Intéressez-vous à la Ruskoff. Elle n'est pas blanche comme neige, même si elle vient de Sibérie. Pour le cas où vous ne tiendriez pas compte de ce qui précède, j'avertirai sans hésiter la presse qui se fera un plaisir de poser des questions gênantes. Et je n'aimerais pas être à votre place lors des prochaines élections judiciaires... A bon entendeur, salut!

Gontran de Montmollin a eu deux filles du premier lit, Camille, une artiste-peintre post-soixante-huitarde, dont le compagnon nettement plus âgé, Hans, est sculpteur sur métal, et Delphine, qui est mariée au procureur général du lieu - c'est l'élu de la lettre. Sa seconde épouse, Alexandra, une belle Russe, nettement plus jeune que lui - c'est la Ruskoff que désigne la lettre -, lui a donné une fille, Sofia, neuf ans.

On apprend que Gontran avait l'intention de léguer la plus grande partie de sa fortune à une institution charitable, que la belle Alexandra trompait son mari avec l'associé de ce dernier, Jérémy Orlando, un homme marié. De plus, on apprend que le lendemain de la première visite de l'inspecteur Dubois au Manoir des Lilas où la belle Alexandra l'a reçu, Jessica Baumann, la jeune fille qui s'occupe des chevaux de la propriété a disparu.

A partir de là, l'inspecteur Dubois, aidé de son équipe habituelle, comprenant Karen Jeanneret et son collègue Eric Riondel, interroge les différents habitants du Manoir et enquête sur eux: Alexandra Belgova, ses deux belles-filles Camille et Delphine, auxquelles il faut ajouter les époux Vuille, Marcelle et Oscar, qui, depuis six ans, s'occupent de l'entretien de la maison et du parc, de la cuisine, du ménage etc.

Avec peu d'éléments, l'inspecteur Dubois finit par dénouer l'écheveau de cette intrigue inhabituelle - y a-t-il eu crime ou pas crime? - et il le fait à sa manière simple, mais somme toute efficace: Je ne suis pas un de ces géniaux détectives qui ont fait la gloire de la littérature policière. Je ne soupçonne personne, je n'ai aucune intution particulière. Je m'efforce d'établir des faits et de réunir des preuves Et ça marche.

Car l'intérêt du lecteur de Rira bien qui rira le dernier ne faiblit pas une seconde, comme lors de sa lecture des précédentes enquêtes de Fernand Dubois, au prénom suavement désuet. Pourtant le monde de Jean-Marie Reber n'est peuplé que de gens ordinaires, replacés toutefois dans leurs milieux, mais il sait si bien leur donner chair et esprit que le lecteur a l'impresssion de les avoir déjà rencontrés dans la vraie vie, bons côtés et petitesses reconstitués. Ce qui n'est pas ordinaire...

Francis Richard

Rira bien qui rira le dernier, Jean-Marie Reber, 304 pages, Nouvelles Editions

Enquêtes précédentes de l'inspecteur Dubois chez le même éditeur:

Le parfum de Clara (2015)

Les meurtres de la Saint-Valentin (2015)


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