Absence d’abus de position dominante de Vente-privée.com confirmée

Publié le 26 mai 2016 par Gerardhaas

Aux termes d’une procédure judiciaire de plus de 6 ans, la Cour d’Appel de Paris , dans son arrêt du 12 mai 2016, n’a pas retenu l’abus de position dominante pour vente-privee.com et a aussi rejeté le recours contre la décision du 28 novembre 2014 de l’Autorité de la Concurrence.

Le litige opposé le leader de la vente privée du même nom suivi d’un « point com » à ses concurrents à savoir, Brandalley et Showroomprivé. Ces derniers avaient déposé plainte en 2009 pour abus de position dominante en l’absence d’un marché pertinent de la vente événementielle en ligne, pendant la période entre 2005 et 2011. Il était reproché au site Vente-privée.com d’abuser de sa position dominante qu’il détenait sur le marché de la « vente évènementielle privée sur internet » en imposant aux grandes marques qu’il distribue une clause d’exclusivité leur interdisant de commercialiser leurs stocks d’invendus auprès d’autres sites internet concurrents.

Le 28 novembre 2014, l’Autorité de la Concurrence avait considéré, d’une part, que l’existence d’un marché de la vente évènementielle en ligne, tel que défini dans la notification de griefs et pour la période 2005-2011 n’était pas établie et, d’autre part, qu’il n’était « plus concevable, à ce jour, d’analyser la substituabilité du côté de la demande pour la période visée par le grief notifié », dans la mesure où « la perception contemporaine qu’ont les acteurs du marché sur les possibilités de substitution qui leur étaient offertes ou qu’ils considéraient comme telles il y a près d’une décennie ne pourrait être considérée aujourd’hui comme suffisamment fiable ». En conséquence, elle avait décidé qu’il n’y avait pas lieu de poursuivre la procédure.

La Cour d’Appel de Paris avait à se prononcer sur le bien-fondé de la décision de l’Autorité de la Concurrence et en conséquence sur l’existence ou non d’un abus de position dominante de la part du site vente-privée.com.

L’obligation de définir le marché pertinent

L’application des articles L. 420-2 du code de commerce qui prohibe l’abus de position dominante et 102 TFUE (Traité de Fonctionnement de l’Union Européenne) suppose, avant de porter une appréciation sur les pratiques litigieuses, de définir le marché pertinent afin de déterminer si l’entreprise en cause y occupe une position dominante.

Cette définition préalable du marché pertinent constitue, comme le souligne l’Autorité de la Concurrence dans ses observations devant la cour, « le point de départ de l’examen à conduire » en vue de la qualification d’une pratique anticoncurrentielle.

L’Autorité de la Concurrence a rappelé le principe selon lequel « la substituabilité entre différents biens ou services du point de vue de la demande constitue le critère déterminant pour la délimitation du marché pertinent ». En conséquence, les éléments de différenciation de la vente évènementielle en ligne des autres canaux de distribution d’invendus relevés sont insuffisants pour caractériser un marché pertinent (prix, confidentialité, positionnement « haut de gamme », stocks…).

L’existence d’un marché pertinent de la vente évènementielle en ligne

La substituabilité entre produits ou services constitue « le critère déterminant du marché pertinent ». Ce principe est consacré de longue date. En effet, la Commission européenne dans sa communication du 9 décembre 1997 relative à la définition du marché en cause aux fins d’application du droit communautaire de la concurrence, avait indiqué que le marché de produits « comprend tous les produits et/ou services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables (…) ».

L’Autorité de la Concurrence a ensuite précisé que cette substituabilité s’appréciait au regard des « caractéristiques et  spécificités physiques, techniques ou fonctionnelles du produit ».

Cet examen étant insuffisant, les magistrats ont donc dû déterminer si d’autres produits exerçaient une « pression concurrentielle » compte tenu de « l’éventuelle réaction des consommateurs à des variations de leur prix ».

Pour la Cour, l’Autorité de la Concurrence n’a donc nullement confondu « pression concurrentielle » et « substituabilité », comme le lui reproche la société Showroomprivé.com. En séparant ces deux notions dans son analyse, l’Autorité de la Concurrence a recherché les pressions concurrentielles pour dans un second temps apprécier la substituabilité des produits en cause pour définir la pertinence du  marché.

Selon son analyse, les canaux de distribution physique et les canaux de distribution en ligne sont suffisamment substituables pour être intégrés dans un même marché.

Pour rappel, la Cour cite la décision n° 09-D-06 du 5 février 2009 de l’Autorité de la concurrence relative au secteur de la vente de voyages en ligne. Dans cette affaire, l’Autorité avait relevé que dans ce secteur, « la Commission européenne ne semble pas disposée à reconnaître l’existence d’un marché des services d’agence de voyages en ligne qui serait distinct du marché des services d’agence de voyages traditionnelle » et qu’à l’inverse, la Commission a « refusé de reconnaître l’existence d’un marché des services d’agence de voyages en ligne » et a estimé que « les services d’agence de voyages en ligne étaient substituables à ceux offerts par les agences traditionnelles ».

Au regard de ces différents éléments, la vente évènementielle en ligne était donc substituable à la vente via d’autres canaux de déstockage, tant physiques qu’en ligne mais aussi les offres de soldes, de rabais ou de magasins d’usine. En conséquence, l’abus de position dominante n’est pas démontré.

Pour lire les articles où nous traitions de cette affaire lors des précédents jugements, consultez « Vente-privee.com » : marque valide ou simple nom de domaine générique ? » et « Vente-privee.com donne le tournis à la 3ème chambre du TGI de Paris »

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