Le premier je l'ai trouvé surfait. Trop surjoué, trop surréalisé. Mais je l'ai admiré. Parce que le kid avait 20 ans. Il avait refilé son scénario plusieurs fois aux multiples institutions qui aident au financement de films par chez nous, et ils avaient tous refusé son script. Têtu, il l'avait tourné quand même. Et ce n'est que très tard, dans le processus de tournage, quand la rumeur et les accolades se sont fait sentir que les institutions qui avaient dit non, ont lâchement retourné leur veste et voulu coller leur nom sur sa première production.
Le film en soi? Je vous l'ai dit: trouvé plus ou moins réussi. Intense. Adolescent. visuellement prétentieux. Réalisé par un gars de 20 ans. Potentiel brillant, oui. Mais très certainement pas parfait. Et ça même Dolan le savait.
Je préfère un film prétentieux qui vise mal qu'un film timide où on a pensé qu'à viser juste.
Je n'ai pas vu Laurence Anyways. Après deux films impliquant beaucoup l'homosexualité, une réalité proche de Dolan, je n'ai pas eu envie d'explorer le transgenre et son univers. L'intensité qui semble régner dans le film et le fait que j'ai le feeling d'avoir déjà vu/lu cet arc narratif trop souvent surtout m'ont aussi éloigné du produit. Puis, le buzz autour de Xavier Dolan commençait à me tomber sur les nerfs. Il devenait un peu trop bon ton "d'avoir vu" le dernier Dolan. C'est con, ça m'a agacé. Et ses réalités me rejoignaient de moins en moins.
Mais ma fille danse à l'école de danse Claude Pilon. Claude, oncle d'Antoine, acteur principal du film Mommy. Et à force de voir l'affiche géante du film avec la signature d'Antoine dédicacée à l'école de danse de son oncle, j'ai fini par être gagné à l'usure. En allant me chercher un autre film à la vievliothèque, en en cherchant le titre (Ma Nuit Chez Maude) je tombais sur Mommy et choisissant aussi de le prendre, finalement.
J'y retrouverais tous les défauts du premier film. Mieux maîtrisés toutefois. Et absolument les mêmes personnages et thématiques. Inconsciemment, je me disais que je ne suivrais plus Xavier si il se répétait ainsi dans quelque chose qui me rejoignait trop peu.
Une large et lourde complaisance s'installait autour du nom et de l'univers Dolan.
Xavier est parti à Cannes avec son dernier film dans son baluchon et il a atteint le stade Céline Dion de la complaisance. deux moments du film, une adaptation fidèle d'une pièce de théâtre de Jean-Michel Lagarde, ont été lancée dans le monde et seuls les festivaliers de Cannes ont vu le reste. Plusieurs ont aimé, plusieurs autres ont détesté. Le film a gagné deux prix importants. Xavier était au coeur de tout. Il était devenu Céline. Nous étions trois jours au Lac Bruno et je m'attendais à lire à la télévision le titre : "Xavier va aux toilettes" sur un des multiples écrans ouverts de notre condôtel.
La bande annonce me fascinait autant qu'elle me rebutait. J'étais fasciné de savoir que Dolan avait réussi à séduire Léa Seydoux, Vincent Cassel, Nathalie Baye et Marion Cotillard que j'adore (je ne connais pas vraiment Uliel). Mais je trouve que dans la seule bande annonce, Seydoux et Cassels en font absolument trop et surjouent. Les silences et les regards sont souvent beaucoup plus payants que les mots.
Mais après tout on adaptait du théâtre. Épicentre du surjeu, tout juste après l'opéra dans l'excès visuel et dans la déclamation. Le look et le personnage de Nathalie Baye me rebutait tant visuellement et verbalement, et en si peu de temps écran, que j'ai été me chercher à la vievliothèque La Nuit Américaine de Truffaut.
Nathalie Baye y joue une adorable script girl. Elle avait alors 24 ans. C'était alors entre 1972 et 1973 et ce n'était que son troisième film. Son personnage est en marge des autres. Elle n'était pas adorable parce que jeune, mais adorable parce qu'en périphérie.
Alors vous installez votre regard sur quelqu'un, quelque chose, qui vous plait et vous en savourez les effets.
Dans la complaisance, justement.
Je me suis rappelé la beauté de la marge. La beauté périphérique. Le plaisir de sortir de la lumière commune.
Xavier est dans le bruit. Nettement sous les projecteurs. On a même eu droit aux élucubrations philosophico-mochetons de son père Manuel Tadros à la tivision ce weekend.
Je retournerai communier à l'autel de son art quand Dolan remettra un pied dans la marge.
Vais aller me chercher Tom à La Ferme, tiens.