Dix ans. Ca va faire dix années que j'ai envie d'apprendre le Russe et que je ne m'y suis jamais mis sérieusement. Quatre années que j'ai acheté un Assimil russe d'occasion, pour m'y mettre, sans m'y être vraiment mis. J'ai commencé les premières leçons, passivement, et puis j'ai vite décroché. La faute à la flemme, au pas-d'temps, au travail ; au manque de motivation, surtout. Dix ans, pendant lesquels j'aurais pu apprendre à parler au moins deux nouvelles langues ; dix ans, pendant lesquels je n'ai pas arrêté de me plaindre de ne pas pouvoir communiquer avec les locaux, dix années à être frustré d'avoir des conversations à travers le filtre d'un fixeur ou d'une bonne âme qui traduit " zueiu ul uygbe zi bie bizub oub iubi ubziub ibi ub iu bi og ozu iubezeziubfeziubefziubfz uezizfub z " par " He said yes " . Du temps perdu, que je vais essayer de rattraper dès aujourd'hui.
Pourquoi apprendre le Russe ?
Pourquoi le Russe ? Ca aurait pu être le Chinois, le Japonais, le Portugais, l'Arabe, l'Italien ou l'Allemand. Mais le voyage qui me fait actuellement le plus rêver, c'est d'aller explorer les 13,1 millions de km² de la Sibérie qui, à mon avis, est la dernière Terra Incognita touristique au monde. Les raisons sont nombreuses : obtenir un visa russe supérieur à un mois est difficile, les infrastructures sont quasiment inexistantes, personne ne parle autre chose que le Russe.
C'est pourtant l'un des endroits les moins peuplés du monde (3 habitants au km²), où de beaux paysages s'étendent à perte de vue sans aucune âme touristique pour gâcher le sentiment de solitude. Un monde à part, où l'ère soviétique n'a pas encore complètement disparu ; un monde rude, sauvage, rempli d'histoires de vie fascinantes et de villages abandonnés, à tel point que le gouvernement russe a lancé un programme d'octroi gratuit de terres sibériennes pour repeupler la région.
Le froid, les hivers rudes, les installations soviétiques abandonnées, la taïga, la toundra, les conversations avec des femmes et des hommes qui voient un étranger passer dans leur village tous les dix ans : tout ça me fait rêver.
La meilleure méthode d'apprentissage des langues ? Voici ma stratégie
Phase n°1 : Apprendre six mots de vocabulaire chaque jour
Il faudrait environ 3000 mots de vocabulaire pour avoir une conversation de fond avec quelqu'un dans sa langue, et comprendre 80 % de ce qui se dit. 3000 mots de vocabulaire, c'est à dire environ 166 mots par mois - 6 mots par jour. Largement faisable, non ?
Pour être sûr de vraiment retenir les six mots que j'apprendrai chaque jour et apprendre, en même temps, l'alphabet cyrillique, j'ai fait l'achat d'un dictionnaire illustré de 1000 mots (aux éditions Harraps) qui montre à la fois une photo, le mot en cyrillique, sa traduction phonétique et sa traduction en français. Je vais ensuite progressivement recouvrir mon appartement / mon logement de post-it de ces mots, mais seulement en cyrillique : " дверь " (dver' - " porte ") sur les portes, " ходить " (khodit' - " marcher ") sur la porte d'entrée, etc.
Phase n°2 : Utiliser une méthode (Assimil ou Harraps)
Une fois que j'aurais quelques mots dans la tête, tout en continuant la phase n°1, je vais me plonger dans une méthode de langue plus classique afin de m'imprégner de la langue, de la grammaire, de la syntaxe des phrases. Bref, apprendre à utiliser correctement les mots de vocabulaire que j'aurais appris, tout en apprenant de nouveaux mots et, surtout, de nouveaux verbes avec leurs conjugaisons.
Le rythme : trente minutes par jour, écouteurs sur les oreilles, dans les transports, en marchant, avant de se coucher, en faisant du sport, etc.
Phase n°3 : Utiliser HelloPal
Tout en continuant les deux phases précédentes, j'utiliserai ensuite une application que je viens de découvrir : HelloPal.
L'idée de l'application est simple: mettre en relation des gens du monde entier pour qu'ils puissent apprendre ou pratiquer une langue avec un locuteur maternel. Par exemple, si je veux apprendre le russe, je me connecte à l'application et, un peu à la manière des applications de rencontre amoureuse, j'aurais une liste de personnes qui parlent russe couramment (ou non, d'ailleurs) avec qui je pourrai commencer une conversation.
Selon HelloPal, pas besoin de se plonger dans une méthode classique pour apprendre à parler une langue : il suffirait de commencer une conversation et de se laisser guider en conversant à travers des phrases préenregistrées : " Salut ", " Comment ça va ? ", etc.
J'ai essayé l'application et, même si je suis assez enthousiaste vis-à-vis d'HelloPal (qui me permet de retrouver le bonheur d'avoir des correspondants étrangers - des PenPals - comme j'en avais au collège et au lycée), je pense qu'il vaut mieux déjà avoir une base dans la langue qu'on souhaite apprendre. En effet, ma plus grosse frustration a été de sentir que mon correspondant avait tout un tas de choses passionnantes à dire et, malgré le dictionnaire et le traducteur automatique, malgré les phrases préenregistrées, il était impossible d'approfondir notre conversation vers une direction plus politique par exemple.
Phase n°4 : Lire des livres et voir des films en VO
Tout en continuant les phases 1, 2 et 3, se plonger dans un roman en VO est la meilleure façon de s'imprégner dans la langue, dans ses subtilités, tout en comprenant quelques trucs de la culture russe. Personnellement, je ne choisirais pas les auteurs classiques comme Dostoievski ou Boulgakov, comme ont l'habitude de le faire les profs de langues au collège et au lycée, mais des auteurs contemporains qui racontent la Russie d'aujourd'hui, dans un style moderne et plus facile à lire, dans une langue certes moins fleurie mais bien plus adaptée à l'apprentissage de la langue. Si j'avais du apprendre à parler Français avec du Proust, je pense que je n'aurais pas été capable de parler correctement cette langue avant d'aller à l'université !
Phase n°5 : Aller en Russie
La phase ultime, la plus évidente, qui devrait en fait être la phase n°1 pour toute personne qui veut apprendre une langue : se rendre sur place, y rester longtemps en immersion, et apprendre en pratiquant. Prendre des cours dans une université, devenir serveur dans un bar, ou tout simplement s'installer quelque part et essayer de parler avec les gens autour de soi.
Mais en Russie, ça peut être moins facile qu'ailleurs parait-il. Je vous dirai ce qu'il en est lorsque j'en serai à cette phase-là !