La Correspondance de Gide avec Maria Van Rysselberghe éclaire, par la bande, la relation entre la Petite Dame et Aline Mayrisch. Une relation « mystérieuse et importante » comme l'a qualifiée Pierre Masson lors des 3èmes Journées Catherine Gide au Lavandou, et qui a rappelé « l'holocauste de sa correspondance par Aline Mayrisch, et notamment celle avec Maria. »
Aline et Maria se rencontrent en 1901 au Luxembourg chez des relations communes. « Elles partagent la même culture, les mêmes affinités intellectuelles. Et leur duo va très rapidement devenir un trio avec l'irruption de Gide », commente Pierre Masson. Riche, Aline Mayrisch joue le rôle de bonne fée, présidant aux destinées de Gide et de ses alentours, de la NRF, des Décades de Pontigny, des projets de Copeau...
C'est Maria qui va donner à lire L'Immoraliste à Aline. En 1903, cette dernière en fera une critique signée A.M. de Saint-Hubert (A. M. pour « Aline Mayrisch », suivi de son nom de jeune fille, procédé désexualisant de la signature qui n'est pas sans rappeler le « M. Saint-Clair » de la Petite Dame...). C'est également en 1903 que se place l'épisode important à Weimar qui rapproche les uns et les autres. « Chacun de nous entrouvrait pour les autres des mondes qui ne s'étaient pas encore mêlés », se souviendra Maria dans ses souvenirs recomposés de ce voyage.
Mais les relations entre Aline et la Petite Dame seront toujours compliquées, comme en témoigne une douloureuse lettre à Gide envoyée de Londres en 1913. En 1915, Maria rejoint Aline qui est malade, ce qui accentue la cassure avec Théo. En 1926, Maria est veuve. En 1928, c'est Aline. Pourtant, elles ne se rapprocheront pas. Aline part faire de longs voyages, les liens avec Maria se distendent.
C'est leur commun amour du sud de la France qui les rapprochera à la fin des années 30. En 1937, après avoir vendu la villa Le Pin au Lavandou, Elisabeth Van Rysselberghe et Pierre Herbart font construire à Cabris la maison Les Audides. Aline Mayrisch s'installera tout à côté à La Messuguière, où Gide ira souvent. C'est là qu'elle mourra, après des mois de réclusion dans la chambre de la tour, en proie à des douleurs tant physiques que morales. « Une fin qui ne lui ressemble pas », commentera la Petite Dame.
L'histoire d'amour entre Maria et Aline, demeurera mystérieuse. « Il a pesé sur cette histoire un interdit » remarque Pierre Masson. Un interdit prononcé d'ailleurs par Gide qui ne souhaitait pas voir s'établir de comparaison entre l'histoire vécue par la Petite Dame et celle entre Marc Allégret et lui. « Il faut rendre justice à Maria et à Aline : elle se sont apporté beaucoup, se sont fait du bien, et ont fait le bien autour d'elles », conclura Pierre Masson.