En 1838, dans l'Ohio, James Goodenough cultive des pommes. Mais les malheurs s'accumulent sur sa famille : à chaque fin d'hiver un de ses enfants meurt à cause de la fièvre des marais, les caprices du temps peuvent détruire en un instant ses récoltes, sa femme, Sadie, a tendance à trop apprécier l'eau de vie, les voisins sont rares bref, la vie est rude pour cette famille de cultivateurs... Les dissenssions s'exacerbent au sein du couple, James souhaitant cultiver avant tout une variété de pommes chère à son coeur la reinette dorée, pomme sucrée "au parfum de noix, de miel avec une note finale d'ananas" quand sa femme préfère les pommes à cidres qui lui permettent de fabriquer son eau de vie, encouragée en cela par John Chapman, vendeur d'arbres fruitiers itinérant. Leurs conflits permanents impacteront durablement leurs enfants.
Enfants que l'on retrouve des années plus tard, après l'éclatement de la famille. Robert a quitté l'Ohio pour tenter sa chance dans l'Ouest. Il suit William Lobb, un exportateur chargé de prélever des pousses de séquoia pour les envoyer en Angleterre. Martha, quant à elle sillonne le pays à la recherche de son frère tant aimé.
Dans ce roman foisonnant très documenté, les arbres, tout comme les hommes voyagent : les pommiers à reinettes dorées viennent d'Angleterre et les séquoias géants ainsi que les redwoods font le chemin inverse. Mêlant savamment personnages fictifs et personnages réels, Tracy Chevalier rend hommage à la mémoire de ces pionniers venus construire l'Amérique. Si les êtres qui parcourent A l'orée du verger parlent peu, leur silence dit l'essentiel. Les rapports humains, amoureux ne coulent pas de source et demandent eux aussi des sols fertiles. Chacun est méfiant, comme pour se protéger d'un monde trop grand.
Ce que j'ai moins aimé : Dans la première partie l'alternance de point de vue est déconcertante : d'abord celui de James à la troisième personne, puis celui de Sadie le personnage le plus détestable du roman -selon moi, d'autres comme Séverine l'ont adorée- qui, elle, parle à la première personne, dans un style qui se veut le sien.
La construction est elle aussi déconcertante, avec des retours en arrière, des échanges épistolaires entrecoupant l'action et permettant des ellipses temporelles de plusieurs années.
En conclusion : Même si ce roman ne bénéficie pas des qualités narratives ni du souffle romanesque de La dernière fugitive, il aborde d'un point de vue original l'histoire de ces nomades anonymes qui ont contruit les Etats-Unis.
Présentation de l'éditeur : Editions de la Table Ronde
Du même auteur : Mon préféré La dernière fugitive ; Prodigieuses créatures
A l'orée du verger, Tracy Chevalier, traduit de l'anglais par Anouk Neuhoff, éditions la Table Ronde, mai 2016, 336 p., 22.50 euros
Ma rencontre avec l'auteure est ICI : rencontre avec Tracy Chevalier