Le mercato d'hiver, thriller de Philip Kerr

Par Mpbernet

Scott Manson, le nouveau héros de Philip Kerr, est au moins aussi atypique que Bernie Gunther, trop vieux pour reprendre du service.

Athlétique – c’est un ancien international de football – il entraîne l’équipe de London City, sous les ordres de l’emblématique et charismatique manager Joao Gonzales Zarco, avec l’assistance de Maurice McShane, le coordinateur du club. Scott – il est à moitié écossais et l’un de ses grands-pères est un soldat afro-américain stationné en Allemagne – a suivi un parcours pour le moins étrange. Fils d’un ancien joueur professionnel reconverti dans la chaussure de foot – ce qui lui assure une certaine aisance financière -  diplômé de l’université, il parle plusieurs langues, et surtout, il a vécu une expérience particulièrement éprouvante : accusé à tort d’un viol, il a fait dix-huit mois de prison avant d’être totalement mis hors de cause, mais a dû prématurément abandonner sa carrière. C’est dire s’il ne porte pas la police métropolitaine dans son cœur.

C’est la raison pour laquelle, quand on découvre le corps sans vie de Zarco dans une zone improbable du stade de Silvertown Dock surnommé « La Couronne d’épines », le propriétaire du club, un ukrainien multimillionnaire pas très net, lui confie une double mission : reprendre en mains la direction de l’équipe et jouer les Sherlock Holmes afin de trouver, si possible avant la police et la presse people, l’assassin de Zarco.

Même pour une néophyte comme moi, à qui les noms de stars du ballon rond ne disent – à quelques exceptions près – absolument rien, l’immersion dans les vestiaires de ces jeunes sportifs venant de tous les horizons de la planète foot représente une sacré expérience. Ayant quelques notions de l’histoire de l’Allemagne pendant la seconde guerre mondiale, je n’étais pas aussi dépaysée dans les précédents ouvrages de Philip Kerr. Là, nous baignons dans les millions de dollars, sur les parkings où les bagnoles rutilantes des jeunes joueurs reproduisent le salon de l’automobile de Genève, la presse sportive ou populaire, la mécanique des transferts où grenouillent les agents, les règles parfois absurdes édictées par les instances internationales de ce sport universel, l’homophobie ambiante, les rivalités entre clubs, les haines recuites entre régions britanniques …

Et, par-dessus tout ça, une religion universelle, avec ses rituels, ses sacrifices, ses gourous, ses papes et ses desservants : le foot. Un polar bien construit, aux dialogues savoureux, aux personnages bien campés, qui se lit dans un souffle. Parfait avant de se plonger dans la coupe d’Europe !

Le mercato d’hiver (January Window), thriller de Philip Kerr, traduit de l’anglais par Katalin Balogh et Philippe Bonnet, aux éditions du Masque, 447 p., 20€