Ceux qui considèrent comme nécessaires les rémunérations extravagantes perçues par certains avancent parfois l’argument suivant : l’économie française doit être capable d’attirer les meilleurs. Il convient donc de ne pas dissuader des patrons étrangers de venir s’installer en France en ne leur proposant que des salaires misérables. Ou bien, autre facette de la même pensée : il faut faire en sorte que nos meilleurs entrepreneurs ne partent pas à l’étranger, attirés par des rémunérations plus substantielles. Je ne sais pas s’il existe beaucoup de tels transfuges mais il me semble que de tels cas, en arrivée ou en départ, soient exceptionnels. Plus que l’argent, c’est peut-être l’attrait de notre pays qui y amène des étrangers. Quant à l’exil, notre faible capacité à parler des langues étrangères doit interdire à beaucoup d’y songer. Mais surtout, des patrons doivent craindre de quitter l’environnement douillet de notre pays où règnent le copinage, le piston, la solidarité des élites, le système. A-t-on déjà vu quelque patron ayant failli ne pas retrouver rapidement un emploi salvateur ?
Une autre remarque, plus lourde de conséquences, porte sur la réussite personnelle. Se trouver à la tête de plusieurs milliers de salariés, n’est-ce pas un accomplissement qui porte en lui-même sa récompense ? Bien sûr, toute peine mérite salaire mais, au-delà de la satisfaction de besoins même luxueux, que peut-on bien s’offrir avec davantage de millions d’euros par an ? Gagner quelques places dans la liste des mieux payés ?
Je me souviens, après quelque présentation commerciale particulièrement réussie, d’avoir confié à un collègue : « tu vois, c’est tellement bon, on payerait presque pour le faire ! ». Et tous ces grands patrons n’auraient donc qu’une seule motivation dans la vie, le fric, rien que le fric ? Les pauvres !