réalisé par Jodie Foster
avec George Clooney, Julia Roberts, Jack O'Connell, Caitriona Balfe, Dominic West, Lenny Venito, Giancarlo Esposito, Emily Meade, Christopher Denham...
Thriller américain. 1h40. 2016.sortie française : 12 mai 2016
Lee Gates est une personnalité influente de la télévision et un gourou de la finance à Wall Street. Les choses se gâtent lorsque Kyle, un spectateur ayant perdu tout son argent en suivant les conseils de Gates, décide de le prendre en otage pendant son émission, devant des millions de téléspectateurs...
Jodie Foster a présenté pendant le festival de Cannes son quatrième long-métrage en tant que réalisatrice (après Le Petit Homme, Week-end en famille et Le Complexe du Castor) : Money Monster. Ce film présente également les retrouvailles entre Georges Clooney et Julia Roberts après les deux premiers Ocean's de Steven Soderbergh et Confessions d'un homme dangereux. Il faut savoir que le scénario de Money Monster faisait partie de la fameuse liste noire 2014 des projets qui n'avaient pas pu voir le jour. J'avais donc envie d'aller le voir pour Foster en tant que réalisatrice qui m'avait conquise avec son intelligent Complexe du Castor, pour son casting attirant et surtout pour son sujet. Mais quelque part, vu l'affiche et la bande-annonce, j'avais aussi peur d'un effet de déjà-vu et je redoutais aussi son côté très 1990s. Heureusement, mes doutes se sont rapidement dissipés. En clair, j'étais captivée par ce long-métrage dès son commentaire, je dirais même dès ses cinq premières minutes. Le défi était de taille : comment se sentir spectateur d'une émission de télé filmée pratiquement en temps réel tout en ayant l'impression d'assister à un véritable objet cinématographique et non à un objet télévisuel (surtout quand on sait que le tournage s'est déroulé dans les studios de CBS ?). Jodie Foster et son équipe ont su dépasser ce problème grâce aux nombreuses qualités que possède ce film. En effet, malgré des thèmes déjà exploités à plusieurs reprises (filmer un danger en direct, la télé comme lieu de bouffonnerie, les conséquences d'un krach boursier dans le monde entier etc...), le scénario est suffisamment bien rôdé, la mise en scène est d'une réelle efficacité et le montage est franchement bien foutu. On a beau avoir vu déjà des tas de films qui abordaient les thèmes présents et honnêtement on se doute bien comment ce long-métrage va se terminer, pourtant on arrive à avoir sa dose de surprises, à suivre les événements comment les personnages sur le plateau et les spectateurs, c'est-à-dire en se demandant quelle en sera l'issue finale. En même temps, en ce qui concerne la possible prévisibilité que pourrait posséder ce film, elle parvient à se justifier notamment à travers le discours assez cynique voire même assez pessimiste, qui colle avec notre réalité. J'ai beaucoup aimé ce point de vue dégagé qui donne une dimension davantage tragique à l'oeuvre alors qu'on s'attendait à voir un simple thriller comme on en voit beaucoup. Ce choix est d'autant plus étonnant qu'il s'agit avant tout d'un film de studio.
Malgré quelques passages qui tombent parfois légèrement dans le manichéisme (notamment à travers certaines répliques maladroites du genre " Dis que ce que tu as fait c'est maaaal "), le propos reste pertinent sur le combat impossible à mener de la part de petits individus contre un système financier qui regorge toujours de requins. Peut-être que certains diront " tout ça pour ça " mais je trouve l'impression finale cohérente avec ce que le film veut montrer. On aurait pu aussi être gavé par autant de dialogues débités dans un rythme effréné mais finalement ce n'est absolument pas le cas. Enfin, dans l'ensemble, le casting assure. Dans le rôle de Lee Gates, un présentateur télé bouffon et capricieux, qui finit par ouvrir les yeux et à montrer la part d'humanité qui existe encore en lui, George Clooney est tout simplement excellent. Je suis également ravie de voir Julia Roberts revenir avec un vrai bon rôle. Certes, il s'agit a priori d'un rôle assez secondaire en jouant une femme de l'ombre. Pourtant avec son charisme et son caractère, Roberts ne se fait pas du tout manger par son partenaire. Elle défend avec conviction ce rôle de femme forte, ce qui fait du bien dans un film de studio. J'aime également toujours autant Jack O'Connell qui s'en tire bien dans le rôle du preneur d'otage qui pète un câble en étant victime du système. J'avais au début peur de le voir trop hystérique à cause de son rôle puis finalement le jeune acteur britannique offre une interprétation très juste, à la fois angoissante et poignante. Les seconds rôles sont également très bons. L'actrice irlandaise Caitriona Balfe (de la série Outlander) est très convaincante dans ce rôle féminin également intéressant dans ce type de production, Dominic West est également crédible en pourriture même si son personnage est un chouïa caricatural. Enfin, quelques seconds rôles apportent un peu de " légèreté " qui trouve leur place comme par exemple Lenny Venito en caméraman qui se lamente à ne pas sortir du studio, Emily Meade aux réactions inattendues ou encore Christopher Denham en employé qui court dans tous les sens. Pour conclure, sans crier au chef-d'oeuvre, Money Monster est une jolie réussite. Jodie Foster réalise un film de poing efficace et pertinent, accessible sans prendre les spectateurs pour des idiots mais sans non plus intellectualiser à tout prix son propos plus fin qu'il en a l'air.