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©Reuters
2,6 tétra-octets de données et quelque 11,5 millions de fichiers, les révélations autour des Panama Papers sont loin d’être finies. Si, jusqu’à présent, beaucoup a été dit et écrit au sujet des auteurs d’évasion fiscale (dictateurs et dirigeants élus, dirigeants capitalistes, personnalités du sport, narcotrafiquants…), l’attention ne s’est pas encore portée sur les victimes de ces forfaits fiscaux et les conséquences concrètes de l’évasion fiscale sur le monde. Pourtant, le caractère secret et massif de cette évasion fiscale, estimée entre 17 et 26 000 milliards d’Euros par an, a des causes et des conséquences très graves. La plus évidente, bien entendu, est la perte de revenus pour l’État, donc d’investissement dans les infrastructures et services publics (santé, éducation, justice…). Sous l’effet d’une application têtue des dogmes néolibéraux (coupes des dépenses publiques, privatisations…), et au prétexte d’une pseudo-crise, divers pays européens -en particulier la Grèce, l’Espagne ou le Portugal- ont vu fondre au soleil leurs services publics. Mais ce qui est déjà lourd de conséquences dans des pays relativement riches, l’est encore plus dans des pays pauvres et corrompus.Prostitution de mineurs et approvisionnement clandestin de l’armée syrienneL’ICIJ est allée plus loin en pointant du doigt des hommes d’affaires Russes qui ont "kidnappé des orphelines parfois âgées de 13 ans, les ont violées, puis les ont vendues comme esclaves sexuelles (…). L’un des chefs de ce réseau était un client de Mossack Fonseca. Lorsque la société a découvert qu’il était un pédophile, elle a décidé qu’elle n’avait aucune obligation légale de déclarer le business offshore de son client".Le phénomène est connu : d’après l’association Children’s Hope Chest, 60% des orphelins entreraient dans la prostitution pour survivre et, d’après le Washington Post, "des centaines de filles auraient disparu, passant d’orphelinats à la prostitution, leurrées par la promesse d’un emploi, pour certaines d’entre elles, et d’autres enlevées". L’estimation de la police russe donne le chiffre de 50 000 victime du trafic sexuel à Moscou en 2007, dont une majorité a tout au plus 16 ans.Fonseca, qui n’est qu’une des nombreuses sociétés du genre, aurait donc volontairement fermé les yeux sur ces activités illégales. Pire encore, l’ICIJ signale le rôle de Mossack Fonseca dans les bombardements de l’aviation civile syrienne sur les populations du pays. Le cabinet panaméen aurait en effet permis, par la création de sociétés-écrans, que des entreprises privées puissent continuer à fournir en combustible l’aviation de Bachar el-Assad, alors que l’Union européenne et les États-Unis avaient prononcé des sanctions contre elles. En dépit des divisions idéologiques sur la question syrienne, la manœuvre aura permis à des géants de l’industrie fossile de faire du profit sur un conflit qui finira par s’envenimer au-delà de toute proportion.L’arbre qui cache la forêtLe cabinet Mossack Fonseca n’est, peu ou prou, que l’arbre qui cache la forêt : d’après The Economist, le cabinet détiendrait "seulement 5 à 10% du marché global des sociétés-écran". Ainsi, bien d’autres scandales risquent d’éclater, seulement si on laisse la liberté d’expression aux lanceurs d’alerteà l’heure où l’Union européenne renforce le secret des affaires. FG