[Direct-to-Vidéo] The Human Centipede 2, mise en abîme d’une oeuvre horrifique

Par Rémy Boeringer @eltcherillo

Bien qu’un troisième épisode soit déjà sorti l’année dernière aux États-Unis, le deuxième volet de The Human Centipede vient d’être édité, le 9 mai dernier, directement en DVD. Incroyablement malsain, The Human Centipede 2 repousse les limites du gore et pourtant, l’aspect le plus éprouvant du long-métrage de Tom Six est psychologique. L’interprétation de Laurence R. Harvey pourrait laisser des séquelles aux moins préparés d’entre vous.

Martin (Laurence R. Harvey), quarantenaire et déficient mental, est gardien dans un parking. Passionné par le film The Human Centipede qu’il revisionne sans répit dans sa cabine, il décide de reproduire l’expérience du docteur Heiter (Dieter Laser).

Martin (Laurence R. Harvey)

À l’image de Dieter Laser, Laurence R. Harvey est dérangeant par lui-même. Son physique hors-norme, allié à une interprétation psychotique, halluciné et hallucinante, incarne à lui seul l’esthétique morbide de The Human Centipede 2. La photographie en noir et blanc a l’avantage d’accentuer les traits de l’acteur, littéralement habité par son rôle. Reprenant la même idée de base, déjà folle, du précédent film, Tom Six réussit le double exploit de verser dans l’autocritique tout en poussant le bouchon toujours plus loin. Voilà qu’il met en abîme The Human Centipede, le ramenant à ce qu’il est, un simple film de série B, pour en faire un objet encore plus dangereux que les événements relatés, lui conférant une force inspiratrice. Pied de nez à ceux qui dénoncent la violence dans l’art, dont il ne voit jamais la valeur cathartique ou l’utilisation politique, Tom Six reprend leur argument prônant qu’une œuvre violente peut inspirer des détraqués. On connaît cette diatribe contre les jeux vidéos, le rap ou le cinéma de genre, qui est si courante dans les rangs de la réaction, qu’elle est devenue banale. Ici, il n’y a aucune ambiguïté, Martin est clairement inspiré par The Human Centipede

Dick (Lee Nicholas Harris que l’on a vu dans Kingsman : Services Secrets), Martin (Laurence R. Harvey) et Mrs. Lomax (Vivien Bridson que l’on a vu dans Fury)

Son déficit mental associé à sa méconnaissance de la médecine va servir de prétexte à dépasser les limites de la décence en donnant dans la scatophilie et les sévices sanguinolents les plus pervers. Toutefois, l’humour noir émanant du personnage de Martin est une manière de contrebalancer cette violence frontale, parfois insoutenable, augmentée par les conventions morales qui volent définitivement en éclat lorsqu’il s’en prend, par exemple, à une femme enceinte. Réduit à rien, les pauvres hères qui croisent sa route ne sont plus que l’image difforme et déformée de la société qui a mis à mal Martin depuis l’enfance, uniforme et sans aspérité. Car il est injuste de dire que Tom Six ne sert aucun autre propos que celui de choquer le chaland. Par bien des aspects, les personnages secondaires que l’on croise sont bien plus flippants que Martin lui-même comme cette mère humiliante, soutien d’un père pédophile, comme ce psychiatre amateur de tourisme sexuel ou ce voisin aux allures de skinhead néonazi. Martin est le monstre inhumain qu’un humanité inhumaine engendre. On est bien loin des nanars habituels, pourtant produit à grand renforts de dollars, que l’on peut régulièrement voir en salle, resuçant les mêmes recettes à l’envie.

Martin (Laurence R. Harvey) et Miss Yennie (Ashlynn Yennie)

Tom Six, jusqu’au-boutiste délirant, a promis que chaque volet serait plus choquant que le précédant et remplis pour l’instant son contrat. Dans son œuvre, personne n’est à sauver, l’être humain est réduit à son plus simple appareil (digestif), le sordide suinte de partout et particulièrement dans les interstices du récit. Le carnage inévitable en devient presque salvateur.

Boeringer Rémy

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