Comme nous allons voter à nouveau, et même si c'est sur la même question, un rafraîchissement est utile. Je me suis livrée à l'exercice dans Le Temps. Le lien est derrière le texte:
Maintenir l’interdiction du diagnostic préimplantatoire, c’est accabler les quelques parents concernés, sans réellement protéger personne. Le peuple l’a compris l’an dernier, lorsque nous avons largement accepté l’article constitutionnel. La loi sur la procréation médicalement assistée, sur laquelle nous voterons le 5 juin prochain, avait alors déjà été acceptée par le parlement. On a donc pu se prononcer en connaissance de cause.
Le diagnostic préimplantatoire, la plupart des pays d’Europe l’autorisent déjà. Sous l’angle technique, c’est une méthode pouvant être utilisée lors d’une fertilisation in vitro et qui ne concerne donc potentiellement que 2% des naissances en Suisse. Il permet d’analyser certaines caractéristiques génétiques d’un embryon très précoce pour décider s’il sera implanté, ou non.
Il y a deux raisons de faire cela, et les analyses autorisées seront limitées à ces deux raisons. La première est d’améliorer le taux de succès de la PMA. Certaines anomalies chromosomiques empêchent le développement normal de la grossesse. A ce stade, on ne fait pas une analyse fine. En termes géographiques, on regarde le nombre de cantons sur la carte. On peut voir s'il y en a un qui manque, ou s'il n'a pas la bonne forme, on ne voit pas s'il manque une personne ou qui a déménagé. Dépister ces anomalies, c’est éviter des fausses couches.
La seconde raison d’utiliser le diagnostic préimplantatoire, c’est qu’il permet de diagnostiquer des maladies génétiques. Là, en termes géographiques, on regarde si une personne spécifique est à la bonne adresse. Actuellement, les personnes qui savent qu’elles risquent de transmettre une maladie grave à leur descendance peuvent avoir recours au diagnostic prénatal et à l’interruption de grossesse. Lorsqu’un couple a recours à la PMA dans cette situation, la voie légale en Suisse leur dicte de commencer une grossesse « à l’essai ». Le recours au diagnostic préimplantatoire éviterait ces grossesses et ces avortements.
L’interdiction actuelle du diagnostic préimplantatoire accable donc les couples concernés. En même temps, cette interdiction protège des embryons précoces contre une conception sans implantation. Ceux qui mettent les intérêts de ces embryons devant ceux des couples s’opposent donc à l’autorisation de cette technique.
Qui d’autre est protégé par l’interdiction du diagnostic préimplantatoire ? En fait, personne. Le diagnostic préimplantatoire ne permet pas d’avoir un «enfant parfait». Il faudrait pour cela être capable de tout voir dans les gènes puis de choisir parmi un nombre immense d’embryons. Impossible de voir autant, c’est une limite technologique. Impossible d'obtenir autant d'ovules, ici c'est une limite biologique.
Interdire le diagnostic préimplantatoire ne protège pas non plus les personnes vivant avec un handicap. Les associations de défense du handicap ont alerté sur le risque de stigmatisation si des maladies venaient à être étiquetées comme raison de ne pas implanter un embryon. Ce souci a été entendu. Le cadre légal est neutre, strict, extraordinairement prudent, et ne fera aucun mal aux personnes qui vivent avec un handicap. Continuer d’interdire le diagnostic préimplantatoire ne leur serait en fait d’aucun secours. Refuser la loi serait une mesure alibi, tout juste bonne à nous donner un semblant de bonne conscience à bon marché. Cette impression d’avoir bien fait, on se l’offrirait sur le dos de parents déjà lourdement frappés par le sort, et de couples qui ne veulent rien d’autre qu’un enfant, tout simplement.
La décision de juin dernier était sage : il est temps de légaliser le diagnostic préimplantatoire.