13 mai 1958 : un "vrai-faux" coup d'Etat ?

Par Mpbernet

On a les dates importantes imprimées en mémoire qu’on peut. Pour moi, le 13 mai 1958 laisse un curieux arrière-goût de danger et de chaos. J’avais 12 ans et je ne comprenais pas bien ce qui se passait, je préparais ma Communion solennelle, ma seule préoccupation d’alors avec le très prochain mariage de ma sœur aînée. J’entendais autour de moi ce qui se passait en Algérie : les « événements » disait-on, en fait : la guerre.

Le gouvernement allait de renversements en crises ministérielles. Les coalitions les plus hétérogènes se formaient pour se déliter au moindre obstacle. Il y avait eu la crise de Suez en 1956, l’abandon progressif des possessions coloniales, l’envoi de plus en plus massif de militaires du contingent – des appelés ou des rappelés – en Algérie, des morts … Je me souviens surtout de l’instabilité ministérielle, l’angoisse du vide, l’incapacité à trouver une solution consensuelle. L’impasse … Mon père, gaulliste convaincu, ne décolère pas.

L’histoire nous dit qu’en ce 13 mai eut lieu à Alger un coup d’Etat : les militaires chargés de maintenir l’ordre s’opposent à toute négociation avec les dirigeants de la révolution algérienne et veulent faire obstacle au gouvernement Pflimlin qui y est favorable. Ils créent un Comité de Salut Public, s’emparent du bâtiment du Gouvernement général, incitent les habitants d’Alger à descendre manifester « dans le calme », font des déclarations tonitruantes du haut d’un balcon, projettent d’envahir la Corse puis la Métropole. C’est la panique à Paris. Les mutins ou ceux qui leur sont proches (quelques noms me reviennent comme Pierre Lagaillarde, le général Massu, Raoul Salan, Jacques Soustelle) vont faire appel – avec le concours de deux hommes qui lui sont dévoués : Lucien Neuwirth et Léon Delbecque – au Général de Gaulle, en « réserve de la République » depuis janvier 1946. Le général ne se dérobe pas, les hommes politiques de la IVème République  – sauf une partie de la Gauche (les communistes et l’extrême gauche) sont soulagés de lui transmettre le pouvoir.

Le général reprend les choses en mains, fait voter une nouvelle constitution dotée d’un exécutif fort assurant la stabilité des gouvernements : c’est la naissance de la Vème République, celle qui nous régit aujourd’hui, avec ses dispositions comme l’Article 16 (pleins pouvoirs temporaires) et son Article 49, alinéa 3 qui met les députés « dissidents » en demeure de trouver une majorité pour censurer le gouvernement s’ils ne sont pas d’accord pour voter un texte. Fin du régime  essentiellement parlementaire, adoption en France d’un régime présidentiel qui sera accentué par l’élection du Président au scrutin direct. L’adhésion à un homme, l’effacement des arrangements entre partis ou à l’intérieur des partis.

Le 13 mai, c’est donc une date importante, même si elle est encore confuse dans ma mémoire de petite fille. On devrait en parler davantage.