Bien que l’état d’urgence ne doive pas devenir une mesure permanente, le gouvernement vient de déposer un projet de loi permettant sa prolongation pour assurer la sécurité lors des évènements sportifs à venir.
Un dispositif d’état d’urgence allégé
C’est la troisième prolongation de l’état d’urgence depuis les attentats de novembre. Une volonté et un objectif : maintenir une vigilance accrue pour éviter un autre attentat alors que la menace terroriste est toujours très élevée partout en Europe, et particulièrement en France et que des événements sportifs vont être organisés. C’est dans cet esprit que le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, a indiqué hier en sortie du conseil des ministres que la prolongation sera « pour une durée limitée à deux mois à compter du 26 mai » et vise « à avoir tous les moyens nécessaires pour assurer la sécurité ».
En revanche, le nouveau dispositif ne sera pas en tout point commun à la loi du 3 avril 1955 puisque ne seront pas applicables les mesures permettant de réaliser les perquisitions administratives. Justification : l’ensemble de la loi « ne présente plus le même intérêt aujourd’hui, la plupart des lieux identifiés ayant déjà donné lieu aux investigations nécessaires ». Les mesures se limiteront à des restrictions de circulation (individus et véhicules), des interdictions de séjour pour certaines personnes suivant les lieux considérés comme sensibles, mais aussi la prolongation des assignations à résidence.
Une décision motivée ?
Certainement, à la veille de l’Euro de Football qui se tiendra du 10 juin au 10 juillet, puis du Tour de France du 2 au 24 juillet, on ne pourrait que s’interroger sur la levée de ce dispositif d’exception qui va drainer des milliers de personnes. Pourtant, certaines voix s’élèvent déjà contre cette troisième prolongation, et même au sein de la commission des lois chargée de contrôler l’action des autorités dans le cadre de l’état d’urgence. Pour son président, Dominique Raimbourg (PS), il est évident qu’il faut maintenir une vigilance accrue, mais certaines mesures, comme les perquisitions ou les assignations à résidence, ne se justifient plus en l’état.
Pour le vice-président de la même commission, Jean-Frédéric Poisson : » Déjà en janvier lors de la seconde prorogation nous nous étions interrogés sur l’intérêt d’une telle mesure. Le dispositif est déjà essoufflé et très franchement je ne vois pas très bien à quoi ça peut servir. Des organisations non gouvernementales – comme Amnesty International ou la Ligue des Droits de l’Homme – sont déjà montées au créneau pour dénoncer un dispositif qui se banalise au détriment des droits et libertés. Pour les avocats des personnes assignées à résidence, dont beaucoup ont été levées, c’est l’interrogation : pourquoi leurs clients sont-ils considérés comme dangereux pendant 3 mois puis plus rien après ? »
Etat d’urgence : Le choix de la prudence
Bien que la menace terroriste, au final, soit permanente depuis de nombreux mois – oserais-je dire de nombreuses années ? – nous savons que nos dispositifs et forces de sécurités sont organisés et « sur le pied de guerre », la question de cette prolongation se pose donc réellement. Si l’on fait le bilan des actions réalisées depuis novembre, on constate, comme la commission des lois que l’ensemble s’essouffle.
Le gouvernement joue la carte de la sécurité, ce qui peut se comprendre, même si beaucoup s’interrogent aussi sur le paradoxe d’avoir, en plein état d’urgence, laissé autant de rassemblement et manifestations se tenir.
Le texte, déjà accepté en commission des lois du Sénat, sera transmis au Conseil d’État puis au parlement qui, à priori, devrait voter en faveur de la prolongation.
visuel via brain-magazine.fr