Les fauves hongrois
Le public hongrois lui-même ne les a découvertes qu’en 2006 : l’aventure picturale commencée dans les années 1900 quand des peintres sont venus de Hongrie se mêler à la vie créative bouillonnante à Paris, puis poursuivie dans les colonies artistiques hongroises, a été interrompue dès la Grande guerre. Et l’histoire du XXème siècle, avec ses deux Guerres mondiales et ses révolutions, a eu raison de ces œuvres et de ces artistes. Il a fallu attendre le début des années 2000 pour qu’à Budapest des étudiants se mettent en projet, avec la Galerie Nationale Hongroise, de les retrouver pour les faire connaître. Après deux années de recherches acharnées, dans le pays et un peu partout en Europe ainsi qu’aux Etats-Unis (les tableaux étaient cachés dans les réserves des musées de province ou chez les particuliers), de vingt-cinq au départ, la « collection » des fauves hongrois réunissait deux-cent-cinquante peintures. Elles firent l’objet d’une grande exposition à Budapest, avant d’être présentées en France en 2009.
Se contenter de ce déchiffrage serait pourtant restrictif. Les Hongrois venus en France ont découvert la peinture moderne et le fauvisme et ont ensuite importé ce « choc culturel » dans leur pays, y initiant une révolution picturale. Mais d’une part ils ne se sont aucunement constitué en mouvement (l’appellation « fauvisme hongrois » est rétrospective) et d’autre part ils ont mêlé l’inspiration occidentale à une manière spécifiquement hongroise, une gestuelle et une utilisation des couleurs originales qui ont donné lieu à des œuvres singulières, en particulier dans les paysages.
Avec une audace inouïe, les Rippl-Ronai, Czobel et autres Bornemisza associent des couleurs vives, voire violentes (vert et rouge, rose et orange, orange et violet) qui ne s’entrechoquent pas, ne se « mangent » pas les unes les autres mais au contraire se valorisent. Ces villages, maisons, églises, vues frontales où la perspective est très peu présente n’ont pour autant rien d’un carnaval. Cernés de larges traits bruns, compartimentés, ces aplats de couleur pure sont soutenus et structurés par un solide sens de la composition et un grand équilibre architectural. La souplesse et la puissance du geste, associées au plein de peinture et à la simplification des formes impriment aux paysages verdoyants et aux maisons colorées une présence exceptionnelle qui ne peut que séduire immédiatement le spectateur.
Károly Ferenczy
Károly Ferenczy, né le 8 février 1862 à Vienne et décédé le 18 mars 1917 à Budapest, est un peintre hongrois.
C’est à la fin du XIXe siècle qu’avec d’autres, il s’est rendu à Munich pour assister aux cours gratuits du peintre hongrois Simon Hollósy. A son retour en Hongrie, Ferenczy a participé à la fondation de la colonie d’artistes de Nagybánya, en 1896, en devenant l’une de ses grandes figures.
Ferenczy est considéré comme le père de l’impressionnisme et du post-impressionnisme hongrois et le « fondateur de la peinture hongroise moderne. »
Tamás Konok
L’équilibre ingénieux des formes géométriques, les lignes pures et sensibles de l’artiste sont des éléments d’une architecture de l’esprit moderne, des dessins d’un grand pouvoir d’évocation. Le mouvement de ses formes et l’ordre rythmique de la composition rappellent ses talents de musicien. Violoniste, il est en effet passé par le Conservatoire, avant d’en décider autrement. Aux Beaux Arts de Budapest, il a eu pour maître le celèbre Aurél Bernáth. Ses œuvres de jeunesse ont immédiatement été exposées à Budapest mais il était à la recherche d’horizons plus larges, à Paris et dans les galeries de Zürich. Il a donc quitté la Hongrie en 1958 et fait la navette entre Paris (où il rencontre de grands artistes tels Joan Miró, Eduardo Chillida, Alexander Calder et Antoni Tàpies) et Zürich durant de nombreuses années. Arrivé au moment où les Nouveaux Réalistes redécouvrent Marcel Duchamp et le dadaisme, il a également découvert les nouvelles tendances de l’art aux Etats-Unis. Il prend des risques et travaille durant de longues années avant d’exposer de nouveau dans de grandes galeries à travers le monde. Puis il revient de plus en plus vers la Hongrie. Après les expositions de ses abstractions géométriques, on découvre aussi ses montages figuratifs de photos et de graphiques où ressurgissent des souvenirs lointains et plein d’humour. Depuis toujours il est à la recherche de l’absolu. L’historien d’art new yorkais Steven Mansbach constate l’influence de la pensée bergsonienne dans son œuvre et il résume: « L’art de Konok est une recherche dynamique de la force émotionnelle et de l’intégrité intellectuelle efficacement transmise au spectateur par une abstraction rigoureusement contrôlée ».