Irlande : Le référendum des malentendus...

Publié le 16 juin 2008 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
Lundi, 16 Juin 2008 07:52
Par Sandrine Kauffer Que reste-t-il du référendum du 29 mai 2005, trois ans après le rejet du TCE par les Français et les Néerlandais ? Un immense malentendu. Les dés étaient pipés. Le malentendu plane parce que les peuples européens ne répondent pas à la question posée. Il règne un malentendu sur la méthode, sur le message, sur la réponse à la question posée, sur le projet politique et sur l'avenir de l'Europe.
Peut-on considérer, qu'en tout état de cause, les Irlandais se soient objectivement prononcés sur le traité de Lisbonne ?

Force est de constater que depuis son entrée en 1973, la République d'Irlande (Éire), qui était alors une société essentiellement agricole, s'est modernisée. Et, le rôle de l'Union Européenne a été déterminant pour le développement de "The celtic tiger". Alors que s'est-il passé ? Pourquoi ce nouveau "non" de la part d'un pays qui a bénéficié comme aucun autre, à la fois des financements européens et de son grand marché, en devenant la tête de pont de l'industrie high-tech mondiale ?
Pourquoi L'Irlande a-t-elle rejeté un texte constitutionnel ? Quels sont les effets pervers d'une consultation populaire ? Et comment déjouer les pièges d'une élection de second ordre ?
"Le référendum de malentendus" parce qu'à nouveau, le contexte a primé sur le texte. La conjoncture économique est sensible, le climat social mécontenté et les curseurs de la contestation flirtent sur le rouge. Les dernières semaines ont mis en relief la grogne des pêcheurs, des routiers et des agriculteurs européens, qui expriment des demandes pressantes et légitimes. Le prix du baril n'est pas elévé à son paroxysme, mais cela ne saurait tarder.
En, Irlande, le camp du "non" s'est s'appuyé sur les revenus modestes et les laissés-pour-compte du "Tigre celtique", les neutralistes, l'extrême gauche ainsi qu'une poignée d'entrepreneurs tenants du tout-libéralisme. Ceux qui, pour une raison ou une autre, attribuent à la construction européenne l'origine de leurs problèmes se concentrent dans les régions pauvres de la frontière avec l'Ulster, le centre et l'ouest. Ce courant populaire, voire populiste, pointe en particulier du doigt la "clause de solidarité" prévue par le traité en cas d'attaque terroriste. Et les Irlandais tiennent à leur neutralité.
L'effet de la crise financière, la chute de la croissance, de l'immobilier et le resserrement des conditions de crédit, ajoutés au déficit des services publics, (la santé et les transports) ont pu, à juste titre, alimenter un vote protestataire contre le gouvernement irlandais.
Le nouveau Premier ministre irlandais, Brian Cowen, a pris ses fonctions à la tête du gouvernement irlandais, le 6 mai dernier, après la démission de Bertie Ahern, soupçonné de corruption. Un jeune gouvernement formé sur le spectre d'un scandale financier et un référendum officiellement fixé, mardi 13 mai 2008, pour le 12 juin 2008. Les délais étaient très courts et les conditions favorables n'étaient pas réunies.
Audacieux. Et dangereux. Même si la majorité des forces vives de cette nation sont favorables au traité: les partis de droite comme de gauche, (-exceptés les nationalistes du Sinn Fein-), le patronat, les actifs, et surtout les jeunes, cette décision d'organiser pédagogiquement un référendum sur le traité de Lisbonne dans de bonnes conditions était illusoire. L'échec était patent.
Un malentendus sur l'enjeu. Le référendum est pris en otage, détourné de sa finalité. Toutes les consultations européennes sont avant tout des élections de second ordre et l'engagement des entrepreneurs politiques n'est pas significatif. Il n'y a pas d'enjeu personnel pour eux, aucun mandat n'est à la clé. Et en politique, le risque est proportionnel au gain. Et il n'y a aucun gain personnel. Les sociologues soulignent le désengagement des acteurs politiques refusant de mobiliser leurs ressources pour les mettre à profit d'un enjeu infructueux en termes de retour sur investissement, paradigme des campagnes de second ordre. Les hommes politiques seraient incapables de mener une action pédagogique d'explication des enjeux de l'intégration communautaire sans bénéfice pour leur compte personnel. 
Le référendum est un outil démocratique dangereux, dont l'utilisation nécessite une prudence extrême. Sa finalité est fréquemment détournée pour faire émerger un vote sanction. Il devient le bras armé puissant d'une opposition politique. Le référendum permet surtout, comme le démontrent toutes les enquêtes d'opinion post-référendaires, de ne pas répondre à la question posée : la majorité des électeurs sanctionnent le gouvernement en place par un vote de défiance. Ou encore d'envoyer un message, sans frais à la puissante Bruxelles technocratique et bureaucratique.
L'occasion pour le contexte, de l'emporter sur le texte... trop complexe.
Les peuples européens s'emparent du référendum pour exprimer leurs doutes, leurs inquiétudes, leurs peurs, leur colère, leurs incompréhensions, ou revendications face à la mondialisation.
Et que craignent les Irlandais ? Essentiellement que l'Europe ne leur impose de légaliser l'avortement, ou d'harmoniser la fiscalité sur les entreprises. Mais davantage qu'ils soient contraints à participer aux politiques communes la sécurité et la défense européennes. Kathy Sinnott, une eurodéputée indépendante de l'Irlande du Sud, a accusé le gouvernement français de garder le secret autour d'un projet de défense afin d'empêcher un "non" lors du référendum irlandais prévu jeudi sur le traité de Lisbonne. Nicolas Sarkozy était particulièrement désigné par les nonistes, qui affichaient : "Tout ce qui est bon pour lui, ne l'est pas pour nous".Limpide. 
"Le traité de Lisbonne n'entrera pas en vigueur au 1er janvier 2009, "mais il n'est pas mort", a déclaré le Premier ministre irlandais Brian Cowen. Ses homologues européens attendent des éclaircissements sur les raisons du refus de son peuple au traité de Lisbonne ?La France aurait-elle une part de responsabilité dans ce rejet ?
Au-delà de l'avenir du traité de Lisbonne, c'est le recours au référendum qui est remis en cause. "La démocratie représentative est plus adaptée lorsqu'il s'agit d'enjeux internationaux", confie Jean-Pierre Jouyet. Moins de 900.000 Irlandais ouvrent un seconde crise européenne.
Jacques Barrot est du même avis. À Marseille, il a déclaré avoir "toujours douté" que "la procédure référendaire (était) la bonne". Y compris en France en 2005. Ces conclusions, Nicolas Sarkozy les avaient déjà tirées en 2007.
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