Bien le coucou,
Pendant des années, on a stupidement confondu navarin (le ragoût de veau) et Mazarin (le ministre de Louis XIV). Ce Mazarin d’agneau, du coup, on s’en méfiait un peu, craignant un plat filou et sournois. Un plat ecclésiastique pour tout dire. Un jour pourtant, on a fini par piger. Le chouette navarin du printemps n’a rien à voir avec le voleur de Sicile. Ouf!
En fait, le navarin semble tirer son nom du navet. Ce qui tombe mal, vu que le navarin à la mode de chez les Slurps n’en abrite guère, de navet. On le remplace, avec un zeste d’iconoclasme lutin, par des radis, dont la saveur, un fois cuits, évoque le jeune navet, tout en offrant un rosé distrayant à l’œil.
Pour un navarin d’agneau destiné à trois adultes aux appétits cardinaux, entassez dans votre panier
- 500 grammes d’épaule de veau, détaillé en morceaux par votre boucher moustachu.
- Vingt-deux gousses de petits pois
- Quinze gousses de fèves
- Neuf petites patates nouvelles
- Une gousse d’ail de dimension notable
- Du thym et du romarin
- Un bon fond de veau: maison c’est top, artisanal c’est pas mal, industriel s’il le faut vraiment.
- Deux tomates juteuses
- Une botte d’oignons nouveaux
- Une botte de jeunes carottes
- Une botte de radis
- Une botte de sept lieux (facultatif)
L’est lourd, le panier?
Salez, poivrez et sucrez mollo la viande. Faites dorer au fond d’une cocotte dans un rien d’huile d’olive.
Pendant ce temps, pelez, épépinez et détaillez les tomates en cubes grossiers (et va donc, cube grossier!).
Effeuillez et hachez deux brins de romarin et quatre de thym.
Ecrabouillez la gousse d’ail.
Préparez un déci de fond de veau corsé.
Balancez le tout dans la cocotte avec le veau. Touillez, couvrez et laissez mijoter 45 minutes.
Pendant ce temps (bis) préparez les légumes. Tout le jeu va consister à les cuire al dente (sauf les patates) et donc à respecter à la lettre et sans discuter les instructions que voici.
Or donc (c’est très laid or donc), pelez les patates, coupez-les en quatre éventuellement (tout dépend de la grosseur des patates, banane) et faites les revenir dix minutes à la poêle avec un oignon frais émincé. Sel, poivre.
Pendant ce temps (ter) écossez les petits pois. Réservez.
Taillez (et épluchez, même si un nettoyage suffit) les jeunes carottes en deux dans la largeur. Voire en deux dans la longueur. Réservez.
Lavez et coupez les radis en deux. Réservez.
Ecossez les fèves, faites pocher une minute dans de l’eau salée, puis dérobez-les (comme dirait ce voleur de Mazarin). Réservez.
Au bout de 45 minutes donc, ajoutez les patates dans la cocotte. Touillez.
Dix minutes plus tard, ajoutez les carottes et radis. Sans touiller. Couvrez.
Dix minutes plus tard, ajoutez les petits pois. Sans touiller. Couvrez
Cinq minutes plus tard, ajoutez les fèves (quasi cuites déjà). Sans touiller. Couvrez. Comptez jusqu’à 180. Et voilà.
Maintenant, deux alternatives.
1- Vous avez un jus abondant de la mort (sans vouloir vous manquer de respect). Virez tous le matos à l’écumoire et faites réduire à feu fou, en dégraissant et en rectifiant.
2- Le jus vous semble raisonnable, tant dans sa quantité que dans son goût, aromatique et balèze, servez illico, après avoir enfilé un habit de prélat fourbe.
Côté spiritueux, on vous suggère de déboucher ce joli rouge languedocien au tarif bisou qui, longtemps, figura au rang de nos breuvages quotidiens favoris. Un vieil ami donc, le svelte mais charnu (si, si), juteux et parfumé, Arbouse du Mas Bruguière, Pic Saint-Loup, Hérault, France-d’en-bas qui-se-lève-tôt-pour-pas-forcément-gagner-plus.
Amen