Chapitre 1/3
Du village de Sainte-Catherine-de-Fierbois, Jeanne, ne sachant pas écrire, dicta une lettre pour le roi. Par cette lettre, elle lui demandait d'être reçue à Chinon. Elle l'avisait qu'elle savait beaucoup de choses bonnes pour lui. Elle lui aurait aussi annonçé, que, même fût-il caché parmi beaucoup d'autres, elle saurait bien le reconnaître.
Bien que roi et représentant la France, Charles VII était un pauvre homme. Né le onzième des malheureux enfants qu'un malade faisait entre deux accès de manie furieuse à une Bavaroise poulinière. Il avait grandi dans les désastres et survécu à ses quatre frères aînés, bien que lui-même assez mal venu, disons même fort laid. Son nez était gros et bulbeux. Cagneux, il tenait mal sur ses jambes décharnées et ses cuisses creuses. Pâle et tremblant, il regardait d'un œil petit et morne tout aller autour de lui. Pieux et modeste, se contentant de sa femme qui n'était pas belle, il menait dans ses châteaux une vie inquiète et triste. Il était peureux. Tout mince, étriqué de corps et d'esprit, fuyant, craintif, défiant, faisait triste figure. Il n'aimait pas du tout les prouesses et ne pouvait être de ces 'chevaleureux' qui font la guerre en beauté. Il pensait qu'on gagne plus par traités qu'à la pointe de la lance.
Si le roi possédait l'Auvergne, le Lyonnais, le Dauphiné, la Touraine, l'Anjou, tous les pays au sud de la Loire hors la Guyenne et la Gascogne, l'impôt ne rentrait pas bien. Il fit de la fausse monnaie, non par malice mais par nécessite, conformément à l'usage.