Par des conclusions présentées ce 28 avril 2016 dans l'affaire C-379/15, l'Avocat Général devant la Cour de justice de l'Union européenne, Mme Kokott, s'est prononcée sur la question préjudicielle transmise par le Conseil d'Etat, aux termes de son arrêt du 26 juin 2015 n° 360212. En jeu : les conditions d'annulation du décret n° 2012-616 du 2 mai 2012 relatif à l'évaluation de certains plans et documents ayant une incidence sur l'environnement
Pour rappel, par une décision n°360212 du 26 juin 2015, le Conseil d'Etat a jugé illégales certaines dispositions du décret n° 2012-616 du 2 mai 2012 relatif à l'évaluation de certains plans et documents ayant une incidence sur l'environnement.
En effet, selon le Conseil d'Etat, la compétence pour élaborer et approuver les plans et documents ainsi que la compétence consultative en matière environnementale était confiée, pour certains plans et programmes à la même autorité, sans aucune garantie relative à l'existence d'une autonomie effective de cette dernière.
Eu égard aux conséquences très importantes de la remise en cause (annulation ou déclaration d'illégalité) de nombreux plans et programmes et des actes pris sur leur fondement, la Haute juridiction a décidé d'adresser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne.
Le Conseil d'Etat a donc décidé de surseoir à statuer sur la demande d'annulation qui lui était présentée afin de transmettre une question préjudicielle à la Cour de Justice de l'Union européenne, afin de répondre à la question suivante :
" Une juridiction nationale doit-elle abroger avec effet rétroactif la transposition erronée d'une directive ou peut-elle maintenir provisoirement les règles erronées jusqu'à ce que le législateur corrige (pour l'avenir) l'erreur ? "
Dans ses conclusions, l'Avocat Général devant la Cour de justice de l'Union européenne, Mme Kokott, estime que :
" 1) Il n'est pas possible de maintenir les effets de dispositions nationales de transposition de telle sorte qu'il serait exclu d'invoquer l'article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/42/CE relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement, tel qu'interprété par la Cour de justice dans l'arrêt Seaport (NI) e.a. (C-474/10, EU:C:2011:681), à l'encontre de plans ou programmes qui ont été adoptés en violation de cette disposition.
2) Sur le fondement de l'arrêt du 28 février 2012, Inter-Environnement Wallonie et Terre wallone (C-41/11, EU:C:2012:103), les juridictions des Etats membres ne peuvent maintenir provisoirement les effets d'un plan ou d'un programme adopté en violation de la directive 2001/42 que dans un cas particulier.
3) Dans l'état actuel du droit de l'Union, une juridiction nationale dont les décisions ne peuvent plus faire l'objet d'un recours en droit national est tenue de saisir la Cour de justice en application de l'article 267, paragraphe 3, TFUE avant de maintenir les effets d'un plan ou d'un programme adopté en violation de la directive 2001/42, si cette mesure ne vise pas à transposer la directive 91/676/CEE concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles. "
Partant, si la Cour de justice de l'Union européenne puis le Conseil d'Etat suivent les conclusion de l'Avocat général, il ne sera pas possible de reporter les effets de l'annulation du décret n°2012-616 du 2 mai 2012 relatif à l'évaluation de certains plans et documents ayant une incidence sur l'environnement.
Fanny Angevin
Elève-avocate
Cabinet Gossement
A lire également :
Note sur l'arrêt "Seaport" de la Cour de justice de l'Union européenne du 20 octobre 2011Note sur l'arrêt du Conseil d'Etat du 26 juin 2015