Style googie

Publié le 27 avril 2016 par Aelezig

Le Googie (également connu en tant que Doo-Wop, Populuxe, Coffee Shop Modern, Jet Age, Space Age et Chinese Modern) est un style architectural futuriste du milieu du XXe siècle, puisant son inspiration dans l'âge atomique et la conquête spatiale.  

Né dans le sud de la Californie (USA) dès la fin des années 1940, il se diffuse le long des autoroutes américaines comme style architectural des commerces de services proposés aux l'automobilistes (motels, cafés, établissements de restauration rapide, drive-in, stations services ou stations de lavage). Plus tard, il s'étendra à des réalisations architecturales plus complexes (universités, aéroports, gratte-ciel) avant son déclin au milieu des années 1960.

Le Googie est apparu à Los Angeles, en 1949. L'automobile a connu un essor dans les années 1930 aux États-Unis, le Googie sera le style incarnant le rêve américain d'après-guerre, accompagnant la démocratisation des départs en vacances en voiture, et illustrant l'entrée dans une ère nouvelle, nourrie de l'optimisme que promettent l'ère atomique et la conquête de l'espace.

Il se diffuse sous diverses variantes dans d'autres états des États-Unis, notamment ceux du sud-ouest du pays (Nevada, Utah, Arizona) le long de la route 66, ou dans d'autres régions touristiques comme le sud de la Floride ou les stations balnéaires du New Jersey, où il prend le nom de Doo-Wop. Son épicentre reste malgré tout Los Angeles et le comté d'Orange, où demeurent de nos jours les plus beaux exemples de ce style architectural et artistique.

Selon Alan Hess, dans son livre Googie : Fifties Coffee Shop Architecture, le nom de « Googie » viendrait du design particulier d’un café conçu en 1949 par l’architecte John Lautner et qui portait le nom de « Googie's ». Ce bâtiment, situé à Los Angeles à l’intersection de Sunset Boulevard et de Crescent Heights, fut démoli dans les années 1980. Lautner serait donc à l'origine du style et de son nom, qui sera repris et interprété par d'autres, et popularisé par Douglas Haskell, professeur à Yale, qui l'emploie dans un article paru en 1952 dans le magazine House and Home. Ce terme prend cependant rapidement une connotation péjorative dans le monde architectural traditionnel.

L'architecture Googie, de même que l'architecture "canard", est à l'origine à visée commerciale, destinée à moderniser le style des motels, cafés, stations essences ou stations de lavage automatique afin de capter l'attention de l'automobiliste-consommateur. Le style va peu à peu s'étendre au monde du design, touchant notamment l'automobile en traçant la ligne des « belles américaines » des années 1950 et du début des années 1960, puis de bâtiments publics (cinémas, centres de convention, universités, terminaux aéroportuaires, gratte-ciel) et la culture populaire, notamment à travers des dessins animés comme les Jetson et les Flintstones.

Dans l'esprit, il se situe à mi-chemin entre le rêve et la réalité. L'univers du Googie est celui d'un futur utopique et idéalisé, dans lequel il n'est pas impossible de voir des voitures à ailerons voler, des fusées et soucoupes volantes en partance pour Disneyland. Le style du Space Age Inn, Satellite Shopland et l'ultra moderne restaurant Bob's Big Boy semble être la traduction dans le monde réel de la promesse lancée par Walt Disney en 1955 lors de l'inauguration de Tomorrowland : « Demain peut être une ère merveilleuse. Nos scientifiques sont en train aujourd'hui, d'ouvrir les portes de l'Ère de l'Espace (Our scientists today are opening the doors of the Space Age...) à des réalisations qui profiteront à nos enfants et aux générations à venir. Les attractions de Tomorrowland ont été conçues pour vous donner l'occasion de participer à des aventures qui sont une représentation vivante de notre futur ».

Le Googie, en tant que style architectural et artistique, est empreint de qualités métaphoriques et humoristique insolites. Il sera aussi parfois déroutant et exubérant, au point d’être souvent désavoué par les architectes classiques. Il a trouvé en revanche l’affection du grand public.

Dans des éléments de décor Googie, on retrouve fréquemment des références à thèmes historiques, allant des grottes préhistoriques à l'Ouest américain. En dépit de la modernité du style, le lien avec la nature n’est jamais rompu, justifiant l'usage de la pierre (vraie ou fausse), de jardins intérieurs, de grande baies vitrées abolissant la rupture traditionnelle entre intérieur et extérieur. Dans l'univers Googie, il n’est pas rare de voir des bâtiments en forme d'OVNI avec un mur de pierres, trois baies vitrées et des palmiers traversant le toit.

Le Googie a trouvé une forme d’expression relativement libre et créative dans sa représentation futuriste et utopique. Douglas Haskell a cependant cherché à en dégager quelques règles de base :

  • les éléments naturels doivent avoir une forme abstraite : un oiseau par exemple sera un oiseau géométrique
  • Les thèmes doivent être multiples : un champignon abstrait sera surmonté d'un oiseau géométrique
  • La gravité doit être abolie, les bâtiments doivent être comme suspendus dans les airs
  • L'inclusion est à préférer au minimalisme

Les architectes sont aidés par une toute une nouvelle gamme de matériaux comme le verre feuilleté, l'amiante, le contre-plaqué ou encore le plastique. D'autres innovations techniques permettent de travailler l'acier et le ciment de façons nouvelles.

D'une manière concrète, le Googie se caractérise par un certain nombre d’éléments architecturaux et graphiques qui le rendent singulier :

  • Toits profilés : en forme de boomerang, donnant l’impression que le bâtiment est prêt à décoller. Furent également construits, des toits paraboliques.  
  • Dômes : souvent en béton, cette forme évoque les stations spatiales habitées et les soucoupes volantes qui illustrent les magazines de science-fiction de l’époque.
  • Baies vitrées : elles présentent un double intérêt. Elles permettent d'une part à l'automobiliste de voir ce qu'il y a à l'intérieur du magasin, transformant la façade en grande vitrine. Cet aspect prend toute son importance à une époque où le consommateur dépend de sa voiture pour faire ses courses. D'autre part, ces baies font entrer l'extérieur à l'intérieur, et notamment la lumière. Ces y
  • Boomerang : la forme du boomerang est omniprésente dans le design des années 1950, y compris en architecture. On la retrouve notamment dans les enseignes commerciales, l'ameublement, les logos d'entreprise ou les imprimés textiles. Ses origines en tant que symbole de l'ère du jet et de la conquête spatiale sont un peu floues, on peut y voir une allusion aux ailes des pilotes, à l'art expressionniste ou bien encore l'idée que la flèche indique la direction du futur et du progrès.
  • Amibe : cette forme est celle d'une goutte d’eau amorphe, présente sur les préenseignes ou les piscines des motels. Elle serait apparue avant le boomerang et serait issue des techniques de camouflage de la seconde Guerre mondiale.
  • Atome : cette forme apparaît fréquemment, sur les panneaux, enseignes, vaisselle, électroménager. Ses anneaux entrecroisés symbolisent l’ingénuité humaine et la promesse d’un monde sans limites techniques en ce début de l'Age atomique mais reflète également la préoccupation des Américains autour de la menace nucléaire pendant la guerre froide. Il symbolise la recherche scientifique sur la matière, mais également de manière plus approximative le système solaire.
  • Etoile : plus omniprésente encore que l'atome, cette forme symbolise le cosmos exploré par les astronautes.
  • Poutres métalliques apparentes : soutenant la structure ou poursuivant un but purement décoratif, les poutres en acier sont peintes et souvent percées de trous à formes géométriques à la fois pour en donner un aspect plus léger et les faire ressembler à des pas de tir de fusées.
  • Soucoupes volantes : cette forme est caractéristique du courant Jet Age ou Space Age est inspirée des livres, magazines et films de science-fiction. Elles illustrent aussi cette nouvelle ère de l'aviation dont les progrès permettent de démocratiser les liaisons intercontinentales, et notamment transatlantiques qui supplantent dès lors les traversées en paquebots.

Le Googie projette sur le futur des espérances naïves et utopiques. Porté par une certaine forme d'optimisme, le style finit par s'éteindre au milieu des années 1960 avec le ternissement du rêve américain d'après-guerre. Les raisons en sont diffuses mais parmi elles, les plus communément citées sont l'assassinat du président Kennedy le 22 novembre 1963, marquant une certaine perte de l'innocence du peuple américain, le début de la guerre du Vietnam en 1964, l'arrivée à l'adolescence des baby boomers, se rebellant contre les valeurs de leurs parents, un regard moins naïf et romantique sur le programme spatial, etc.

Le Googie se démode définitivement à partir de 1968, cédant la place à un style plus conventionnel. Au fil du temps, de nombreux bâtiments Googie sont transformés, abandonnés ou détruits. À partir des années 1990 et 2000, un programme de conservation est entrepris par les autorités fédérales et locales via une série de classements des bâtiments les plus caractéristiques du style, traduisant alors de l'intérêt architectural et historique grandissant d'une architecture jusqu'alors délaissée.

D'après Wikipédia