Theri, le justicier au grand coeur

Par Rémy Boeringer @eltcherillo

Theri, deuxième film d’Atlee, nouveau venu sur la scène tamoule, réunit trois acteurs stars, Vijay, Samantha et Amy Jackson pour un long métrage explosif, flirtant avec la série B policière, donc résolument foutraque par instant, mais dont le scénario est aussi émouvant qu’engagé, pour un résultat génialement dosé.

Vijay Kumar (Vijay) est un policier incorruptible qui s’attache à résoudre tous les crimes qu’on lui confie. Lorsqu’il s’en prend au fils d’un ministre, qui a violé et tué une jeune femme, il s’attire les foudres de sa hiérarchie et de ce dernier (J. Mahendran) qui jure de se venger. Le prenant à la légère et décidant de se consacrer à l’éducation de sa fille Nivi (Baby Nainika), il ne se doute pas qu’elle et sa femme Mithra (Samantha que l’on a vu dans Thanga Magan) sont en danger.

Vijay Kumar (Vijay) et Nivi (Baby Nainika)

Véritable spécialité de l’industrie cinématographique indienne, permise par le format fleuve des films produit, qui mélange les genres sans se soucier des genres fait de chaque film un ovni pour un spectateur occidental non avisé. Theri ne fait pas exception à la règle mais s’y adonne avec une virtuosité certaine. C’est ainsi que Vijay est tout à la fois un flic aux allures de vigilante, bien qu’il ne sorte jamais son flingue et préfère tataner les malfrats tout autant qu’un amoureux transi et sensible. Mais c’est surtout un père exemplaire, compréhensif et soucieux de donner à sa fille, une éducation exemplaire. Et il ne s’agit pas là d’une éducation bourgeoise mais d’une éducation de bon sens, de bienveillance à l’égard d’autrui. Il ne cherche pas à faire de sa gamine un médecin mais une fille bien. Les nombreuses bastons qui émaillent le scénario, parfois sur fond de musique techno inaudible, sont autant de prétextes pour mettre en avant son principal précepte : « Le bandit, l’assassin, le violeur, le terroriste, qui qu’il soit c’est avant tout l’enfant de quelqu’un. Alors avant de corriger le monde, élevons d’abord nos enfants comme il faut… Le monde se corrigera de lui-même… ». Dans des chorégraphies plus improbables les unes que les autres, à la limite du nanard, ce qui leur donne un cachet irrésistiblement comique, il corrige les méchants avant de les confier à ses collègues.

Vijay Kumar (Vijay)

Une scène hilarante, le campe en professeur improvisé alors que des soûlards ont investis une salle de classe qu’ils ne veulent pas quitter. Inutile de vous confier que dans ce cas, il n’est pas contre les châtiments corporels. Bonhomme au grand cœur, il s’emporte dès qu’il ressent l’injustice qui effleurent à chaque coin de rue de son pays. C’est ainsi qu’il admoneste des voyous membres d’un réseau qui force les orphelins à mendier, qu’il s’occupe de ses collègues corrompus ou qu’il réagit promptement aux agressions sexuelles qui, malheureusement, sont légions et souvent impunis en Inde. Lorsque le malheur s’abat sur sa propre famille, dans une terrible scène poignante dont la violence frontale vaut bien un Tarantino, y survivant de peu, il décide de ne pas chercher à se venger mais plutôt de prendre soin de sa fille. Avec la maîtresse de celle-ci, Annie (Amy Jackson que l’on a vu dans I et Thanga Magan), une idylle qui lui redonne le goût à l’Amour renaît tandis que son fidèle bras droit, Rajendran (Rajendran) reste à ses côtés pour le soutenir. L’honneur perdu de ses ennemis les poussant à continuer de le harceler, il va alors prendre les choses en mains et régler, au sens propre, les comptes avec ceux qui représentent clairement les trois visages tutélaires des malheurs de l’Inde, le politicien corrompu, le policier véreux et le PDG sans scrupules. Si les pouvoirs publics ne font pas leur travail contre la corruption, alors c’est peut-être au peuple, que Vijay reconverti dans la boulangerie représente, de prendre les choses en mains. Ne glorifiant pas la violence, il en fait un moyen parfois nécessaire et non une fin inévitable.

Annie (Amy Jackson)

Theri s’inscrit dans cette tradition louable du cinéma indien d’offrir des divertissements grands publics sans jamais omettre de porter une charge contre un système profondément injuste, sclérosé par les castes et où l’argent devenu roi a, peu à peu, ôté a sa valeur première à la vie humaine. N’hésitez pas à aller le voir en salle, c’est la garantie de rire de bon cœur et tout en apprenant, l’air de rien, beaucoup de chose sur les problèmes sociétaux indiens.

Boeringer Rémy

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