Je sais où tu es de Claire Kendal 4/5 (06-04-2016)
Je sais où tu es (369 pages) est paru le 3 février 2016 aux Editions Albin Michel, dans la collection Spécial Suspense (traduction : Nathalie Cunnington).
L’histoire (éditeur) :
Un matin, Clarissa se réveille dans le lit d'un collègue, sans aucun souvenir de ce qui l'a menée là. Bientôt cet homme fait de sa vie un cauchemar. Espionnée, traquée, harcelée, Clarissa doit faire face à une obsession toujours plus menaçante. Saura-t-elle s'en échapper avant qu'il ne soit trop tard ?
Mon avis :
Voilà un thriller, premier roman de l’auteure Claire Kendal, sorti le 4 février 2016, qui est un peu passé inaperçu alors qu’il mérite vraiment d’être découvert.
Clarissa, lors de la soirée de lancement d’un livre dans une librairie, fait la connaissance de son auteur, Rafe Solmes (professeur à l’université où elle travaille, qu’elle ne connait que de vue) et passe la nuit avec. Au réveil, elle n’a aucun souvenir de cette nuit, mais découvre des bleus sur les cuisses, des marques aux poignets et garde un douloureux mal de tête. Elle choisit de mettre tout de suite fin à ce qui pourrait être le début d’une relation. Mais Rafe, n’est pas de cet avis. Depuis 3 mois, il ne cesse de la harceler, la suit, lui offre des présents… et cette relation à sens unique commence à prendre l’aspect d’une traque malsaine et dangereuse.
Alors, quand Clarissa apprend qu’elle est choisie pour être jurée dans une affaire de viol et séquestration à Bristol, elle y voit enfin le moyen de fuir cet oppressant quotidien à Bath et de souffler en échappant à l’emprise de cet homme. Sauf que ce dernier est tenace et ne compte pas laisse partir ainsi sa dulcinée…
Je sais où tu es est un livre vraiment inquiétant et asphyxiant. A travers une double écriture, l’auteure maîtrise à merveille cette plongée dans la vie de Clarissa Bourne, secrétaire sans histoire, célibataire depuis peu (après une relation compliquée avec Henri). Elle nous entraîne dans un récit à la première personne via son journal intime. Parce que, après avoir essayé de prévenir la police, Clarissa a pris conscience que la justice ne pouvait rien faire pour elle sans preuve. Alors, comme le suggère la brochure anti-harcèlement, elle note sans relâche dans un minuscule carnet ce qu’elle vit et tente de garder une trace de tout ce que lui fait subir Rafe.
Et, en alternance, Claire Kendal nous conduit (grâce à la troisième personne) dans le quotidien de son personnage, sa mission en tant que jurée et ses relations avec les autres membres du procès. On est ainsi tenté, comme l’héroïne, de faire le lien entre ce qu’elle endure et la réalité de l’affaire qu’elle doit juger. La victime présumée est difficilement défendable…ou plutôt, pointée du doigt (sans aucun ménagement) comme responsable en quelque sorte de ce qu’elle a vécu (ou déguisant la réalité). Face à ce constat, Clarisa ne peut qu’imaginer sa situation transposée à celle en lien avec le procès… Glaçant et stressant !
Cette succession alternée de l’écriture permet tantôt de faire monter la tension, tantôt de nous accorder quelques pauses dans la lecture de ce journal qui met particulièrement mal l’aise, tant la situation semble impossible à solutionner et l’aboutissement clairement incertain pour Clarissa. Voir fatal ! La tension psychologique est forte et clairement palpable. On se met facilement à sa place et, sachant que dans la réalité ces faits ne sont pas rares, on vit plus intensément ce qu’elle endure. « Et si c’était nous ? » guide avec force notre lecture ! Son harcèlement devient le nôtre et, comme elle, on se sent pris au piège et esseulés.
Je dois dire que Claire Kendal maîtrise très bien le suspens et arrive, grâce à une écriture dynamique, à nous captiver jusqu’au bout. La fin laisse un goût de trop peu quand même, mais dans l’ensemble Je sais où tu es est un thriller psychologique hyper efficace. Elle a mit le paquet sur Rafe, manipulateur désaxé, intimidant et menaçant qui reste tout à fait crédible.
En bref : avec Je sais où tu es, Claire Kendal fait monter la pression et l’oppression avec force, et signe un premier roman très réussi, qui ne laisse pas indifférent.