Tout chaud sorti des presses, ce roman a été inventé, imaginé, fabulé par monsieur Denis Thériault. Avant tout, cette question que je désire vous poser depuis longtemps : le connaissez-vous ? À part de vous douter que c’est un de mes auteurs préférés ; savez-vous qu’il a été publié dans 18 pays et en 11 langues ? Je vous en bouche un coin, n’est-ce pas ! La fiancée du facteur est son quatrième roman et il se veut une prolongation de l’ambiance et des personnages de son deuxième roman : Le facteur émotif (Entre les deux, il y a eu La fille qui n’existait pas que j’ai adoré).
Le personnage du facteur est toujours aussi central dans cette histoire, et donc on y retrouve de la calligraphie, de la correspondance, des haïkus, et rajoutons l’ingrédient qui lie le tout : l’amour entre un homme et deux femmes.
Un nouveau personnage fait son apparition, Tania, d’origine Bavaroise, qui se dépose à Montréal pour ses études, desquelles on n’entendra pas parler, trop occupée qu’elle est à son emploi de serveuse au Madelinot. C’est entre une portion de tarte servie au facteur Bilodo et des échanges timides sur la calligraphie et les haïkus que Tania attrapera son sérieux béguin pour ce facteur. Lui, se présente toujours penché, soit au-dessus de son assiette, soit au-dessus d’une feuille de papier.
Leur histoire s’amorce par un quiproquo qui sera fièrement récupéré par la jeune serveuse qui est prête à tout pour conquérir « son » facteur. Elle a décidé qu’il était l’homme de sa vie, ce qui entraine à ses yeux qu’il devra, tôt ou tard, la considérer comme la femme de sa vie. L’audace, l’esprit d’entreprise et la flamme d’idéalisation suffiront-t-ils à ce qu’il devienne sien ? Cette serveuse de 23 ans aura les éléments naturels de son bord ; un orage fera basculer, en même temps que ses trombes d’eau, le destin.
Cela peut parait assez énigmatique, eh bien, ce l’est, mais attention pas hermétique pour un sou.
La volonté de cette Tania est passionnante à voir se décliner par des actions téméraires, l’appropriation de ce Bilodo devenant son plan de vie. Et je vous assure qu’elle a plusieurs astuces à son arc. Et puis, le cher Bilodo est tout un numéro, il ne donne pas lui non plus son pareil pour sublimer l’être aimé avec qui il entretient une correspondance. La rivale de Tania n’est pas visible dans le quotidien de l’auteur de haïkus, ce qui lui accorde un avantage considérable. Vous imaginez bien que la partie ne se gagne pas facilement quand on se bat contre un amour qui ne se confronte jamais à la réalité. On parle ici quasiment d’un amour fétiche.
Par la bande, Denis Thériault se trouve à aborder la question de l’identité préservé, ou non, lorsque l'on se voit envahi de la flamme amoureuse. Être amoureux implique-t-il de connaître une personne ? Pas nécessairement. Et si on ne connaît pas vraiment une personne, qui aime-t-on alors ? Peut-on se forger un être aimé ? Et si oui, nous gardons le contrôle de la situation quant en fait, l’amour n’est-il pas des pages blanches que l’on remplit à deux ? Dans cette histoire, attendez-vous à vous faire jouer des tours par le destin taquin.
La fiancée du facteur est une formidable démonstration de l’apprivoisement, qui va dans tous les sens et prend tout son sens. Ce roman est tout cela et plus encore, car il est abondamment et régulièrement assaisonné de ces petits poèmes aux trois petits tours et puis s’en vont que l’on nomme des haïkus :
Tourbillonnant comme l’eaucontre le rocherle temps fait des boucles